L’enseignement arabe a toujours été le parent pauvre du système éducatif au Burkina. La filière arabophone offre peu de possibilités d’insertion au marché de l’emploi aux élèves et étudiants diplômés. Cet ostracisme, même s’il est en partie lié aux promoteurs des écoles et aux associations musulmanes, a créé un repli sur soi de bien des acteurs de cette forme d’éducation qui concerne pourtant des milliers d’enfants. L’Etat burkinabè a-t-il enfin compris le danger à laisser sur le bas-côté de la route une frange aussi importante de sa jeunesse ? En tout cas, une nouvelle dynamique visant à une meilleure reconnaissance de l’enseignement franco-arabe semble être enclenchée avec la signature d’une convention entre l’Etat et la Fédération des associations islamiques du Burkina (FAIB). Les autorités burkinabè ont décidé de faire en sorte que les écoles franco-arabes et médersas soient mieux intégrées dans le système éducatif national, avec ce que cela a de valorisant pour non seulement la formation, mais aussi les diplômes. Les autorités doivent donc prendre à bras le corps le problème et le régler définitivement car il s’agit de milliers d’enfants burkinabè qui doivent se sentir burkinabè de par leur formation et leur aptitude à s’insérer dans le marché du travail. Avec cette réforme, ils ne devraient plus se sentir exclus du système éducatif formel et du marché de l’emploi.
C’est un aboutissement heureux à saluer, même s’il faut reconnatîre que la signature de cette convention a pris trop de temps. Il vaut mieux tard que jamais, dit-on, et il faut désormais se mettre au travail pour que dans les plus brefs délais, la réforme préconisée par la convention entre en vigueur. On pourrait en effet penser qu’il a fallu l’appui financier de la Banque islamique de développement (BID) pour que l’Etat se penche enfin sérieusement sur la problématique de l’enseignement arabe au Burkina. Une fois de plus, certains diront que c’est l’odeur de l’argent qui guide nos dirigeants dans la mise en place de leurs politiques nationales. Un dossier aussi sensible que celui des écoles franco-arabes ne devait en effet pas trainer autant. Mais le Burkina semble trop souvent s’en remettre aux bailleurs de fonds pour décider de ce qui est bon pour lui. Il faut savoir en effet que dans cette affaire, 15 milliards de FCFA sont en jeu. Ce ne doit pas être de l’argent jeté par la fenêtre du fait des détournements et de la corruption. On a malheureusement vu, de par le passé, le secteur de l’éducation éclaboussé par des scandales financiers. Certains y ont vu une manne pour se remplir les poches plutôt qu’à l’éducation. L’Etat, dans le dossier des médersas, a injecté 400 millions de FCFA, ce qui lui donne un droit de regard sur l’ensemble des ressources. En tout état de cause, la gestion doit être la plus transparente possible pour éviter les errements du passé. Chaque sou doit effectivement alimenter la réforme afin que dans un horizon proche, l’on ne parle plus des médersas comme des écoles de seconde zone.
La responsabilité des responsables des associations islamiques et des fondateurs d’écoles franco-arabes est aussi beaucoup engagée dans cette transition. Etant les premiers bénéficiaires de la transition pédagogique en cours, ils sont appelés à faire preuve d’un grand sacrifice. Très souvent, l’argent a divisé le monde associatif au Burkina. La FAIB, composée de plusieurs courants islamiques, doit éviter de tomber dans ce piège. Avec des personnalités aussi respectables que Cheick Aboubacar Doukouré à sa tête, on ose espérer que seul l’intérêt des enfants prévaudra. Très bien introduit dans les organisations islamiques internationales et dans le monde arabe, cet intellectuel de haut vol est une chance pour la réussite de la réforme des écoles franco-arabes et des médersas au Burkina. On le voit mal accepter les compromissions et les comportements de gangsters qui pourraient nuire à sa réputation .