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L`Observateur Paalga N° 8639 du 11/6/2014

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23 ans de la Constitution : « Blaise veut se donner les moyens d’une présidence à vie » (Afrikamba)
Publié le jeudi 12 juin 2014   |  L`Observateur Paalga


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© Présidence par A.O
20 ans des Engagements nationaux : le secrétaire permanent au rapport chez le Président du Faso
Lundi 2 juin 2014. Ouagadougou. Salle polyvalente de la Présidence du Faso. Le staff du secrétariat permanent des Engagements nationaux est allé faire le bilan des 20 ans de cet ensemble de projets au Président du Faso, Blaise Compaoré


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Vingt-trois ans après la promulgation de la Constitution, Afrikamba, dans la déclaration ci-après, fait état des différentes modifications qu’a subies cette Constitution à ce jour. Il appelle ensuite à la vigilance du peuple pour qu’elle n’en subisse pas davantage, vu que le président du Faso a déjà fait 27 ans au pouvoir.

11 Juin 1991 - 11 Juin 2014 : cela fait 23 ans que la Constitution instaurant la quatrième République a été promulguée par le Kiti An VIII-330/FP/Press, et ce, au terme d'un référendum ayant obtenu plus de 93% de OUI. L'adoption de la Constitution s'inscrivait dans le contexte des luttes des peuples africains pour la démocratie. Mais son écriture consensuelle et sa très large approbation traduisaient bien la volonté du peuple burkinabè de rompre avec les États d'exception et leurs lots de violence.

Notre peuple voulait ouvrir une nouvelle ère de gouvernance apaisée, inclusive et reposant sur des valeurs et pratiques démocratiques telles que : le multipartisme intégral, la séparation des pouvoirs, le suffrage universel comme seul mode de prise du pouvoir au plan national et local, le caractère républicain et laïc de l'État, la limitation du nombre des mandats présidentiels successifs à deux, le respect et la garantie des droits humains et des libertés fondamentales, le respect de la liberté de presse. De là sont nés de gros espoirs d'une nouvelle façon de faire la politique par l'expression libre, pacifique et codifiée des différents courants et formations politiques.

En effet, on pouvait y voir l’espoir d’une vie politique apaisée. Cette avancée qui s’est faite probablement contre le gré de ceux qui détenaient le pouvoir politique a été de courte durée. En effet, quelques mois après l’adoption de cette Constitution et une semaine après l’élection de Blaise COMPAORE (avec une abstention de 72.7% !), Oumarou Clément OUEDRAOGO sera assassiné au centre de Ouagadougou (09/12/91) ; d’autres responsables politiques seront victimes d’attentats dans la même période. La vie politique ne s’est pas apaisée et c’est donc le plus naturellement du monde que six ans seulement après son adoption et à la veille de la deuxième élection présidentielle sous la quatrième république, la constitution du 2 Juin 1991 sera modifiée par voie parlementaire : il n'y a plus de limitation du nombre de mandats aux termes de la loi 002/97/ADP/ du 27 Janvier 1997. Ce sera le premier acte de charcutage d’une liste de sept (07) charcutages constitutionnels sur une période de quinze (15) ans ; le dernier date du 12 novembre 2013 et avait pour but de permettre à l’Assemblée nationale de continuer à légiférer en attendant la mise en place du Sénat.
Tous ces charcutages font suite à des contextes politiques précis et la plupart du temps mettant en jeu directement ou indirectement les intérêts politiques et/ou économiques des femmes et des hommes qui gèrent le pouvoir depuis le 15 Octobre 1987 avec à leur tête le président Blaise COMPAORE.

Suite à la crise socio-politique née du lâche et barbare assassinat du journaliste Norbert Zongo, le Président Compaoré a eu recours aux services du "Collège de sages" afin qu'il lui propose des solutions de sortie de crise. Dans le même temps, le Collectif des Organisations de Masse et des Partis politiques (COMPP) exerçait une forte pression pour exiger la justice pour Norbert Zongo ainsi qu'un jeu politique plus démocratique. C'est dans ce climat très troublé que le "Collège de Sages" fera au Président Compaoré de nombreuses propositions dont celle du retour à la limitation à deux, du nombre des mandats présidentiels successifs, conformément au Consensus sur cette importante question, longtemps débattue par les Constituants originels. Ainsi fut rétabli l'article 37 dans sa version originelle, et limitative le 11 Avril 2000 par la loi 003-2000/AN. D'autres révisions constitutionnels se feront par voie parlementaire dont les plus significatives concernent: l'abandon du septennat au profit d'un quinquennat sans conséquence rétroactive pour le Président Compaoré qui a pu ainsi se présenter à la présidentielle de 2005 dans une atmosphère de contestation juridique et politique; l'introduction d'un Sénat comme deuxième Chambre du Parlement; le transfert des prérogatives du Sénat à l'Assemblée Nationale suite à la fronde de l'opposition politique et civile ayant empêché l'installation dudit Sénat; la reconnaissance, dans la Constitution, de la Chefferie traditionnelle comme autorité morale, etc.

À la veille de l'achèvement de son dernier mandat constitutionnel, le Président Compaoré veut réviser la Constitution en son article 37 pour sauter le verrou limitatif et pouvoir se présenter à l'élection de novembre 2015, après 27 ans de pouvoir ! Il veut ainsi se donner les moyens constitutionnels d'une présidence à vie, s'inscrivant ainsi dans la tendance actuelle de nombreux Présidents africains, essentiellement francophones. Cette fois-ci, n'étant pas assuré de recueillir la majorité parlementaire qualifiée de voix nécessaires, le Président Compaoré veut utiliser la voie référendaire. Mais cette nouvelle tentative se heurte à une opposition politique et citoyenne unie, déterminée et bien organisée si bien qu’aujourd’hui règne comme un climat d'avant affrontements violents.

Au regard de la situation ci-dessus décrite, nous nous permettons d’attirer l’attention de notre peuple sur l’enjeu principal de la situation actuelle.

L'enjeu principal ici, c'est le devenir même du processus politique consensuel enclenché par l’adoption de la Constitution du 2 Juin 1991. En effet, si un référendum venait à légaliser la volonté du Président Compaoré, ce serait la voie ouverte à un pouvoir à vie, un renforcement de l'autocratie et de la patrimonialisation du pouvoir. Bref, ce serait une régression négative et dangereuse, une récupération de type monarchique du processus enclenché le 2 Juin 1991.

- Par contre, si les partisans de la non-révision l'emportaient, alors la voie serait ouverte pour le renforcement du processus démocratique car permettant, à partir de 2015, d'ouvrir les champs politique et économique depuis longtemps verrouillés et accaparés par le Président et ses partisans d’hier et d’aujourd’hui. L'ouverture de ces nouveaux horizons pourrait bien pacifier la vie sociale comme l’a voulu notre peuple en votant sa Constitution et constituer un pas de plus dans sa quête d’indépendance véritable.

Tout en étant conscient de ses limites objectives actuelles et futures, Afrikamba qui se veut être un mouvement citoyen, qui prône une transformation de la société dans une perspective panafricaniste, et qui se veut être également une force de propositions alternatives sur les questions de développement, se donnera les moyens d’apporter sa contribution sur la base de son orientation panafricaniste et progressiste à l’édification d’un Burkina nouveau ouvert au progrès social, à la démocratie véritable et ouvert également à une Afrique unie des peuples.

A l'occasion de cet anniversaire, Afrikamba,

- soutient fermement les luttes en cours mais appelle le peuple burkinabè à la vigilance pour que des opportunistes et autres situationnistes ne récupèrent ou ne trahissent ces justes luttes dans lesquelles les jeunes constituent les gros des troupes et les fers de lance ;

- recommande une relecture, après 2015, de notre loi fondamentale pour lui donner un contenu plus stable, démocratique et progressiste en :

renforçant la protection sociale et les libertés démocratiques ;
sanctuarisant l'article 37 dans son caractère actuellement limitatif ;
reconnaissant, comme à l'élection présidentielle, les candidatures indépendantes pour les autres scrutins ;
renforçant l'autonomie des pouvoirs législatifs et judiciaires ainsi que l'indépendance de la CENI ;
réglementant les coûts des institutions républicaines au regard du niveau de vie de l'ensemble des citoyens.

Non à la tentative de tripatouillage de la Constitution pour détourner notre processus démocratique !

Vive la jeunesse en lutte

Fait à Ouagadougou, le 11 juin 2014
Le Bureau exécutif d’Afrikamba

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