On parle souvent de la pression fiscale et de la corruption au Burkina. Mais, mesure-t-on les conséquences réelles qu’elles ont sur les entreprises ? Quand les taxes et impôts divers sont trop lourds, quand les opérateurs économiques sont rackettés à toute occasion, que croyez-vous qu’il va se passer ? Ce sont les performances des entreprises et par ricochet leurs prestations qui vont en prendre un coup.
Et en général, tous ceux qui, d’une manière ou d’une autre, grappillent sur les marges bénéficiaires des sociétés, gravitent autour de l’administration publique et des cercles du pouvoir. Ce sont toujours les mêmes qui vont voir le DG pour tel ou tel service. De sorte que rien ne peut aboutir si on ne dépose pas un caillou sur le papier. En définitive, les agents de l’Etat et certains bonzes du régime sont les principaux fossoyeurs de notre économie. Ils retardent la progression du pays en rendant difficile la vie des sociétés. Ainsi donc, en plus de la fiscalité ordinaire, le monde des affaires doit faire face à d’autres charges occultes qui affectent dangereusement leurs comptes.
Sur ce plan au moins, il faut rendre justice aux sociétés honnêtes, compétentes et sérieuses qui fonctionnent difficilement du fait du racket organisé dont elles sont victimes.Si on prend l’exemple des société de téléphonie victimes de sanctions pécuniaires, il faut se dire une chose: ce sont les consommateurs qui, en dernier ressort, paieront les pots cassés.
C’est vrai, certaines entreprises jouent à fond le jeu de la corruption parce que ,soit elles sont incompétentes, soit elles n’ont pas le choix. Une sorte d’omerta règne dans ce domaine et pour ne pas courir le risque de perdre de prochains marchés, la plupart des opérateurs économiques subissent sans broncher.
Pour un véritable climat des affaires sain, il faut mettre fin à la funeste activité de tous ces vautours qui mettent en péril la santé des entreprises. Il faut non seulement desserrer l’étau fiscal autour des sociétés à vocation stratégique comme les télécommunications, mais aussi punir tous les braqueurs qui écument les bureaux des grands patrons. C’est possible de mettre de l’ordre dans le milieu et de permettre au secteur de souffler.
Il y va de la qualité des prestations offertes. On a récemment vu le bâtonnier du Burkina exclure des avocats qualifiés de « coupeurs de route ». Mais dans l’administration publique et les hautes sphères de l’Etat, les « coupeurs de route » ne sont nullement inquiétés. En tout cas, rien n’est fait dans le sens de les mettre hors d’état de nuire. Le phénomène du racket des entreprises a donc de beaux jours devant lui. Certains agents véreux en ont même fait leur business. C’est le comble.
Si la situation perdure, on finira par accuser les dirigeants d’être les premiers responsables des difficultés des opérateurs économiques. C’est pourquoi, au risque de nous répéter, il urge de faire quelque chose.
Car des sociétés débarrassées de toutes les charges assimilables à des bakchichs, seront plus performantes. Et c’est tout le pays qui gagne. Certains marchés sont mal exécutés en partie à cause de la corruption. L’entrepreneur passe son temps à distribuer de l’argent à de nombreux intermédiaires, alors qu’il devait l’injecter dans la bonne réalisation du marché et le développement de son entreprise.
Le problème a atteint un tel niveau que certaines entreprises sont obligées d’en tenir compte dans le montage de leurs dossiers d’appels d’offres : il faut forcément prévoir l’enveloppe destinée aux contrebandiers tapis dans la chaîne de l’administration.
Il faut mettre fin à ce scandale. Ailleurs, un ministre, un DG ou un fonctionnaire qui s’amuse à demander des dessous de table est un «homme mort ». C’est la fin de sa carrière politique ou administrative.
Arrêtons donc de tout rejeter sur les opérateurs économiques. Parfois, ils n’ont d’autre choix de que d’offir des services ou faire des réalisations au rabais. Avant de leur jeter l’anathème, mettons d’abord de l’ordre dans le milieu des affaires en extirpant tous les pourris qui l’infestent. Le Premier ministre, qui semble se montrer très soucieux de la bonne exécution des chantiers de l’Etat, devrait donc aussi regarder de ce côté .