Il court, il court. Depuis quelque temps, le Premier ministre et certains membres du gouvernement ont accéléré les visites de chantiers. 2015 approche à grands pas et il faudra comptabiliser les projets présidentiels. Il n’y a donc pas de temps à perdre. Mais un même problème est constant dans la plupart des chantiers visités : les retards d’exécution. A quoi est dû ce contretemps ? Visiblement, il est le plus souvent imputable aux entrepreneurs, au regard des coups de gueule et des menaces de sanctions proférés par le Premier ministre. Cela veut dire que l’Etat a respecté sa part du contrat, au contraire des entreprises adjudicataires qui traînent les pas. Comme ces entreprises n’osent pas dire officiellement pourquoi elles rencontrent des difficultés, on ignore quelle est la part de responsabilité de l’Etat. Ce qui est sûr, il y a soit des problèmes de retard, soit de mauvaise exécution. Il est possible que les sociétés de BTP soient sous la pression du gouvernement, lui-même engagé dans une course contre la montre par apport au programme quinquennal du président. Mais cet agenda présidentiel ne peut justifier à lui seul les nombreux dysfonctionnements constatés. Il va falloir chercher en amont les causes du mal, au moment où les appels d’offres sont lancés et les sélections faites. En somme, c’est essentiellement le mode d’attribution des marchés qu’il faut revoir.
Il ne sert à rien de passer le temps à courir sur les chantiers en retard ou mal exécutés, au moment où le mal est déjà fait. Quand on considère les dépenses et l’énergie engendrées par les déplacements du Premier, il y a lieu de trouver des solutions durables pour éviter à l’avenir de telles situations. Le Premier ministre a d’autres choses à faire que de jouer les contremaîtres. L’Etat doit effectivement octroyer les marchés en toute transparence. Il ne doit plus y avoir de place pour les médiocres. L’on a l’impression que malheureusement, toute personne qui s’improvise entrepreneur peut décrocher un marché. C’est une fois sur le terrain que ses tares se révèlent au grand jour. Mais il est déjà trop tard. Il faut mettre fin à la complaisance dans l’attribution et le contrôle de l’exécution des marchés publics. La question qui se pose, cependant, est de savoir si le gouvernement n’a pas laissé la situation pourrir. Avec tout l’affairisme qui entoure le secteur des marchés publics, malin qui saura, dans les conditions actuelles, y mettre de l’ordre. Trop d’intérêts en jeu, trop de ramifications entre opérateurs économiques et hommes politiques.
C’est pourquoi on se demande si ce gouvernement est capable de changer les choses. En tout cas, depuis qu’on parle de modernisation de ce secteur, les problèmes perdurent. Pourtant, la nécessité d’assainir le milieu est plus qu’urgente. Les emprunts faits par le Burkina pour réaliser certaines infrastructures seront forcément remboursés, qu’ils aient été bien ou mal utilisés. Les entreprises qui exécutent bien leurs marchés sont connues, tout comme celles qui bricolent. Il n’y a pas de raison qu’on continue à faire comme si de rien n’était. C’est avant tout l’argent du contribuable qui est en jeu et il doit être judicieusement utilisé. Par ailleurs, les lenteurs ou les mauvaises réalisations de chantiers de l’Etat engendrent des doubles dépenses, comme on l’a vu avec l’Avenue 56, à Ouagadougou, où il a fallu débloquer des fonds supplémentaires pour la reprise de certains travaux. C’est un gâchis inacceptable pour un pays aussi pauvre. Les entreprises doivent se doter de toute l’expertise nécessaire pour déceler, en amont, les difficultés inhérentes à leur marché. Ce n’est pas en pleins travaux que l’on doit se rendre compte de ses erreurs de jugement et les faire supporter par l’Etat. En tout état de cause, les acteurs impliqués dans ce processus d’octrois des marchés publics sont appelés à revoir leur copie. Car le
peuple espère mieux d’eux.