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Le Quotidien N° 1057 du 8/5/2014

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Avion présidentiel malien : IBK à l’épreuve du pouvoir
Publié le vendredi 9 mai 2014   |  Le Quotidien


Le
© Autre presse par DR
Le nouveau président malien Ibrahim Boubacar Keïta (IBK)


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Ainsi donc le Mali peut s’offrir un avion présidentiel de 20 milliards de FCFA ! Ce pays sauvé in extremis des djihadistes par la France, soutenu à bouts de bras par la communauté internationale et miné par une crise humanitaire sans précédent a donc les moyens de s’offrir un tel luxe. Au sortir d’une élection présidentielle censée relancer le pays sur les rails du développement, les priorités sont telles qu’on n’imaginait pas le président faire de l’acquisition d’un jet une urgence. Et pourtant, c’est le curieux choix fait par Ibrahim Boubakar Kéita. Pire, les procédures d’acquisition de l’appareil se seraient faites dans la plus totale opacité. Les Maliens pourront difficilement comprendre cette décision de leur nouveau président, qui jurait d’en finir avec la gabegie du passé. Surtout pas les milliers d’exilés, de déplacés et autres victimes de la guerre. D’ailleurs, pendant que IBK se fait plaisir, un soldat français est tué dans le Nord, fauché par des balles de djihadistes toujours très actifs. Sous d’autres cieux, une telle dépense de prestige serait considérée comme un vrai scandale. Au Malawi en tout cas, pays à la situation nettement plus enviable que le Mali, le président a eu maille à partir avec sa population et ses bailleurs de fonds, pour avoir commis un acte de même nature. Pour avoir acheté à 15 millions de dollars un avion, le président Bingu Wa Mutharika, décédé depuis lors, avait vu la Grande-Bretagne, ancienne puissance coloniale et premier bailleur de fonds du Malawi, réduire de 3 millions de livres son aide. Son successeur, Joyce Banda, qui a retenu la leçon, a vite fait de revendre le coucou, par mesure d’économie. Comme quoi, en matière de dépenses de prestige, chaque pays doit vivre selon ses moyens. C’est pourquoi, on continue à se demander comment le président d’un pays sortant à peine d’une guerre, exsangue et sous perfusion, se permet des dépenses aussi somptuaires ? Certes, on rétorquera toujours par la même antienne entendue sous d’autres cieux : l’avion présidentiel est un outil de souveraineté, il appartient à l’Etat et survivra au chef de l’Etat, il permet d’accomplir des missions importantes pour le Mali, etc. Mais on a l’impression qu’il s’agit plus d’un instrument de gloire personnelle que d’un outil pratique de déplacement. En Afrique, un dirigeant sans avion personnel se voit comme un roi nu, sans aucune respectabilité aux yeux de son peuple et des autres chefs d’Etat. IBK est malheureusement tombé dans le même piège des dépenses fastueuses. Son slogan de campagne, « Le Mali d’abord », est en passe de devenir « Moi d’abord ».
Le cas IBK est emblématique de la métamorphose des opposants, une fois aux affaires. A l’épreuve du pouvoir, bien des anciens opposants se laissent aller à des dérives graves. Ils oublient tous les reproches qu’ils faisaient à leurs prédécesseurs, pour se lancer dans des dépenses folles. Gbagbo et Wade ont ainsi géré leurs pays comme des biens personnels. Leurs chutes n’en furent que plus brutales. Les nouveaux venus, comme IBK devraient se le rappeler, en appliquant véritablement leur credo d’opposants : servir le peuple et non se servir. Le président malien a donc le lourd devoir de ne pas décevoir ses populations. Dans l’immédiat, il a l’obligation de prouver que le jet à 20 milliards de FCFA en valait vraiment la peine. Ce sera la condition d’une plus grande confiance entre lui et son peuple, gage de la réussite de son mandat. La page de cette polémique doit en effet vite tournée, non sans des explications claires aux Maliens, pour attaquer les innombrables chantiers auxquels le pays fait face. Cela va de la réconciliation nationale à la consolidation de la démocratie, en passant par la reconstruction des infrastructures et la relance économique. IBK doit donc éviter, autant que possible, les faux pas, s’il veut arriver à bon port .

La Rédaction

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