Politique
Déclarations de John Kerry sur les modifications des constitutions en Afrique : « Ce qui vaut pour un pays X ne le vaut pas forcément pour un pays Y », Toussaint Abel Coulibaly
Publié le mardi 12 aout 2014 | Le Quotidien
© AFP par DR
Le secrétaire d`Etat américain John Kerry et le président, Blaise Compaoré Lundi 4 août 2014. ÉTATS-UNIS, Washington |
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Les rideaux sont tombés sur le sommet entre les chefs d’Etat africains et Barack Obama qui a eu lieu, du 4 au 6 août 2014, à Washington aux Etats-Unis. Suite aux déclarations tenues par le secrétaire d’Etat américain, John Kerry par rapport aux modifications des Constitutions en Afrique en ces termes : « Nous presserons les Etats africains à ne pas modifier les Constitutions pour des bénéfices personnels ou politiques », nous avons pu recueillir l’avis de certains acteurs politiques dont Toussaint Abel Coulibaly, président de l’Union pour la république (UPR). Selon lui, même si le Burkina est aussi « indexé » par ces déclarations, il préconise la solution à la Burkinabè par un dialogue national interne via les médias nationaux en vue de trancher le débat sur la modification ou non de l’article 37 de la Constitution. Pour lui, il est important de privilégier les débats, même en langues nationales, pour permettre à la majorité silencieuse de comprendre le fond du débat. « Sinon je crains que les débats restent dans les tranchées et finissent par les affrontements », a-t-il averti. « Nous n’avons pas à exporter nos sujets internes pour en débattre pendant que ce qui en ressortira sera mis en œuvre au Burkina Faso», a poursuivi Toussaint Abel Coulibaly.
Le Quotidien : Quelle analyse faites-vous des déclarations de John Kerry, lors du sommet des chefs d’Etats africains avec Barack Obama, notamment sur les modifications des Constitutions en Afrique ?
Toussain Abel Coulibaly : La position du parti est connue sur un certain nombre de sujets. Ce qui est important, c’est qu’au Burkina Faso, nous puissions toujours nous souvenir de là où nous venons. Nous sommes l’un des rares pays au monde qui a été supprimé et reconstitué avant de devenir indépendant. Cela a été possible grâce au combat d’un certain nombre de personnalités dont on ne voit pas très souvent le souvenir. Je pense que les débats autour de la modification ou pas de l’article 37 de la Constitution doit être avant tout un débat national. Ce qui veut dire que nous ne comprenons pas pourquoi, nous allons transposer le débat sur la scène internationale avant de l’avoir vidé au niveau local. Nous avons au Burkina des sociétés de presse compétentes comme les radios, les télévisions. En ce qui nous concerne, nous serons pour qu’il y ait un débat radiotélévisé où l’ensemble des acteurs à savoir ceux qui sont pour ou contre la révision puissent se retrouver autour d’un plateau de télévision Burkinabè. S’il le faut le débat peut se dérouler en langues nationales. Les bribes de phrases que nous rapportons par ci et par là ne sont pas de nature à éclairer la majorité des Burkinabè. C’est dire donc que le secrétaire d’Etat américain s’exprime ou toute autre personne s’exprime, cela est normal. Vous avez vu que le président du Faso s’est exprimé par la suite. Moi, je suis fier des propos qu’il a tenus. Tout Burkinabè devrait être fier de ces propos parce
qu’il a parlé en tant que président de l’ensemble des citoyens du Burkina et non en tant que président d’un clan ou d’un groupe. Tous les Burkinabè devraient saluer cela. Le président du Faso est allé dans la logique de ce que nous souhaitons, en ce sens que le débat puisse se mener au plan national. Nous n’avons pas à exporter nos sujets internes pour en débattre pendant que ce qui en ressortira sera mis en œuvre au Burkina Faso. Il y a un dialogue qui a été prôné par le Font républicain. En prélude à ce dialogue, je souhaiterais que nous, les acteurs politiques, ayons la courtoisie de nous asseoir autour d’une table, arguments contre arguments, pour éclairer la lanterne des Burkinabè. Aucun groupe, à lui seul, ne peut faire le bonheur du Burkina. Que nous soyons pour ou contre la modification de l’article 37, c’est ensemble que nous pouvons avoir le bonheur pour notre pays. Certains l’ont fait avant vous et d’autres le feront après nous. C’est en cela que nous éviterons d’exposer nos problèmes là où les solutions ne sont pas. Les solutions de nos problèmes ne se trouvent pas à l’extérieur mais à l’intérieur.
Vous prônez le dialogue national, à travers les medias nationaux, alors que le président fait le plus souvent des déclarations à l’extérieur du pays ? Cela n’est –il pas paradoxal ?
Je fais la différence entre le président du Faso qui est le président de tous les Burkinabè et les acteurs politiques qui mènent le débat. Ce sont les acteurs politiques qui débattent. Il nous appartient de nous asseoir autour d’une table et même de parler en langues nationales. Nous devons faire tomber le complexe de ne pas parler en langues nationales et accepter aller au débat dans ces langues. Ainsi, nous pourrons permettre à tous les Burkinabè de savoir de quoi, il s’agit. Sinon, je crains que nos débats restent dans les tranchées et qu’on finisse par les affrontements. Tous ceux qui débattent aujourd’hui, ont eu, à un moment donné, à dire la même chose. Nous sommes adversaires avec tous les partis politiques qui ne sont pas l’Union pour la république (UPR) parce qu’ils nous combattent sur le terrain politique. Par contre, nous allons nous allier à des positions qui semblent être meilleures pour nous, au cours d’un débat public. Il faut qu’on arrête de jeter une phrase par ci et par là et que chacun rebondisse sur ce que l’autre a dit. Si nous restons dans cette logique, le débat ne peut voler très haut. Nous avons suffisamment de qualité pour débattre, le temps que cela vaudra, autour d’une table où toutes les télévisions, les presses écrites, les radios qui le désirent sont représentées. Après ce débat, si un dialogue est engagé, les populations comprendront. Je suis très sceptique quand il s’agit de propos venant de ceux qu’on appelle les puissances économiques. Le Burkina Faso est un pays qui se réclame indépendant. La parole du plus grand religieux du monde, quelle que soit sa confession ne peut pas valoir pour tout le monde. Par exemple pour le christianisme, il y a un pape qui est le chef de l’église. Il arrive que des chrétiens qui croient en Dieu, père et fils n’appliquent pas exactement ce que dit le pape. Cela est une question de religion et de foi. Nous sommes ici sur le terrain politique. Ce que le secrétaire d’Etat américain dit peut être la bonne voie pourvu que le terrain politique y soit favorable à l’application de ce qu’il préconise comme, il peut être défavorable à l’application de ce qu’il prône. Je prends un exemple. A un moment, on a crié pour dire que Kaddafi est en train de tuer son peuple. Est-ce aujourd’hui, la Lybie est tranquille ou est ce que la communauté internationale est en Lybie ? Nous devrons prendre l’exemple de ce qui se passe ailleurs pour ne pas tomber dans l’erreur. Ce qui vaut dans un pays X ne vaut pas dans un autre pays Y. Tout dépend de l’ensemble des acteurs. Si aujourd’hui le Burkina est bien, ce n’est pas une question de Blaise Compaoré ou d’une autre personne. C’est une question de tous les Burkinabè. Nous qui avons la chance de nous exprimer, il ne faut pas que nous induisons la majorité silencieuse en erreur, en faisant croire qu’il y a un système et que si on y adhère, tous les problèmes seront réglés. Tous les problèmes ne seront réglés que si tous les Burkinabè se mettent autour d’une table pour trouver une solution à la Burkinabè 1
Propos recueillis par Soumoubienk
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