Le 19 mai 1990, l’étudiant Dabo Boukary disparaissait dans des circonstances qui ont fait présumer un assassinat. 24 ans après, les étudiants affichent une inlassable détermination à ce que la lumière soit faite sur l’affaire. Pour préserver la mémoire de leur camarade disparu et pour toujours maintenir la flamme de la quête de vérité, chaque 19 mai est dédié à Dabo Boukary. Cette année encore, plusieurs activités dont une grève de 24 h sont prévues. A 4 jours de l’événement, la section Ouagadougou de l’Association nationale des étudiants du Burkina (ANEB) sonne l’appel à la mobilisation à travers cette déclaration dans laquelle elle revient sur les circonstances de la disparition de l’étudiant Dabo Boukary.
Camarades étudiantes et étudiants,
Le 19 mai 2014, nous commémorons le 24e anniversaire de l’assassinat de notre camarade DABO Boukary. En rappel, le camarade DABO Boukary était étudiant en 7e année de médecine à l’Université de Ouagadougou. Il a été arrêté, torturé à mort le 19 mai 1990 dans les locaux du tristement célèbre Conseil de l’Entente, actuel bastillon du fameux Régiment de Sécurité Présidentiel (RSP) du Capitaine Blaise COMPAORE. En mai 1990, notre pays était sous le Régime militaro-fasciste du Front Populaire dirigé par le Capitaine Blaise COMPAORE.
Les Comités Révolutionnaires (CR), structures impopulaires et appendices du pouvoir, qui ont remplacés les CDR sous le CNR, avaient entrepris de confisquer les libertés démocratiques sur le campus. Toute organisation indépendante vis-à-vis du pouvoir voyait ses activités interdites sur le campus en complicité avec les autorités universitaires de l’époque. L’université traversait une crise aigüe avec une dégradation vertigineuse des conditions de vie et d’étude des étudiants du fait des premières mesures des Programmes d’Ajustement Structurel (PAS) avec ses corolaires de système d’examen ultra sélectif et d’échecs massifs pour les étudiants. A, l’Institut des Sciences de la Nature/ Institut de Développement Rural (ISN/IDR), actuelle Unité de Formation et de Recherche en Sciences de la Vie et de la Terre (UFR/SVT), les taux moyens annuels de succès étaient de l’ordre de 8,33% pour la première année de Chimie-Biochimie-Biologie-Géologie(CBBG). C’est ainsi que sur invitation de leur corporation, les étudiants de l’ISN/IDR se retrouveront en Assemblée Générale (AG) le 03 mai 1990 pour discuter de leurs conditions d’étude.
Cette AG fut un succès total malgré les manœuvres de l’administration pour empêcher sa tenue. Cela a valu le courroux du Directeur de l’ISN/IDR, à l’époque le Pr Alfred S TRAORE actuellement député CDP à l’Assemblée Nationale, qui multiplia mensonges, et provocations à l’endroit de la corporation dans l’élan belliciste qui lui est propre. En l’absence de solutions concrètes proposées par l’administration, une autre AG de la corporation sera tenue le 15 mai 1990. Le sieur Alfred S TRAORE, fidèle a sa logique belliqueuse, accusa la corporation d’agression d’enseignant, de perturbation de cours et d’occupation illégale de salle etc. Le même soir une vaste campagne mensongère sera orchestre à la télévision et à la radio nationales par BAMBA Mamadou (alors délégué des CR), Nindawa Alain SAWADOGO (à l’époque recteur de l’UO) et Mouhoussine NACRO (à l’époque ministre des enseignements Secondaires, Supérieur et de la Recherche Scientifique).
Cette campagne sera couronnée par l’exclusion de dix (10) étudiants dont huit responsables de l’ANEB et deux (02) militants de base. Déterminés à défendre leur cadre authentique de lutte, les étudiants réagiront promptement dès le 16 mai 1990 par une marche de protestation en direction du Rectorat (actuelle présidence de l’UO). Exaspéré par cette mobilisation inédite, le Front Populaire déclencha sa machine répressive dirigée par son homme de main de triste renom, Salif DIALLO (alors conseiller à la présidence du Faso) aidé par le Recteur lui-même Nindawa Alain SAWADOGO (en treillis militaire, pistolet au poing) et les CR dont les figures de proue étaient : BAMBA Mamadou, BANCE Soumaila, TAO Yandekoye, HIEN Lin etc. Il s’en suit une avalanche de course-poursuites, bastonnades à sang, perquisitions illégales dans les domiciles, arrestations et détentions dans des camps militaires, véritables centres de torture. Certains étudiants ont vu leurs bourses coupées pour 5 mois, d’autres exclus de l’UO ou enrôlés de force dans l’arme. C’est dans un tel contexte de répression barbare et féroce que notre camarade DABO Boukary sera enlevé le 19 mai 1990 conduit dans les locaux du conseil de l’entente et torturé à mort.
Camarades étudiantes et étudiants,
24 ans après ce crime odieux, les commanditaires, les complices et les assassins de DABO jouissent gracieusement de l’impunité érigée en mode de gouvernement par le pouvoir de la IVe République du Capitaine Blaise COMPAORE. Pour preuve d’autres crimes de sang perpétrés après celui de DABO sont restés sans suite comme ceux de : Emile ZIGANI et Blaise SIDIANI en 1995 à Garango, Flavien NEBIE en 2000 à Boussé, Assad Aboubacar OUEDRAOGO, Michel BOUDA, Ahmed ZOUGBA et Wendkouni KISSOU en 2011 dans le Centre-Ouest.
Camarades, la lutte du peuple burkinabè et de sa jeunesse en général et en particulier sa jeunesse estudiantine et scolaire pour la vérité et la justice n’est pas vaine. Elle a permis de juger l’affaire Justin ZONGO en 2011. Mieux certains acteurs qui ont une responsabilité indéniable dans l’affaire DABO cherche ouvertement à se disculper par des sorties médiatique malheureuses. Personne n’est dupe, les criminels et autres ennemis de notre peuple doivent répondre de leur forfaiture tôt ou tard. Il nous faut donc poursuivre avec persévérance et détermination la lutte contre l’impunité aux côtés de notre peuple.
C’est pourquoi en ce 24e anniversaire de l’assassinat de notre camarade DABO Boukary, l’ANEB : exige des autorités de la 4e République la vérité et la justice pour DABO Boukary, l’arrestation, le jugement et le châtiment des auteurs, commanditaires et complices de ce crime crapuleux, et des autres crimes perpétrés ; appelle l’ensemble des étudiants à rester toujours mobiliser dans la lutte contre l’impunité tout en renforçant le camp du peuple pour l’avènement d’un Etat de droit véritable.
Par ailleurs l’ANEB appelle les étudiants à participer massivement aux activités commémoratives qu’elle organise le 19 mai 2014 :
- Grève générale de 24H
- Meeting sur le terrain DABO Boukary à partir de 7H30 ;
- Exposition photos, prestation théâtrale et de la chorale sous le hall des Amphis A600 et C à partir de 9H
- Finale du tournoi DABO Bourary et prestation d’art martial sur le terrain DABO Boukary de l’UO à partir de 15H
Mobilisons-nous pour le succès de la journée de l’Etudiant Burkinabè!
Vérité et justice pour DABO Boukary et toutes les victimes des crimes de sang !
Pain et Liberté pour le Peuple !
Union général des étudiants Burkinabè (UGEB)
Association nationale des étudiants Burkinabè (ANEB)
Section de Ouagadougou