On l’a maintes fois décrié, bien des rues aux alentours du marché central Rood-wooko, principalement la rue Ousmane-Sibiri-Ouédraogo, qui va de la grande mosquée au siège de la LONAB en passant par L’Observateur Paalga, ressemblent à un véritable capharnaüm. Les embouteillages y sont légion du fait du non-respect des règles élémentaires de la circulation, notamment par les conducteurs de tricycles, les charretiers et les camionneurs. Hier 29 avril 2014 aux premières heures, la police municipale, assistée d'éléments de la CRS, a fait le ménage et des mécontents. Mais la joie des usagers de cette rue n'a été que de courte durée, les anarchistes ayant repris leurs droits après le départ des policiers.
Alors que le propriétaire d’une remorque, aidé par des dockers, s’apprêtait à en délier les sangles pour décharger son contenu sur le coup de 8 heures sur la rue portant le nom du grand marché, un groupe de policiers municipaux conduit par leur commandant, Clément Ouango, leur fit remarquer que ce n’était pas l’heure indiquée. «Selon les textes, c’est à partir de 20 heures qu'on est autorisé à décharger des marchandises en ces lieux», lance le commandant au commerçant qui obtempère. Pendant ce temps, dans la foule on entend des menaces à peines voilées en langue nationale mooré : «Que Dieu préserve la paix au Burkina.» Mais l’équipe, qui ne se laisse pas intimider, poursuit sa mission. Très tôt le matin elle a enlevé charrettes, tables planches et véhicules qui encombraient les abords des rues. Conséquence, la circulation est restée fluide pendant la bonne moitié de la journée avant, une fois encore, de se densifier avec l’arrivée des camions qui ont prouvé, si besoin était, que les habitudes avaient la peau dure.Très remontés, les commerçants victimes de cette opération ont pris la direction de l’Hôtel de ville, où une escouade de CRS ont calmé leurs ardeurs en les tenant à bonne distance. lls n’ont donc pas eu d’autre choix que de repartir en laissant le soin à leur représentant d'entrer en négociation avec les maîtres des lieux. Délégué des marchands, autorités communales et forces de sécurité ont longuement échangé à huis-clos pour déblayer le terrain en vue d'une rencontre dans l’après-midi avec le bourgmestre, Marin Casimir Ilboudo.
Echanges houleux avec le maire
C’est à 16h que celui-ci a rencontré les plaignants, mais d’entrée de jeu il a précisé qu’il n’a qu’acceder à de demande de rencontre formulées par les victimes de cette opération et que pour cela il leur revient de se faire d’abord entendre.Et c’est parti pour un échange tendu avec les commerçants, qui rivalisaient de propos véhéments. Morceaux choisis : «Si quelqu’un tète son père, c’est que sa mère n’est pas là. Vous avez promis de faire la volonté du peuple et vous faites maintenant le contraire»; «Vous avez opéré à 1 heure du matin comme des voleurs sans prévenir personne»; «Vous, vous avez mangé, mais nous non. Vous pouvez payer des sacs de riz mais nous, nous en payons par kilo. Vous avez très mal agi»; «Si c’était l’ancien maire Simon Compaoré, il nous aurait prévenus et il serait sorti sur le terrain pour guider la police, mais vous on ne vous a pas vu». Sur un ton ferme, le maire a dit qu’il faut s’accorder avant de poursuivre la rencontre sur le fait que la mairie a organisé des rencontres depuis l’an passé sur le phénomène et a donné trois mois à chacun pour se mettre en règle. Mieux, depuis une dizaine de jours, un communiqué radiophonique informant du lancement d’une vaste opération de ce genre est diffusé. «Il est de notre responsabilité de préserver vos vies et celles des autres. Nous ne tolérerons pas la pagaille. Marin fera ce qu’il doit faire. J’ai été élu pour cinq ans et j’accomplirai ma mission sans faire de politique. Si vous êtes venus m’exposer des doléances, faites-le et nous ferons ce qu’on peut faire, mais il n’est pas question de perdre le temps à discuter de l’opportunité ou non de cette opération qui va se poursuivre jusqu’à ce que tout le monde soit en règle. La loi est claire : ce genre d’opération, on peut le mener à tout moment et à n’importe quelle heure», a martelé le premier magistrat de Ouagadougou. Et le commandant de la police municipale, Clément Ouango, de poursuivre : « Lorsqu’on veut discuter avec les autorités, il faut se fonder sur la vérité; cela a l’avantage de nous faire avancer et de nous permettre d’examiner sereinement vos problèmes. Lorsque vous clamez que vous êtes des Burkinabè, personne ne le nie, mais n’oubliez pas que vous n’êtes pas les seuls Burkinabè. Nous avons mené l’opération avec professionnalisme et tout le matériel a été étiqueté». Après avoir calmé les commerçants, le député Moussa Nikièma, le remplaçant du Larlé Naaba à l'hémicycle, a présenté ces doléances : la récupération des marchandises et du matériel saisis ainsi qu’une certaine souplesse dans l'application des textes pour que les marchands puissent continuer d'exercer et gagner ainsi leur pain quotidien sans pour autant entraver la circulation. Le maire a donné des instructions pour la restitution de tout ce qui a été saisi contre une amende forfaitaire de 6000F par personne au lieu de 24 000F comme prévu par les textes. Il a aussi demandé aux plaignants de faire des propositions de site pouvant les accueillir. Si ce problème est en passe d’être résolu, il reste un pan important du phénomène, à savoir ces gros camions qui chargent, déchargent et stationnent partout et n’importe quand.