La cinquantaine révolue, Assétou Kouanda, s'est retrouvée dans l'entreprenariat par le fait du hasard...
Esthéticienne formée en Côte d'Ivoire et en Belgique, rien ne la prédestinait à l'hydraulique et au génie civil. Pourtant, la belgo-burkinabè, Assétou Kouanda, 54 ans, a intégré ce secteur par le fait du hasard et s'y est finalement adaptée. Ainsi en a voulu son destin. « Je faisais du commerce d'habits et de produits cosmétiques dans un premier temps et de véhicules par la suite, avant de m'investir pleinement dans le domaine de l'hydraulique et du Génie civil », confie cette mère de trois enfants, basée à Ouagadougou. Et l'histoire de ce revirement parait banale. « Un jour, il y a un cousin qui m'a suggéré de créer une entreprise. Je lui ai dit que je ne m'y connaissais pas. Il a insisté, en me disant de tenter ma chance et j'ai créé l'entreprise Kouanda Assetou, spécialisée en travaux en hydraulique et génie civil en 1998 », raconte-t-elle, tout sourire. Depuis lors, cette dame affable et d'une certaine simplicité s'est fait une place au soleil.
Réussissant à force de détermination à inscrire son nom dans les annales du secteur très masculin de l'hydraulique et du génie civil. Le même cousin, qui lui a suggéré la création de l'entreprise, va la pousser vers le bonheur. « Mon cousin m'a proposé de soumissionner à un marché du ministère de l'Agriculture sur les puits à grande diamètre. Chose que je fis et ca a marché. On a eu donc notre premier marché d'une valeur de 35 millions de F CFA (ndlr : plus de 50 000 euros) », se rappelle Assétou Kouanda, un brin nostalgique. Et de s'enorgueillir : « Quand j'ai commencé dans l'hydraulique au Burkina Faso, j'étais pratiquement la seule femme. J'ai travaillé avec un ingénieur en hydraulique et un géophysicien, qui m'ont encadré et comme j'aime bien ce métier, j'ai fini par m'adapter.» De marché en marché, fait remarquer Mme Kouanda, elle a arrêté de « louer » des équipements pour en devenir propriétaire.
Plus de 1000 forages réalisés
Aujourd'hui, elle emploie une vingtaine de personnes, avec à son actif « plus de 1000 forages positifs réalisés». Mais est-ce facile pour une femme d'exceller dans ce domaine ? « Avec l'émancipation de la femme, actuellement on peut quand même se mesurer aux hommes (rires). Il suffit d'aimer ce que l'on fait. Et n'oublions pas qu'on fait plus confiance aux femmes pour leur sens de la bonne gestion », réagit-elle. Fondant sa réussite sur le « travail bien », Assétou Kouanda dit ne pas avoir de problème à concilier vie professionnelle et vie privée. « Au moment où je venais à l'entreprenariat, mes deux premiers enfants étaient déjà grands. C'est la dernière qui était petite, mais elle était à l'internat et cela m'a aidé. Etant dans l'entreprenariat, j'ai commencé à comprendre les hommes, car ce n'est pas facile avec le boulot. Je n'ai pas de problèmes avec mon homme du fait de mes occupations professionnelles », souffle l'entrepreneure. Passionnée par son métier, Assétou Kouanda reconnait pour autant que la gestion du personnel n'est pas une chose aisée. « J'ai une culture européenne, qui exige beaucoup de rigueur dans le travail. Cette rigueur n'est pas vraiment une réalité en Afrique. Il faut toujours bousculer les gens, sinon ils n'ont pas le sens du suivi et de l'initiative », regrette-t-elle.
La fierté de servir les communautés
La réalisation de forages négatifs, qui peut entrainer des pertes financières à son entreprise, et les difficultés liées au financement de l'entreprenariat en Afrique sont d'autres soucis qu'elle partage. « L'entreprenariat en Afrique, c'est difficile. Au début l'avance de démarrage des marchés au Burkina Faso, c'était 10%. Maintenant c'est passé à 30%. Même avec cela, il faut avoir de l'argent, puisque le paiement ne suit pas toujours. Après l'exécution d'un marché, il faut faire trois à six mois, voire un an avant d'être payé. Ce qui nous pénalise », raconte Assétou Kouanda. Aussi renchérit-elle : « Dans les cahiers de charge, on parle d'un délai de 90 jours pour le paiement, mais c'est jamais respecté. Quand l'Etat est en retard, il n'y a pas de pénalité, mais quand ce sont les entrepreneurs, on leur applique une pénalité ».
Ces écueils n'entament en rien la détermination et la fierté de la femme d'affaires à faciliter l'accès à l'eau potable aux communautés. « Cela me fait énormément plaisir. Quand l'eau jaillit, tout le monde est content. Comme on le dit, l'eau c'est la vie », affirme-t-elle. Pour le reste, Assétou Kouanda est une adepte du football, sport qu'elle ne peut plus pratiquer à son âge, du cinéma et de la musique, « surtout au volant en conduisant ».
Elle entend fêter la 157e journée internationale de la femme, le 8 mars 2014, avec les autres membres de l'association « Les cristallines », à laquelle elle appartient. En plus des femmes atteintes de cancer et des enfants déshérités dont elles ont épousé la cause, Assétou Kouanda et ses camarades débattront à l'occasion de sujets, tels l'entretien du foyer et l'éducation des enfants.... suite de l'article sur Jeune Afrique