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Sidwaya N° 7658 du 6/5/2014

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Hamidou Traoré, Directeur Adjoint chargé des programmes de l’INERA : « Les semences améliorées contribuent entre 15-40% au rendement agricole »
Publié le mardi 6 mai 2014   |  Sidwaya




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Dans le domaine de la recherche, la promotion des semences améliorées est une priorité du gouvernement burkinabè. A travers cette interview accordée à Sidwaya, le directeur adjoint chargé des programmes de l’Institut de l’environnement et de la recherche agricole (INERA), maître de recherche en malherbologie, Hamidou Traoré, dévoile les enjeux de la production semencière pour le développement du secteur agricole du pays.

Sidwaya (S.) : Quelle est votre politique en matière de production semencière au Burkina Faso ?

Hamidou Traoré (H.T.) : La politique de l’INERA, c’est de pouvoir répondre aux besoins du pays en termes de semences de pré-base et de base, puisqu’il y a une loi sur les semences. Cette loi a bien clarifié les choses. Notre politique c’est que le pays soit autosuffisant, que nous puissions répondre à toutes les demandes formulées en matière de semences de base.

S. : De façon générale, quelles sont les missions assignées à l’INERA ?

H.T. : Les missions de l’INERA se déroulent comme tout service public. Nous sommes une institution de l’Etat qui est sous la tutelle du Centre national de la recherche scientifique et technologique (CNRST) qui, lui-même, relève du ministère de la Recherche scientifique et de l’Innovation. Donc l’INERA a pour mission de servir de cadre de programmation et d’exécution des programmes de recherche dans les domaines agricole et environnemental. L’INERA a également pour tâche de fournir aux chercheurs l’encadrement et l’appui nécessaires à leurs travaux. L’INERA a pour responsabilité également de contribuer à l’information et à la formation des chercheurs, du personnel d’appui et des étudiants, des producteurs. Aussi, il s’agit pour nous de valoriser les résultats de recherches et des semences, de créer des unités de production qui pourront valoriser les résultats de recherches. On peut produire et commercialiser les produits de la recherche, la loi nous autorise cela. Le statut d’établissement public à caractère scientifique et technique du CNRST donne cette prérogative à l’INERA. Nous avons pour mission de décentraliser la recherche parce que l’INERA est subdivisé en cinq directions régionales de recherche environnementale et agricole, en plus du centre de recherche environnementale et agricole de formation de Kamboinsin. Une de nos missions est de rapprocher davantage la recherche des utilisateurs des résultats de la recherche.

S. : Actuellement, peut-on dire que les semences améliorées ont un impact sur la production agricole ?

H.T. : Concernant une culture comme le maïs, la plupart des variétés qui sont aujourd’hui cultivées, vulgarisées, ont été créées et améliorées par la recherche. Egalement, nous avions eu à mettre en œuvre une expérience dans la Sissili, à Léo, où nous avons mis en place la plate-forme d’innovation multi-acteurs, c’est-à-dire que là-bas, les producteurs organisés dans une association, nous ont approchés pour nous dire qu’ils avaient des contraintes en termes de semences de maïs, et les rendements au niveau de cette zone étaient d’une tonne, au maximum deux tonnes/hectare. Nous sommes venus dans cette province et avons travaillé trois années durant avec les producteurs pour leur faire savoir que nous avons des variétés améliorées comme « wari », « barka »... Après cette expérience, nous sommes allés jusqu’à même introduire dans la zone, le « bondofa » qui est un hybride. Ce qui a permis de passer de 4 à 8 tonnes à l’hectare. Cela fait qu’aujourd’hui, la production du maïs dans cette zone est devenue excédentaire. Les producteurs ont des surplus de production qu’ils commercialisent et ils ravitaillent les unités de transformation de maïs de la ville de Ouagadougou.

S. : Quel bilan pouvez-vous dresser des résultats des chercheurs burkinabè dans le domaine de la promotion des semences de variétés améliorées ?

H.T. : A ce jour à l’INERA, nous avons plus de 200 variétés de semences, toutes espèces confondues. Si vous prenez le riz par exemple, nous avons une soixantaine de variétés. Nous avons des variétés améliorées de sorgho, de mil. L’INERA dispose aussi d’un manuel de l’organisation de la production et de la gestion des semences. Cependant, il y a les cultures pour lesquelles, nous avons quelques difficultés et que nous sommes en train de chercher à corriger, notamment l’arachide qui se conserve difficilement. Le taux en huile très élevé de l’arachide fait que sa germination se perd au fil du temps. Nous avons également quelques problèmes avec le mil en termes de variétés.

S. : Y a-t-il des innovations en la matière ?

H.T. : Nous avons aujourd’hui le tournesol. Nous sommes en train de produire des semences de tournesol pour approvisionner des producteurs, notamment la SOFITEX. L’innovation, c’est que nous avons cette approche de plate-forme multi-acteurs. L’autre innovation en matière de promotion des semences, c’est le fait que de plus en plus, il est organisé, dans les directions régionales pendant chaque campagne agricole, des vitrines d’exposition des semences améliorées. Ce, pour promouvoir les différentes variétés d’une spéculation donnée ou plusieurs pour que les gens puissent voir les différents stades de développement de ces cultures.

S. : Pouvez-vous nous donner la situation des Organismes génétiquement modifiés (OGM) au Burkina Faso ?

H.T. : Parler des OGM, c’est parler des biotechnologies. Ce sont des outils qui permettent d’accélérer la création des variétés, parce que, dans le temps, le sélectionneur mettait 8 à 10 ans pour créer une variété. Avec les outils de la biotechnologie moderne, au bout de 4 ans, on peut créer une variété. Tout outil qui permet effectivement à la science de faire des progrès, l’INERA est partie prenante. Cette nouvelle technologie est venue et elle permet de maîtriser la pression des insectes. Egalement, elle permet, en matière d’environnement de ne pas déverser des quantités énormes de pesticides et de sauvegarder la santé du producteur.

S. : Votre institut, sous la présidence du ministère en charge de la recherche scientifique, organise depuis 4 ans la foire aux semences. Que vise cette initiative ?

H.T. : C’est pour permettre de rendre notre action plus visible. Cela est une action à la fois de visibilité et de plaidoyer, qui consiste à aller vers les décideurs, notamment les membres du gouvernement et les partenaires au développement que nous invitons à cette foire. Ce, également pour que les gens comprennent que nous sommes autorisés par la loi à produire les semences de base et leur démontrer que nous avons cette capacité. Aussi, pour qu’on nous fasse confiance afin de nous accompagner avec des moyens conséquents. La production de la semence nécessite suffisamment de moyens. Alors, nous lançons un appel aux décideurs pour qu’ils puissent continuer à nous soutenir. Nous informons également les producteurs en leur disant que la semence est la clé pour avoir une production conséquente. Elle contribue entre 15-40% au rendement agricole. Cela pour dire que si vous n’avez pas de bonnes semences, le tracteur, l’engrais ne suffiront pas pour rentabiliser votre exploitation.

S. : Pensez-vous que cette manifestation a apporté un regain à la production agricole ?

H.T. : Certainement ! Rien qu’à chaque organisation, il y a un grand nombre de participants avec beaucoup d’engouement. Aussi, grâce à cette manifestation, l’INERA a construit des boutiques de semences et a renforcé ses services de production. On nous a demandé de décentraliser la foire. Nous avons dit que la foire est focalisée sur les semences de base, mais il y a des foires régionales, provinciales que le ministère du Commerce a le mandat d’organiser avec le ministère de l’Agriculture ou d’autres ministères, telles que la foire du fonio, du sésame, du niébé… Tout cela participe à la promotion des semences améliorées. C’est aussi une façon de sensibiliser les producteurs, de les exhorter à s’approprier l’idée selon laquelle, pour une bonne production agricole, il faut des semences améliorées.

S. : Rencontrez-vous des difficultés dans votre mission de promotion des semences améliorées ?

H.T. : Oui et non, parce que depuis l’organisation de la foire, nous avons été accompagnés par un certain nombre de partenaires. Les difficultés, c’est ce que nous avons dit tantôt, pour produire la semence, il faut ce qu’on appelle les charges récurrentes. C’est-à dire que nos stations sur lesquelles nos semences sont produites, nos directions régionales ont des budgets de fonctionnement. Si ces fonds se font rares, les travailleurs ne pourront pas venir au service. Il y a très peu d’argent utilisé pour les activités de la recherche. Cela est une difficulté. Egalement, les infrastructures sont vétustes, elles ont besoin d’être renouvelées. Il faut signaler qu’il y a des efforts qui sont faits au niveau de l’Etat, notamment avec la création du ministère de la Recherche scientifique et de l’Innovation en 2011. Nous avons élaboré un plan d’investissement dans le cadre de ce ministère, et si cela est adopté et qu’il y a un financement conséquent, nous pourrons réaliser et innover certaines infrastructures qui nous permettront de fournir des semences de base en qualité et en quantité.

S. : Quel message lancez-vous à l’endroit des producteurs et du gouvernement en vue de booster le secteur ?

H.T. : Pour le gouvernement, il y a certains projets axés sur les semences. C’est le cas des projets financés par l’Union européenne (UE) via la FAO. Il y a aussi le projet japonais qui nous a aidés à construire certains laboratoires pour l’analyse des semences. Il faut dire que nous avons le mandat de produire les semences de base et un autre mandat qui est de former les inspecteurs semenciers qui viendront en retour inspecter nos champs pour certifier nos semences de base, si elles sont produites dans de bonnes conditions. Ce sont eux qui certifient les semences produites par les producteurs semenciers ou les organisations de producteurs. Le gouvernement doit poursuivre son effort pour appuyer le secteur semencier parce que c’est un secteur qui a besoin d’être bien organisé. Si cela est fait, à un moment donné, il y aura des entreprises qui vont émerger. En direction des organisations de producteurs, des producteurs eux-mêmes, nous disons que la semence est la base de la production. C’est le premier facteur de production et du fait que cela contribue de 15 à 40% au rendement. Si nous investissons dans la semence améliorée, et nous y mettons les moyens, notamment en termes de labour, d’engrais fertilisants, nous allons en tirer pleinement les bénéfices.



Entretien réalisé par :
Kowoma Marc DOH
dohmarc26@yahoo.fr
Issa KARAMBIRI
(Stagiaire)

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