L’Association des professionnelles africaines de la communication (APAC), section du Burkina Faso, a organisé une conférence publique, le jeudi 20 mars 2014. Elle a été animée par un journaliste et communicateur en service au Conseil supérieur de la communication (CSC), Lacina Kaboré.
« Les femmes des médias sont victimes d’agression diverses et variées à l’intérieur des rédactions tout comme sur le terrain de reportage », a déclaré Lacina Kaboré, journaliste et communicateur au Conseil supérieur de la communication (CSC). C’était le jeudi 20 mars 2014 à Ouagadougou, à l’occasion de la conférence publique organisée par l’Association des professionnelles africaines de la communication (APAC), section du Burkina Faso. Les échanges ont porté sur le thème « Information, communication et violences fondées sur le genre au Burkina Faso : rôles des médias ».
Pour illustrer ces Violences fondées sur le genre (VFG), dans les conditions de travail des femmes de médias au Burkina Faso, il a cité 3 cas.
Le premier cas est consigné dans Gassé Galo de l’ancien directeur général de la Télévision nationale du Burkina (TNB), Yacouba Traoré. Il date depuis la Révolution, où sur un coup de fil, le président Thomas Sankara a demandé à une télespeakerine de la Télévision nationale, Salamata Traoré, de ne plus s’habiller en bazin pour le reste du programme.
En décembre 2006, la journaliste Ramata Soré de L’Evènement a été agressée au camp Guillaume.
Le dernier cas remonte à juillet 2009, où Raïssa Compaoré, journaliste de Canal 3 a été agressée à Rood-Woko, alors qu’elle assurait la couverture médiatique d’un mouvement de foule consécutif à un drame ayant occasionné une perte en vie humaine. « Des manifestants l’ont violentée physiquement et lui ont retiré son matériel de reportage et son téléphone portable », a déploré le conférencier.
Et pour lui, les violences contre les hommes et les femmes de médias ne constituent pas un phénomène nouveau. Elles sont toujours d’actualité, et constituent une violation à l’un des droits civils et politiques, le droit à l’intégrité physique et morale des citoyens.
« Le rôle des médias dans l’éradication des VFG est paradoxal », a relevé M. Kaboré. Pour lui, les médias sont à la fois des victimes et des vecteurs de ces violences fondées sur le genre.
De son avis, autant les acteurs des médias sont l’objet de violences essentiellement morales dans l’exercice de leur fonction autant dans leurs productions ou dans les contenus diffusés dans leurs organes, Lacina Kaboré du CSC a noté d’importants cas de VFG. Et ce, dans l’information générale, dans les spots publicitaires et dans les œuvres de fiction. Selon lui, les années 2009 et 2010 ont enregistré le grand nombre de VFG dans les médias burkinabè avec six cas recensés. Suivent ensuite les années 2008 et 2010 avec 3 cas recensés par année.
A l’entendre, les atteintes à l’image et au droit à l’image de la femme sont évocatrices dans les médias burkinabè avec 11 cas (soit 50%). Les atteintes aux bonnes mœurs et à la décence féminine ferment la marche avec 4 cas recensés (soit 18%).
Pour l’atteinte à l’image et au droit à l’image de la femme, le CSC a recensé entre autres, en 2006, une annonce publicitaire où une femme est chassée par son homme parce que son teint n’était pas harmonisé. Aussi, le régulateur a, en 2006, relevé un spot publicitaire de la société KAIZER qui met en scène une fillette de deux ou trois ans, une jeune fille et un jeune homme (noms des copains : Jean Charles, Omar, Kader). En ce qui concerne les atteintes aux bonnes mœurs et à la décence féminine, en 1998, le CSC a enregistré des spots publicitaires sur la prévention du SIDA diffusés par la télévision du Burkina.
Dans les œuvres de fiction à la TNB, il a été diffusé, le vendredi 21 décembre 2007, un épisode du feuilleton « Au cœur du péché » contenant des scènes portant atteinte à la pudeur. L’épisode montrait un club de nudistes déambulant sur une plage.
Les médias, rempart de lutte contre les VFG
A Canal 3, le film « Eyes wide shut » du réalisateur Stanley Kubrick a été diffusé les 28 et 29 avril 2006 de 21h30 à 22h44. Pour M. Kaboré, ce film choquait de par son contenu truffé de scènes de nudité, contrastait avec certaines dispositions règlementaires et conventionnelles.
Quant à la télévision BF1 en 2010, il a été diffusé un film contraire aux bonnes mœurs. Le film comportait des scènes érotiques, des paroles indécentes à une heure de grande audience et des actes de nature à heurter les personnes sensibles.
Face aux violences fondées sur le genre, à entendre Lacina Kaboré, les médias doivent refuser de jouer le mauvais rôle, « celui de vecteurs de violence » au profit du bon rôle. « Accepter de jouer le bon rôle signifie s’approprier la cause pour informer, éduquer et sensibiliser sur les méfaits et les conséquences négatives des VFG », a t-il déclaré. Aussi, les femmes et hommes de médias doivent créer et animer des programmes ou rubriques dans leurs médias de manière régulière. Pour un « journalisme d’accompagnement » sensible aux VFG, il a signifié que les organes de presse doivent « dépasser la méfiance et les incompréhensions entre le monde des organisations et des entreprises et le monde des médias pour faciliter la vulgarisation des messages relatifs aux VFG ». En termes de perspectives, le conférencier a relevé que la question des VFG dans et sur les médias est complexe. Ainsi, pour lui, il appartient à l’ensemble des acteurs concernés (journalistes, régulateur autorégulateur, publicitaires, monde du cinéma, etc.) à s’investir pour des solutions efficaces.