Inattendu, inespéré, l’accord signé ce vendredi 9 mai à Addis-Abeba, une première entre les frères ennemis à couteaux tirés depuis décembre 2013, n’aura tenu aucune de ses promesses, au grand désespoir des populations du Soudan du Sud, prises dans l’étau d’un conflit qui a déjà fait des milliers de morts et des millions de déplacés.
Véritable rayon de soleil dans une tempête de violences ethniques, voire même de génocide, l’accord d’Addis-Abeba aura eu une existence éphémère, c’est le moins qu’on puisse dire ; car l’encre sur les documents n’avait pas encore séché que de nouveau les canons résonnaient sur les plaines de Bor et de Bentiu.
La faute au camp gouvernemental du président Salva Kiir, selon les rebelles menés par son ex-vice-président devenu par la force des choses son ennemi juré, Riek Machar.
Pourtant les deux hommes, après maintes négociations et sous des pressions internationales de plus en plus appuyées, avaient enfin consenti à se rencontrer dans la capitale éthiopienne.
Une avancée d’autant plus notable qu’elle avait permis aux belligérants de signer un document dans lequel ils s’engageaient à cesser les hostilités dans un délai de 24 heures pour ensuite s’atteler à la formation d’un gouvernement de transition dans l’attente de prochaines élections. Sur le plan humanitaire, le défunt accord prévoyait l’ouverture de corridors ainsi que la coopération avec les ONG et les Nations unies sur le terrain.
Sans doute trop beau pour être vrai ou du moins pour quitter le stade des vœux pieux, le traité d’Addis-Abeba est la preuve que sans un minimum de volonté politique de part et d’autre, un accord ne vaut rien. Déjà, dès sa signature, ce parchemin-là était sujet à caution, car pour beaucoup la bonne nouvelle venue d’Ethiopie ne pourrait pas effacer les stigmates et encore moins guerrir les nombreuses maladies infantiles du plus jeune Etat du monde.
Ainsi, Smaïl Guergui, commissaire à la paix et à la sécurité de l’Union africaine, affirmait alors que «même avec cette signature, et vu la crise actuelle, le rétablissement de la paix, de la sécurité, de la stabilité et du développement au Soudan du Sud ne sera pas facile».
Le diplomate ne croyait pas si bien dire, vu ce qui est advenu depuis lors. Le conflit reprend de plus belle tandis que les espoirs de paix s’amenuisent dans une nation inachevée où les haines tribales tenaces sont sans cesse alimentées par la libre circulation des armes.
Comme quoi l’unité ethnoreligieuse qui était censée constituer le socle de ce jeune Etat n’aura jamais été qu’une panacée, car on ne le redira jamais assez, l’érection d’une nation se fait et se fera toujours sur la base d’un bon vouloir «vivre ensemble».