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Burkina Faso: le calvaire des petites commerçantes sur les routes des marchés locaux
Publié le jeudi 10 juillet 2014   |  AIB




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Ouagadougou – Veuves, divorcées, filles-mères ou en couple, elles sont nombreuses, ces femmes burkinabè qui voyagent de marché en marché pour assurer leur pitance quotidienne au péril de leur vie, dans un pays où 43,9 % des ménages vivent en dessous du seuil de pauvreté.

Par Namazé Dramane TRAORE

«Vous voyez ce camion 10 tonnes, les propriétaires embarquent d’abord les marchandises jusqu’en haut, et après ils disent, hé les femmes montez on va partir. On escalade le fer jusqu’au sommet», a résumé leurs conditions de transport sur les axes routiers des marchés, Rasmata Ouédraogo connue sous le sobriquet de Tibila, vendeuse de condiments et fruits au marché «El nour» à Ouagadougou depuis plus de dix ans.

«Il faut que tu portes deux culottes, parce qu’en montant si tu écartes tes pieds et que la première se déchire, que celle qui est en bas puisse protéger ta nudité. Mais si tu mets une seule et en escaladant elle te lâche, c’est aïe, venez voir maintenant!», s’est exclamée Tibila.

«Les animaux sont en haut, si vous vous asseyez en bas, ils pissent sur vous. Donc, vous êtes obligés de prendre un plat pour recueillir les urines. Et si tu ne veux pas que les urines te mouillent, tu es obligée de monter t’asseoir sur les sacs», a-t-elle poursuivi.

L’histoire que raconte Tibila est la même pour plusieurs centaines de femmes qui, au petit matin de chaque jour, se rendent dans les profondeurs du pays sur des engins à deux roues transportant de gros paniers contenant toutes sortes de condiments, faufilant entre les usagers de la route.

D’autres par contre empruntent des camions dans lesquels, commerçantes, marchandises et animaux se côtoient. Ces femmes encourent de multiples dangers souvent mortels sur les axes routiers qu’elles empruntent du fait de leurs piteux états et de ceux des camions.

«Nous savons que notre métier est dangereux surtout nos conditions de voyages qui laissent à désirer. Mais nous n’avons pas le choix» a lancé Michelline Savadogo, une jeune mère de 25 ans avant de sauter dans le camion 10 tonnes devant les conduire à Ouahigouya (Nord) à 185 km de la capital Ouagadougou.

-Pas la chance d’aller à l’école-

Le retard de scolarisation féminine(12,9% contre 24,8% pour les hommes) constitue un frein à la participation de la femme burkinabè au secteur moderne. Celle qui sont scolarisées représentent environ 21% des effectifs dans les administrations publiques et seulement 5% dans les sociétés privées du secteur moderne. La grande majorité évolue dans le secteur informel, notamment «le petit commerce».

«Nous n’avons pas eu la chance d’aller à l’école pour devenir des fonctionnaires. Celles qui ont fréquenté (l’école) n’ont pas un bon niveau» a témoigné Alimatou Confé dans un français approximatif précisant que ce travail permet à ces femmes de prendre en charge leurs familles respectives.

Dans les faits au Burkina, plusieurs femmes sont, le plus souvent, dans l’obligation de nourrir leur famille et de prendre soin des enfants, à la fois sur les plans matériel et affectif, indépendamment de la contribution de leur époux.

«Sur 100 femmes qui font ce travail ici, celles qui ne s’occupent pas de leurs foyers ne dépassent pas 10. Elles ont en charge la scolarité de leurs enfants. D’autres sont veuves alors qu’elles ont des enfants à entretenir» a martelé Mme Confé.

Ces «voyageuses» sont le plus souvent rappelées à l’ordre par les forces de sécurité. Les règles élémentaires de la circulation sont «bafouées» par les conducteurs avec la complicité des passagers sur les axes routiers.

«Le problème que nous rencontrons avec ces camions de transport demeure la mixité (marchandises, personnes et animaux ensemble) et le surcharge» a regretté, un agent de police, qui reconnait néanmoins le «rôle social» de ces femmes.

«Un autre jour, on est allé payer la tomate, on a fait trois jours là-bas et on n’avait plus rien. Arrivés, le policier a dit de faire descendre la marchandise, on a demandé pardon en vain. Il nous a fait savoir que quand il est en tenue, il ne connaît plus personne, même pas ses parents. Il a récupéré les papiers du camion et on est parti» a relaté Zalissa Ouattara, 42 ans vendeuse de tomate.

Selon Mme Ouattara, à plusieurs reprises, elles ont été obligées de se «camoufler» à l’approche des postes de contrôle pour échapper aux sanctions des forces de l’ordre.

«Souvent quand on voit les gendarmes, on prend les bâches pour se couvrir, mais ils font tout pour nous dévoiler» a-telle ajouté.

Pays sahélien situé au cœur de l’Afrique de l’Ouest, sans débouché sur la mer, le Burkina Faso compte 52% de femmes, victimes dans leur grande majorité de la féminisation de la pauvreté.

Malgré de nombreuses avancées, les inégalités entre hommes et femmes demeurent notables et se manifestent dans tous les secteurs de la vie sociale, économique et politique.

NDT/TAA/AS/AB

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