Aujourd’hui jeudi 26 juin 2014 s’ouvre à Malabo, capitale de la Guinée équatoriale, le 23e Sommet des chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union africaine. Comme il est de coutume dans pareille rencontre, les 54 dirigeants du continent noir vont plancher, deux jours durant, autour d’un thème qui traduit l’urgence du moment.
Autour du président Teodoro Obiang Nguema Mbasogo, hôte du Sommet, les sommités africaines ont choisi de regarder cette laideur qui continue de pendre à leurs yeux, quelque cinquante ans après les indépendances tcha-tcha.
Nous voulons parler ici de la faim qui ne cesse de faire des victimes sur un continent où pourtant c’est la terre, l’eau et les bras valides qui manquent le moins.
« L’agriculture et la sécurité alimentaire ». C’est en effet le thème à l’ordre du jour dans la majestueuse salle de conférences sur les bords de l’océan Atlantique. Cette 23e Session se penchera également sur ce qu’il est convenu d’appeler « Agenda 2063 », feuille de route vers le développement global de l’Afrique pour les cinquante années à venir. Preuve que les princes qui nous gouvernent ont une vision, et même à très long terme, pour leurs sujets. Ne riez pas.
Mais une chose est de se fixer un cap, et une autre de se donner véritablement les moyens pour y arriver. Et c’est là l’une des limites de ces sommets-spectacles : une fois les lampions éteints, les recommandations et autres engagements sont passés sous l’éteignoir.
Cette rencontre de Malabo sonne comme un écho à la Déclaration de Maputo, signée il y a une décennie de cela. Du déjà entendu, comme qui dirait.
En effet, le 10 juillet 2013, dans la capitale mozambicaine, les chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union africaine s’étaient engagés à allouer au moins 10% de leur budget national à l'investissement agricole à l'horizon 2008. Mais dix ans plus tard, l’espoir suscité par cette résolution est retombé comme un soufflet. Le critère de convergence de Maputo reste toujours un lointain horizon pour bien des pays.
Sur les 54 Etats, seuls six ont respecté cet engagement : le Niger, la Guinée, le Sénégal, le Mali, le Ghana et le Burkina Faso, « pays qui a engagé proportionnellement le plus de fonds dans l'agriculture sur la durée et qui a atteint le seuil de 6% de croissance du PIB agricole entre 2001 et 2006 ».
Alors, Malabo ne doit pas finir comme Maputo. Les enseignements sur l’échec du premier doivent servir à garantir la réussite du deuxième. Autrement dit, aux discours doctement portés par les experts à la rhétorique des technocrates, aux engagements politiques pris par les chefs de l’Etat, aux promesses d’accompagnement tenus par les partenaires techniques et financiers, oui, à tous ces joyeux flonflons entonnés sous les dorures des salons feutrés doivent impérativement succédé les actions sur le terrain. C’est seulement à ce prix qu’on pourra espérer réduire la prévalence de la famine sur ce continent crève-la-faim que reste toujours l’Afrique.
Une Afrique, hélas, qui en plus de claquer du bec, convulse sous l’effet de bien d’autres maux, comme les guerres civiles. Si bien que ce 23e Sommet, au-delà du thème central, sera rattrapé par une actualité autrement plus préoccupante. Comme c’est le cas au Mali, et plus grave en République centrafricaine et en Libye.
Dans ces deux derniers Etats, du moins ce qui est considéré comme tel, malgré les efforts de la communauté internationale, le retour à une vie normale s’apparente à un véritable serpent de mer.
Au pays de Barthélémy Boganda comme dans celui de Kadhafi, l’Union africaine a plus brillé par ses engagements et ses appels inaudibles à la paix que par ses moyens d’action sur ces situations.