Combien de temps serons-nous encore témoins de cet interminable petit jeu de «je mobilise plus que toi», «je suis plus populaire que tu ne l’es» que nous livrent pouvoir et opposition ? Depuis que le président du Faso a jeté bas le masque le 12 décembre 2013, le lendemain de la fête nationale célébrée à Dori, annonçant sa volonté de recourir au peuple pour faire sauter la clause limitative du nombre de mandats présidentiels, la rue est devenue le théâtre d’une véritable bataille rangée entre pro et anti-référendum. Aux journées de protestation des partis affiliés au chef de file de l’opposition, comme la mémorable marche du 18 janvier 2014 à Ouagadougou, succèdent les marche-meetings de soutien de la majorité à l’initiative du chef de l’Etat. Sans compter les petites et grandes manifestations locales pour ou contre la levée du verrou constitutionnel.
Après cette phase pédestre, la guerre de l’article 37 est entrée, depuis, dans une nouvelle phase, avec la bataille des stades, où se joue un jeu d’un tout autre genre.
Le MPP, parti de dissidents du CDP, a réussi la prouesse de remplir le stade municipal de Ouagadougou le 6 avril 2014 à l’occasion de son premier congrès ? Le Front républicain, regroupement favorable à la réforme constitutionnelle, riposte six jours plus tard à Bobo-Dioulasso en faisant le plein du stade Wobi.
Mais il en faut plus à chaque camp pour tester sa capacité de mobilisation.
Et rebelote pour les partisans de la clause limitative du nombre du nombre de mandats, qui prennent d’assaut la cuvette du stade du 4-Août à ras bord ce 31 mai. Le 21 juin dernier, la «firme Blaise Compaoré» remet les pendules à l’heure et tient ainsi sa revanche dans ce qui est devenu à chacun son plein de stade.
Une émulation au cours de laquelle chacun des protagonistes utilise tous les moyens dont il dispose pour prendre le dessus sur son vis-à-vis. C’est de bonne guerre, tant que cette rivalité se joue dans le stricte cadre républicain, comme c’est le cas jusque-là.
Mais ça commence à être lassant et on se demande jusqu’à quand pouvoir et opposition vont s’ingénier à nous en mettre plein la vue avec le même cirque.
Chaque camp étant passé maître dans l’art d’occuper les esprits et les stades, on a pitié des Burkinabè qui vont devoir suivre un spectacle digne de Tom and Jerry, le célèbre court-métrage américain.
Franchement, cette espèce de course-poursuite commence à devenir ennuyeuse. C’est d’autant plus assommant qu’on y à affaire aux mêmes acteurs, à la même pantomime et surtout à la même rhétorique : « oui au référendum/non au référendum ; « c’est constitutionnel/c’est anticonstitutionnel » ; « on va remplir le stade recto-verso » et tutti quanti.
Avouons que tout ça, ça ne vole pas haut. On croirait entendre des garnements dans une cour de récréation.
Tant qu’à faire, il faut qu’on en finisse une bonne fois pour toutes. Et cela passe par l’officialisation de l’ « affaire » et advienne que pourra.
Le hic, c’est que Blaise Compaoré va nous laisser mariner dans notre jus pendant un bon bout de temps. C’est que c’est bientôt les vacances gouvernementales, et on voit mal Kosyam donner le signal à cette période. Cela est d’autant vrai que le chef de l’Etat, qui doit assister au Sommet Afrique/USA en début août, ne prendra pas le risque de se rendre à Washington souillé de tripatouillite. Il ne fera pas cette bravade à Barak Obama, celui-là même qui, dans son discours d’Accra en juillet 2009, déclarait : «L’histoire est du côté de ces courageux Africains et non dans le camp de ceux qui se servent de coup d’Etat ou qui modifient les Constitutions pour rester au pouvoir. L’Afrique n’a pas besoin d’hommes forts mais d’institutions fortes».
Sauf contrainte majeure d’agenda, l’annonce officielle du référendum ne sera pas faite avant septembre.
On va donc devoir barboter trois mois de plus dans ce long et épuisant faux suspense à l’issue incertaine mais aux répercussions économiques certaines tant les investisseurs sont eux aussi dans l’expectative.