La vie, dans mon état, n’est pas une partie de plaisir. Je suis tout le temps confronté à des problèmes d’argent. Ça vous étonne ? Eh bien oui, je dispute les restes de nourriture avec les chiens, les charognards et autres. Du coup, cette réserve ne suffit plus. Je dois donc acheter à manger et il faut de l’argent pour ça. L’autre jour, alors que je passais par là quémander une pièce, le kiosque du quartier avait au menu des débats sur le retour du billet de 500FCFA. Un sentiment bizarre m’a animé et je me suis mis à réfléchir sur ce fameux billet. Pourquoi diantre l’avoir retiré de la circulation en 2004 ? En tout cas, on ne nous a jamais dit pourquoi. A mon avis, c’était pour des raisons économiques, dans le sens où le billet de 500 F CFA, le plus petit billet et le plus usité, se fatigue plus vite. De toute façon, ce va-et-vient du billet de 500 F qui s’apparente à un tâtonnement, arrange les usagers. Dans les économies de famine comme celle des pays de l’UEMOA, 1000 F CFA comme dernier billet, c’est énorme. Et puis, le billet de 500 F viendra résoudre la question des pièces lisses.
Souvent, vous allez voir un commerçant avec une pièce et il vous refuse ce que vous voulez, arguant que votre pièce est lisse. A côté de tout ce que j’ai dit, il ne faut pas oublier que le billet de 500 F a une valeur sociologique. L’argent, ce n’est pas que les finances.
Puisque les mariages, baptêmes et funérailles sont des lieux où, en général, on apporte son soutien financier. On ne pouvait pas mettre dans une enveloppe la pièce de 500 F. Pour cinq cérémonies, si on doit à chaque fois mettre 1000 F dans l’enveloppe, il faut avouer que c’est compliqué. Je comprends pourquoi beaucoup de cérémonies étaient désertées. Par ailleurs, la pièce de 500 F perçait la poche. Quand tu la mets dans ta poche, elle l’use et finit par la trouer. En un mot comme en mille, le billet de 500 F reflète le niveau de vie réel des populations. Sans oublier que cela peut être gênant de donner une pièce à quelqu’un. Je peux même dire que ce retour du billet de 500 F CFA n’est que justice rendue aux utilisateurs. La BCEAO corrige non seulement une erreur, mais elle se rattrape.
Curieusement, en Afrique Centrale, le billet de 500 F n’a jamais disparu au profit d’une quelconque pièce. Certains doivent être contents parce qu’ils pourront facilement donner beaucoup de billets pour peu de somme dépensée. Ils peuvent enfin faroter, parce que la pièce de 500 F n’est pas égale au billet de 500 F et pour « faroter », on ne peut le faire avec des pièces de monnaie.
« Le Fou »
*Faroter : terme du jargon ivoirien pour dire faire le malin
