Le Programme Afrique de lutte contre la traite et l’exploitation sexuelle des enfants (PACTES), initié par les organisations End child prostitution, Child pornography and trafficking of children for sexual purposes (ECPAT) en France et au Luxembourg ont mené une étude sur la prostitution des mineurs et leur mobilité dans trois pays d’Afrique de l’Ouest que sont le Burkina Faso, le Bénin et le Niger. La restitution des résultats de cette investigation est intervenue, les 23 et 24 juin 2014, à Ouagadougou, au cours d’un atelier.
Malanville et Djougou au Bénin, Niamey au Niger et Ouagadougou, au Burkina Faso, sont les quatre villes d’Afrique de l’Ouest dans lesquelles l’étude sur la prostitution des mineurs et ses liens avec la migration et la traite, a été menée. Initiée par les organisations End child prostitution, Child pornography and trafficking of children for sexual purposes France et Luxembourg (ECPAT/France, ECPAT/Luxembourg), cette étude a pour objectif principal de contribuer à une meilleure compréhension des liens qui existent entre la mobilité des enfants et leur situation de prostitution, afin de proposer des actions de lutte contre l’exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales dans chacun des trois pays. Ainsi, réunis en atelier les 23 et 24 juin 2014, à Ouagadougou, les acteurs de cette lutte ont décliné les résultats de leur enquête. Ce rapport indique qu’un échantillon de 243 mineurs en situation de prostitution, a été interrogé à Ouagadougou, 261 à Djougou et Malanville et 205 à Niamey. L’enquête a duré cinq jours dans chaque localité. Selon le consultant principal des études, Dr Charles Hounmenou, les enquêteurs ont travaillé sur la base de quatre types de questionnaires soumis à 12 structures. Ces structures étaient de 5 catégories, à savoir, les départements et les agences publics, les ONG et les associations, les forces de défense et de sécurité, les structures de santé publique et les intermédiaires intervenant dans la prostitution des mineurs. Cette étude a révélé qu’il y a eu des endroits où ‘’même’’ des enfants de 9 ans ont été enquêtés en situation de prostitution et qu’un seul garçon identifié à Ouagadougou, mais qui n’a été inclus dans le rapport, parce qu’il a refusé de répondre au questionnaire et 13 au Niger. Par ailleurs, toujours selon le rapport, les causes de cette prostitution qui touche plus la gent féminine sont entre autres, la déscolarisation, le chômage, l’éloignement de certaines mineures de leurs familles, ce qui renvoie à leur ‘’confiage’’ en situation d’aide-ménagère. « A l’issue des travaux de terrain, du traitement et de l’analyse des données, il est ressorti que la moyenne d’âge des mineurs en situation de prostitution enquêtés est de 16,5 ans. L’analyse des informations afférentes au statut de scolarisation des mineures a révélé que la moitié de l’effectif était déscolarisée. Malgré leur jeune âge, quatre mineures sur dix sont mères d’au moins un enfant, ce qui révèle une maternité très précoce de bon nombre de mineurs à Ouagadougou », a confié Dr. Hounmenou.
Bogodogo et Baskuy sont les plus touchés
à Ouagadougou
La prostitution, qu’elle implique des adultes ou des mineurs, est souvent vue comme le fait de personnes de nationalités étrangères ; les études du PACTES ont cependant démontré le contraire. Par exemple, les Béninoises sont les plus nombreuses de l’effectif total des mineures enquêtées à Djougou et Malanville, soit 77%, à Ouagadougou, les nationaux représentent 63% des mineurs en situation de prostitution et à Niamey, 93%. En plus, le rapport a révélé que la répartition spatiale des filles mineures en situation de prostitution montre qu’elles sont plus concentrées dans deux arrondissements à Ouagadougou. La plupart des enquêtés résident dans l’arrondissement de Bogodogo (trois sur dix) contre une mineure sur cinq à Baskuy. Leur forte présence dans ces arrondissements est selon le rapport, le reflet des points chauds de la ville de Ouagadougou. Parmi les raisons qui ont motivé ces mineures à arriver à Ouagadougou, le besoin de travail est le premier facteur. « Il transparaît de ces résultats que les motivations principales qui sous-tendent le changement de lieu de résidence de la plupart des mineures ne sont donc pas liées à la prostitution, mais elles sont victimes de cette pratique », a souligné le consultant principal des études. C’est pourquoi, au regard des différents résultats obtenus, des recommandations ont été faites à l’endroit de cinq catégories de cibles à savoir, les structures étatiques, les Organisations de la société civile (OSC), les familles et les autorités communautaires, les mineurs en situation de prostitution et les partenaires techniques et financiers. Parmi ces recommandations, les cinq suivantes, sont essentielles : la vulgarisation de la loi condamnant la prostitution des mineurs auprès de tous les acteurs, en veillant à qu’elle soit traduite en langues nationales. Aussi, il est ressorti qu’il faut accompagner les enfants victimes de violences sexuelles dans la prise en charge sanitaire et alléger le dispositif d’accès à l’obtention de certificats médicaux, document essentiel à la poursuite de l’action judiciaire, créer des structures d’accueil ou des réseaux de famille d’accueil. En plus, les OSC devront accentuer la sensibilisation des populations à l’importance de collaborer avec les acteurs-clés de la protection de l’enfance et accompagner l’Etat dans la réalisation de ses plans d’action en matière de lutte contre la prostitution. Le secrétaire général du Ministère de l’action sociale et de la solidarité nationale (MASSN), Adjima Mbangou, a trouvé le rapport intéressant. « J’invite ECPAT/France et ECPAT/Luxembourg et les autres partenaires techniques et financiers, à rester disponibles pour accompagner ces initiatives pour la construction d’un Burkina Faso et d’une Afrique digne », a exhorté M. Mbangou. Avant de poursuivre : « le gouvernement se sent interpellé par vos initiatives particulières pour la protection des mineurs en situation de prostitution et s’engage à vous soutenir ». Quant à la responsable du PACTES au Burkina Faso, Fatoumata Alfa Cissé, ce document est le premier du genre dans le domaine de la lutte contre la prostitution des mineurs et il se doit d’être un référentiel pour les gouvernements, les ONG et les structures d’aide au développement, afin de mieux cadrer leurs actions de développement.