Plus de 100 000 avortements clandestins ont été pratiqués au Burkina Faso en 2012, malgré une loi autorisant les interruptions de grossesse pour raisons médicales ou en cas de viol ou d'inceste, a expliqué mercredi un démographe burkinabè à l'AFP.
Alors que plus de la moitié des 105 000 actes clandestins estimés sont exécutés par du personnel médical (médecins, sages-femmes, etc), des complications surviennent dans 70 à 80% des cas lorsque les femmes avortent elles-mêmes ou se font aider par des praticiens traditionnels, évalue Georges Guiella, un démographe de l'Institut supérieur des sciences de la population (ISSP) de l'université de Ouagadougou.
La mortalité maternelle burkinabè, soit le décès de femmes durant leur grossesse ou les semaines suivant l'accouchement, est dans 16% des cas liée aux séquelles de précédents avortements clandestins, estime M. Guiella.
L'institut américain Guttmacher et l'ISSP, qui ont publié en février un premier rapport sur les avortements clandestins au Burkina Faso à partir d'un échantillon de plus de 4000 femmes, n'ont toutefois pu déterminer combien périssaient directement du fait de cette pratique.
Les risques sont plus importants pour les femmes pauvres vivant en milieu rural, dont 72% consultent des praticiens traditionnels ou tentent de mettre fin elles-mêmes à leur grossesse en ingérant des potions, de fortes doses de médicaments ou des produits contenant de l'eau de javel ou de la lessive, d'après ce rapport.
À l'inverse, 74% des femmes aisées et urbaines ont recours à du personnel médical formé, de même source.
L'avortement est légal au Burkina Faso depuis 1996 sous certains critères: si la grossesse met en danger la vie de la mère, si une malformation est observée chez le foetus, ou si l'enfant a été conçu lors d'un viol ou dans l'inceste.
Mais de nombreuses femmes ignorent cette loi que même certains professionnels de la santé méconnaissent, regrette Georges Guiella.
Les femmes souhaitant avorter dans le cadre de la loi doivent par ailleurs présenter de multiples avis médicaux et autres certificats. Nombre d'entre elles se font avorter clandestinement pour éviter ce «parcours du combattant», estime le démographe, qui appelle l'État à simplifier les procédures.
L'avortement clandestin est puni d'amendes et de peines de prison, parfois très lourdes, au Burkina Faso.