Le vendredi 14 mars 2014, des populations des sept départements de la Gnagna, à l’Est du Burkina Faso, ont manifesté à Bogandé, chef-lieu de la province. Elles se disent excédées par le phénomène de l’insécurité. Si l’on s’en tient aux informations relayées par les médias, ce qui a révolté les populations, c’est le sentiment d’impunité face à ce phénomène. « Plusieurs fois on arrête des coupeurs de route, et quelques temps après, on les retrouve en liberté », disaient-elles. Cela est un fait inexpliqué et injustifié aux yeux des populations qui comptent pourtant sur les forces de sécurité et la justice pour jouir de leurs biens et de leur liberté de mouvement.
Les populations sont mécontentes de leurs services de sécurité et la justice. L’absence d’une réelle synergie d’action entre les forces de sécurité et la justice pose un problème réel. Voilà deux maillons d’une chaîne fondamentale dans la vie d’une nation qui se veut être paisible. Dans la lutte contre l’insécurité, ces deux entités sont obligées d’agir en tandem. Les habitants de la Gnagna exigent le départ du procureur du Faso près le Tribunal de grande instance de Bogandé. Ils lui reprochent de relaxer des délinquants à lui déférés par les forces de sécurité. Décider de libérer des délinquants présumés souvent au grand étonnement de tous, ressemble à un sabotage de travail préalable des forces de sécurité. Il est vrai que le juge agit selon la loi, mais la loi ne doit pas opposer les hommes de loi aux forces de sécurité. Si le juge regarde le policier ou le gendarme d’en haut, en le considérant comme "un moins que rien", un ignorant du droit, la lutte contre l’insécurité sera vaine. Le juge n’est rien sans l’agent de sécurité chargé de lui faire un travail préalable. Ces deux maillons de la chaîne ont plus intérêt à collaborer qu’à s’opposer. L’absence de justice conduit à l’autojustice des citoyens. Un pas à ne pas franchir.
Il faut également déplorer le manque de collaboration entre populations et agents chargés d’assurer leur tranquillité. Les citoyens eux-mêmes accordent peu de respect à leurs protecteurs. Si les forces de sécurité ne sont pas méprisées, elles sont vues d’un mauvais œil. Des Burkinabè dorment, boivent et mangent avec d’autres concitoyens aux comportements suspects, qui mènent une vie de pachas à l’aide de biens aux origines douteuses. Ils sont au courant que ceux-ci mènent des activités illicites. Mais personne n’ose dénoncer les délinquants auprès des policiers et gendarmes. Disons-le, l’incivisme constaté ces dernières années a eu des effets sur nos forces de l’ordre. Beaucoup sont ceux qui portent l’uniforme, mais ont le moral bas dans la lutte contre la délinquance.
Aujourd’hui, chaque agent de sécurité préfère éviter les problèmes. Pour un oui ou un non, des manifestations contre la police, la gendarmerie, la douane ou les services des eaux et forêts sont monnaie courante. On pousse l’outrecuidance en exigeant parfois la libération de personnes suspectées et mises en détention provisoire. Des coups de fil venant très souvent « d’en haut » ordonnent purement et simplement la libération des détenus. Avec de telles pratiques, comment ne pas annihiler les efforts consentis pour sécuriser les habitants. A force de contester la légalité des actions policières, on finit par remettre en cause la légitimité des forces de l’ordre, par les décourager dans la lutte contre la délinquance. L’incivisme est nuisible à l’homme lui-même.