La campagne électorale pour les élections couplées du 2 décembre prochain bat son plein.
Dans les quatre coins du Burkina, les meetings succèdent aux meetings pour les grands partis, sans oublier les campagnes de proximité auxquelles s’adonnent les autres formations politiques. Mais en eux-mêmes, ces grands rassemblements ne constituent pas une nouveauté puisque, depuis maintenant deux mois, dans une campagne avant la lettre, les partis politiques, toutes tendances confondues, ont, dans des proportions différentes, envahi le pays entier qui avec des inaugurations, qui avec des séances de formation. Par contre, la campagne présente un autre visage qui ne manque pas d’intérêt.
En effet, ces élections couplées sont les premières qui sont organisées avec la mise en œuvre de la loi sur le quota. Théoriquement, les listes en compétition devaient être composées d’au moins 30% de l’un ou l’autre sexe. Dans le contexte politique burkinabè, il s’agit de donner plus de chance aux femmes d’être présentes dans les instances de décision des conseils municipaux et du Parlement. Tout le monde s’accorde à dire que cette loi n’est que justice au regard de la proportion importante des femmes (plus de 52%) au sein de la population burkinabè. C’est donc une discrimination positive que prône le texte.
Le coup de pouce est largement justifié, sauf qu’il ne s’agit que de grands principes théoriques.
La réalité semble bien loin de ces belles intentions. La grande majorité des partis politiques a largement violé l’esprit de la loi lors de la confection des listes électorales. Dans le meilleur des cas, les femmes présentes sur les listes sont reléguées dans des positions où elles n’ont aucune chance d’être élues. Dans le pire des cas, elles en ont été exclues. Si, malgré tout, les femmes ont toujours le cœur à l’ouvrage pour être un bétail électoral, il ne reste plus qu’à paraphraser le président Sankara pour dire que si les femmes ne sont pas capables d’assumer leur révolte, elles ne méritent pas qu’on s’apitoie sur leur sort.
Or, cette année encore, comme pendant les autres campagnes électorales, ce sont les femmes qui ont en charge de “chauffer le coin” avec les djandjoba et autres activités de réjouissance. Pour tout dire, elles acceptent le fait accompli. Or, les actions pour se faire entendre ne manquent pas. L’autre moitié du ciel peut effectivement utiliser les tribunes qu’offrent les meetings pour défendre sa noble cause. Une sorte de vote sanction aiderait considérablement les femmes à retrouver la place que leur donne la loi. Si les responsables des formations politiques n’ont pas eu d’état d’âme en refusant l’application du quota, les femmes ne devraient pas en avoir non plus en orientant leurs votes vers les partis qui ont fait confiance à la gent féminine. En tout état de cause, il n’y a que les résultats des urnes pour sortir les hommes politiques de leur immobilisme. En cas de bons scores, les partis finiront par se convaincre qu’avec ou sans les femmes sur leurs listes électorales leur victoire est assurée. C’est dire que les femmes, dans leur ensemble, jouent leur avenir politique. Vont-elles se laisser malmener ou vont-elles saisir l’occasion de la campagne pour donner un signal fort aux partis politiques?
Si elles manœuvrent mal, elles assureront un enterrement de première classe à la loi sur le quota. Les femmes seront alors définitivement condamnées à faire les djandjoba, à préparer les plats de riz gras bien huilés pendant la campagne et à subir la politique des hommes pour les cinq prochaines années. Il en sera ainsi de tous les rendez-vous électoraux jusqu’au jour où, enfin, elles attacheront leur pagne. Solidement.