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Me Bénéwendé Sankara : «Lenga présidentiel ? Faut même pas rêver»
Publié le mercredi 12 fevrier 2014   |  L’Observateur


Groupes
© aOuaga.com par A.O
Groupes parlementaires : l`ADJ fait son bilan
Mardi 21 janvier 2014. Ouagadougou. Les députés du groupe parlementaire de l`Alliance pour la démocratie et la justice (ADJ) ont animé une conférence de presse pour faire le bilan de leur action à l`Assemblée nationale. Photo : Me Bénéwendé Sankara, président de l`UNIR/PS


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La médiation interne entreprise sous la direction du président Jean-Baptiste Ouédraogo est au point mort depuis le lundi 10 février. Pour cette raison : l’opposition exige de la majorité un mandat du président Blaise Compaoré. Pour en savoir davantage sur les tenants et les aboutissants de cette nouvelle donne, nous avons rencontré Me Bénéwendé Sankara, qui aborde par ailleurs la prise de bec entre lui et le médiateur en chef. C'était le mardi 11 février 2014 au siège de l'UNIR/PS sis aux 1200-Logements à Ouagadougou.
A la reprise des pourparlers pour la médiation, l’Opposition a exigé de la majorité un mandat de Blaise Compaoré. Pourquoi n’avoir pas posé ce préalable dès la première rencontre ?

• Dès le départ, il s’agissait pour l’opposition politique de prendre acte de la déclaration des médiateurs autoproclamés et de la méthodologie de travail.
Nous avons formulé des inquiétudes, à savoir que lorsqu’on va à une médiation, c’est avec des acteurs qui sont supposés être des protagonistes. Mais le compromis utile auquel nous espérons tous n’a de valeur que si les principaux intéressés s’y reconnaissent et s’engagent par ailleurs à appliquer les différentes clauses compromissoires. Pour être clair, nous avons pris note que la médiation avait identifié le problème, à savoir qu’il s’agissait du respect des dispositions constitutionnelles, en ce qui concerne l’article 37 et le Sénat. Notre inquiétude était fondée sur le fait que l’article 37, qui concerne le mandat du chef de l’Etat, ne pouvait aboutir à un compromis si le président du Faso lui-même ne prend pas d’engagement. On a été rassuré de savoir que Blaise Compaoré a été consulté et qu’il a même pris un certain nombre d’engagements qui se sont retrouvés même dans la presse. Mais plus tard, nous avons compris que ces engagements n’étaient pas formels. C’est pourquoi, à la séance du 10 février dernier, nous avons demandé que la majorité présidentielle, qui vient aux discussions avec une opposition régie par une loi, puisse à son tour s’entourer de toutes les garanties de représentativité.

Entre nous, puisque tout le monde s’accorde à dire que c’est Blaise lui-même qui a commandité cette médiation, ses représentants peuvent-ils venir sans son aval ?

• Nous ne sommes pas allés à la médiation avec des a priori. Nous y sommes allés en toute bonne foi, avec la conviction qu’on ne récuse pas une médiation en soi. On ne peut pas s’autoproclamer médiateur si on n’a pas les talents, les compétences et l’expertise nécessaires pour faire la médiation. Surtout quand il s’agit d’une crise aussi profonde que celle que connaît le Burkina Faso.
Mais c’est à la pratique qu’on peut savoir si les acteurs en présence ont cette crédibilité nécessaire et suffisante pour aboutir à un compromis.
Pour l’opposition politique, notre souhait réaffirmé et affiché, c’est qu’en 2015 nous puissions aboutir à un changement dans le respect de l’article 37 qui a été lui-même le produit d’un consensus.
Il faut aussi se rappeler que le Sénat est la résultante d’un dialogue biaisé qui n’a pas été inclusif avec la mise en place du Cadre de concertations sur les réformes politiques (CCRP), que l’opposition avait rejeté pour des raisons évidentes ; malheureusement à l'époque, ce qui intéressait le pouvoir, c'était de manipuler une partie de l'opposition pour aboutir à ses fins. La majorité présidentielle a simplement été rattrapée par son histoire.
Maintenant, s'il s'avérait que le chef de l'Etat, Blaise Compaoré, tire les ficelles de marionnettes, ça va se savoir. Cela explique davantage la justesse et la pertinence de ce que l'opposition politique a demandé, à savoir que s'il y a négociation que les négociants puissent parler au nom et pour le compte du chef de l'Etat, parce que nous pensons que tout ce que nous prendrons comme résolutions devrait pouvoir le lier.

Il semble que l'un de vos griefs est que la délégation de la majorité n'arrête pas de changer. Qu'en est-il exactement ?

• Ce n'est pas exact, c'est une mauvaise interprétation, car même au niveau de l'opposition, la délégation peut changer.
Nous avons simplement souhaité que ceux qui viennent soient suffisamment représentatifs ès qualité, car on ne va pas à une négociation de si grande importance comme à une foire.

Qu'entendez-vous par «gens suffisamment représentatifs» ?

• C'est la mauvaise lecture du paysage politique qui a bloqué la discussion, et nous n'avons pas manqué d'attirer l'attention des médiateurs là-dessus.
Par exemple, quand nous avons ouvert les travaux lundi dernier, on nous a fait comprendre qu'il y a un groupe de partis politiques qui se réclame de l'opposition mais est affilié au Front républicain.
Zéphirin Diabré n'a pas hésité à faire observer que, selon la loi, même si elle a été modifiée, c'est le chef de file de l'opposition qui est le porte-parole de l'opposition politique. Ce qui est extrêmement plus ridicule, c'est qu'Assimi Koanda, le chef de file de la majorité, a dit qu'il ne reconnaissait pas cette partie de la majorité. Nous avons fait observer que dans le gouvernement, il y a un ministre issu des refondateurs, dont le chef de file serait Hermann Yaméogo de l'UNDD, qui ne sont mêmes pas représentés.
Dès le premier jour, nous avons posé tout cela comme étant des paradigmes qui peuvent, à terme, jouer sur cette médiation parce que si nous nous retrouvons entre une majorité et une opposition avec des partis politiques qui ne s'y reconnaissent pas, quelle sera alors la valeur de ce pacte républicain que nous sommes en train d'élaborer ?
C'est pour cela que nous disons qu'il faut une bonne lecture du paysage politique burkinabè, il est difficile d'être médiateur même si on s'autoproclame.
Je ne fais pas de critique dirigée contre quelqu'un mais c'est un point de vue.
Nous n'avons pas manqué de dire qu'il faut remonter à 2011 pour savoir que c'est parce qu'on a mis au forceps un CCRP qui n'a pas fait un dialogue inclusif et qui n'a pas pris en compte les préoccupations de l'opposition qu'on s'est retrouvé dans cette situation.

Exiger ce préalable pour la poursuite de la médiation, n'est-ce pas une façon pour l'opposition d'affirmer sa mauvaise volonté ou le peu de crédit accordé à cette entreprise?
N'est-ce pas également une façon de dire que vous préférez avoir affaire à Dieu plutôt qu'à ses saints?

• Non, si tel était le cas, je pense qu’on allait tout simplement arrêter dès le début le 3 février. Nous savions dès le départ que la principale personne concernée par cette médiation est bel et bien Blaise Compaoré. Et nous avions dit au médiateur qu’au lieu de tourner en rond, pourquoi ne pas discuter directement avec lui. Parce que c’est lui qui s’entête visiblement à être chef de l’Etat après 2015. Alors que depuis 2011, nous l’avions prévenu que c’était un sursis que de rester au pouvoir jusqu’en 2015. La médiation nous a fait comprendre que c’est un choix délibéré que de vouloir discuter avec la majorité présidentielle et l’opposition, donc nous avons pris acte de cela.
Maintenant, l’intérêt, le produit fini d’une médiation concerne quelqu’un. Si cette personne dit à la fin qu’elle n’a pas mandaté l’autre partie et qu’elle ne la connaît même pas, tout le travail qui a été abattu serait dès lors inutile. Ce n’est pas un faux fuyant, c’est en toute responsabilité que nous avons simplement exigé que ceux qui sont venus négocier au nom de la majorité et qui parlent pour le compte et dans l’intérêt du chef de l’Etat puissent effectivement avoir son aval.
La majorité estime qu'exiger un document, c'est d'une part l'infantiliser et, d'autre part, que Blaise Compaoré est au-dessus des partis politiques. Qu'en dites-vous?
• Blaise Compaoré, en tant que président du Faso, est au-dessus des partis politiques, mais pas au-dessus de la loi, il n’est pas au dessus de l’article 37. S’il faut discuter aujourd’hui de l’article 37, d’un Sénat aménagé et d’une transition apaisée qui donnerait un bonus anticonstitutionnel à Blaise Compaoré, je poserais tout simplement la question : à qui profite le crime ? puisqu’il s’agit ici d’un crime contre la Constitution. Dans ces conditions, il ne faut pas jouer au larron.

Même si les discussions ne sont pas assez avancées, que pense justement l'opposition du lenga présidentiel pour permettre à Blaise Compaoré de partir honorablement?
• L’opposition dira tout simplement niet, pas question, il ne faut même pas y rêver. C’est pourquoi j’estime que jusqu’ici on n’a pas encore bien mesuré l’ampleur de la crise. Autrement dit, c’est révoltant même, c’est à la limite insultant de vouloir donner au chef de l’Etat ce lenga. Rappelez- vous qu’en 2005, je faisais partie de ceux qui ont introduit un recours contre la candidature du président Blaise Compaoré. A l’époque, le Conseil constitutionnel nous a dit que la loi n’était pas retroactive. Qui est-ce qu’on veut infantiliser en utilisant les mêmes astuces, de qui se moque-t-on en fin de compte ? Trop, c’est trop.

La médiation est donc reportée sine die et pour ne rien arranger, le lundi 10 février, à la fin de la séance, vous avez eu une prise de bec avec le président Jean-Baptiste Ouédraogo. Que s'est-il réellement passé?
• Il n’y a pas de quoi dramatiser. En réalité, je n’ai pas du tout apprécié sa façon de me bâillonner. Quand je rentrais, j’ai vu les journalistes dans la salle d’attente. Je suis resté un moment avec eux et il leur a demandé de vider les lieux tout de suite et maintenant, en tout cas, sans la manière et en m’intimant l’ordre de rejoindre illico la salle de négociations alors qu’il n’était même pas encore l’heure. En outre, les questions qui m’ont été posées étaient déjà dans la presse. Il n’y avait rien de nouveau de ce fait que je puisse révéler. J’ai estimé que la presse faisait son travail et en tant qu’acteur politique, il est normal que je réponde à ses questions et préoccupations. Vouloir nous bâillonner de cette manière, ce n’était pas correct. C’est pourquoi j’ai protesté. Il n’y avait pas un devoir de discrétion, surtout qu’au départ on ne nous a pas informés que la rencontre se déroulerait à huis clos. Par ailleurs, j’ai fait observer qu’une de vos consœurs qui est du service d’information du gouvernement (SIG) était présente. Alors que les autres organes publics ou privés n’ont pas le même privilège. Je me suis offusqué contre cela. J’ai estimé que la liberté de la presse doit être la même pour tous. Voilà, c’est tout.
Vous avez brandi sur ces entrefaites un document au médiateur en chef, lui indiquant qu’au sujet du dialogue, vous êtes beaucoup plus avancé que lui. De quel dialogue parlez-vous?
• J’avais déjà posé la problématique du dialogue sous forme de panel avec en sus, la question de la crédibilité des acteurs. Et je venais avec ce document pour lui apporter une modeste contribution. Quand l’incident s’est produit, j’ai dit que je suis venu avec le document pour qu’il puisse prendre connaissance de comment un dialogue peut se faire. Visiblement, ça ne lui a pas plu. Pourtant, j’étais passé très tôt dans la matinée au bureau pour prendre trois exemplaires à remettre aux médiateurs ; ca n’avait vraiment rien à voir avec l’incident. C’était une pure une malheureuse coïncidence.

La médiation pourra-t-elle continuer sans le mandat du président du Faso ?

• Le communiqué a renvoyé simplement la médiation à ses responsabilités. Parce que la majorité soutient que la lettre d’invitation qui a été faite par la médiation l’a été à l’endroit des partis politiques, donc elle s’en tient aux termes de cette lettre. Maintenant il appartient à la médiation de revoir sa copie d’une part et d’autre part il lui revient aussi de voir si la majorité peut se faire délivrer un mandat de représentativité, auquel cas on avisera.
Au cas échéant, c’est aux médiateurs de revoir le format de leur médiation. Qu’entend-on par médiation, quel est son contenu, il nous faut des termes de références clairs. J’ai expliqué tout à l’heure que cette médiation qui se mène entre partis politiques qui sont affiliés au chef de file de l’opposition n’engage pas tous les partis politiques, mêmes de l’opposition au regard de la nouvelle loi que la même majorité a expressément modifiée. Le pouvoir est en train de tomber dans son propre siège. Nous avons estimé ce jour- là que la majorité refermait les médiateurs autoproclamés dans une chambre dont elle détient la clé.
Si jamais le dialogue reprenait, quel amendement pouvez-vous faire au niveau de votre plateforme pour parvenir à un consensus ?

• D’abord il est important de connaître la position de l’opposition politique. Nous avons estimé que l’on ne peut pas réviser l’article 37, nous sommes contre l’institutionnalisation du Sénat, et on n’a pas besoin d’organiser un référendum pour modifier l’article 37. Sur ces trois points, qui sont en réalité liés, nous étions plus ou moins d’accord avec la médiation sur le point de dire qu’on ne va modifier l’article 37. Si la médiation avait continué sur ce terrain, en tout cas à notre niveau on ne se ferait plus d’illusions. Maintenant, pour le Sénat, l’opposition politique n’est pas comptable de cela. C’est une recommandation du CCRP qu’on a appliquée, l’opposition politique n’est pas liée par ce Sénat. Le référendum nous avons dit que c’est inutile. On ne voit pas sa pertinence. Mais si en revanche et a contrario, les médiateurs, la majorité ou le chef de l’Etat ont des propositions, nous, nous ne souhaitons pas au niveau de l’opposition politique basculer dans une crise profonde. Je ne pense pas personnellement qu’une crise puisse survenir parce que quelqu’un veut rester au pouvoir à vie. S’il veut respecter la Constitution, tant mieux. Mais est-ce qu’on peut négocier avec la loi ou tricher avec elle ? Je ne pense pas que cette situation soit normale, parce que le chef de l’Etat, en tant que garant de la Constitution, en 2010, il s’est fait élire pour la énième fois même si c’était avec une carte électorale bidon, illégale, et il a juré de respecter et de faire respecter la Constitution. Il ne peut donc pas aujourd’hui négocier sinon tricher avec cette même loi fondamentale, c’est ridicule. Maintenant s’il a autre chose à négocier, on peut l’écouter.
Ce que je ne vous ai pas dit, c’est qu’en lisant tous les documents dès les premiers jours, on a vu qu'il parle d’amnistie à profusion. Et il cite un activiste des droits humains qui dit chaque fois que dans une médiation, il faut toujours accepter le pardon et l’amnistie. Est-ce que, derrière tout ça, il n’y a pas d’autres éléments qui l’intéressent dans le cadre de ce qu’il a appelé : «une porte de sortie honorable». ? On aurait pu d’ailleurs donner un contenu à cela. On ne peut pas aller à une médiation en étant animé de mauvaise foi et dans la duplicité. C’est pourquoi j’ai donné le document en disant que dans toute médiation il faut une bonne foi et de la crédibilité. Et ces termes viennent de Mgr Anselme Sanou, ancien archevêque de Bobo-Dioulasso qui était le président du Collège de sages. Et comme ces médiateurs autoproclamés disent qu’ils proviennent de ce collège de sages, j’ai voulu simplement rappeler à leurs bons vieux souvenirs les principes sur lesquels on peut faire une bonne médiation. On se rend compte que quelque part il y en a qui veulent jouer aux larrons.

Comment tout cela va-t-il finir, selon vous ?

• Mon souhait le plus sincère est qu’on ne traumatise pas le peuple burkinabé avec cette idée qui veut qu’en 2015 coûte que coûte soit Blaise reste, soit on bascule dans la violence. Le président du Faso doit comprendre qu’il a fait ce qu’il a pu et que, désormais, il doit assumer son histoire et la regarder en officier et en tant qu'homme d’Etat.

Adama Damiss Ouédraogo
&
Jean Stéphane Ouédraogo

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