Le Burkina Faso est présent sur tous les fronts internationaux. Ces derniers temps, il ne lésine pas sur les moyens pour participer à des forums, conférences et autres journées organisés à travers le monde. Rien que pour ce mois de juin, il était à Paris, Montréal et maintenant à Rabat. Le 5 juin, c’était le ministre de l’Economie et des Finances qui défendait le pays devant les hommes d’affaires français. Puis, le Premier ministre a traversé les océans pour se rendre à Montréal où le Burkina a plaidé auprès de milliers de chefs d’entreprises et de personnalités politiques. Enfin, le chef de l’Etat, en personne, a pris son bâton de pèlerin, avec pour destination Rabat et le Forum de Crans Montana. Toutes ces rencontres ont la particularité d’avoir un contenu économique et d’accueillir pour la première fois le Burkina. Partout, il a été question d’économie. Mais pourquoi ce quasi-pèlerinage dans les temples de l’économie et des finances mondiaux ? Ces participations sont-elles à vocation uniquement économiques ou ont-elles aussi des relents politiques ? Sans doute les deux. En effet, on ne peut parler d’attractivité d’un pays pour les investissements sans climat des affaires. Outre des textes législatifs favorables, l’investisseur veut surtout s’assurer que le pays est dans la paix et la stabilité. En somme, un pays sans problème. Comme on le dit, l’argent a peur du bruit. C’est dire qu’en plus d’attirer le maximum d’entreprises au Burkina, le gouvernement cherche aussi à rassurer le monde des affaires, contexte sociopolitique marqué par la controverse sur l’article 37 oblige. Qu’il le veuille ou non, le gouvernement burkinabè doit se rendre à l’évidence que la situation délétère qui prévaut dans le pays suscite des interrogations. Ceux qui y ont déjà investi, comme ceux qui attendent de le faire, veulent avoir des gages quant à la stabilité du pays en cette période assez délicate de son histoire. Ainsi, on a vu le Canada accélérer la signature d’un accord de protection et de promotion des investissements avec le Burkina. Les autorités burkinabè disent à qui veut les entendre que cet accord est une marque de confiance entre les deux pays. Soit. Mais, il peut aussi être interprété comme le signe de l’inquiétude des entrepreneurs canadiens face à la conjoncture sociopolitique au Burkina. Ils ne veulent pas voir leurs énormes investissements miniers au Burkina passer par pertes et profits en cas de crise plus grave. Une société minière comme Essakane SA a injecté des milliards au Burkina et entend non seulement les préserver, mais aussi avoir un retour sur investissement. L’accord vise donc d’abord à protéger cette entreprise canadienne et toutes les autres installées au Burkina. Dans son volet « protection », on peut dire que cet accord est à sens unique, étant donné que le « pays des hommes intègres », à ce que l’on sache, n’a aucun investissement à protéger au Canada. Et même si c’était le cas, il n’aurait rien à craindre, vu que le Canada est un pays démocratique, avec une justice indépendante. Il ne viendrait à l’idée d’aucun aventurier de perpétrer un coup d’Etat, de spolier les biens d’autrui ou pire, de nationaliser des investissements privés. Toutes choses qui sont encore possibles dans des pays comme le Burkina. Voilà pourquoi le Burkina doit rassurer non seulement ses partenaires traditionnels que sont les pays qui lui viennent en aide et les bailleurs de fonds, mais aussi et surtout les investisseurs privés. L’initiative du gouvernement de faire le tour du monde pour attirer des investisseurs est donc louable. Car chaque sou qui rentre dans le pays, s’il est bien géré et bien réparti, est profitable à l’ensemble de la nation. Mais il y a lieu de se demander si ces opérations internationales de lobbying peuvent, à elles seules, donner une image positive du Burkina et attirer les possédants du monde. Il y a aussi une méthode nettement moins coûteuse, que d’autres pays appliquent avec bonheur : faire vivre réellement la démocratie, l’Etat de droit et la bonne gouvernance.