n’est à négliger pour l’analyse de la situation socio-politique. Sur la question de la médiation interne, continuent de couler beaucoup d’encre et salive. Au nombre des détracteurs de la médiation, le président du Rassemblement patriotique du Faso, Abraham Nignan, qualifie simplement l’initiative de ‘’poudre aux yeux’’. Pourtant, il s’est dit favorable à une transition apaisée, avec pour conséquence le report des élections a 2017. A lire dans cette interview réalisée le 5 janvier 2014.
Le Quotidien : Sur le vif de l’actualité, comment avez-vous accueilli l’offre de médiation de l’ancien chef d’Etat, Jean Baptiste Ouédraogo, et ses acolytes ?
Abraham Nignan dit le général, président du rassemblement patriotique du Faso :
Cette médiation est comme un médecin après la mort. Elle va aboutir à quoi ? C’est vrai tout Burkinabè a le droit et le devoir de participer a la paix et a la tranquillité de son pays. Mais je pense que cette médiation n’est pas la bienvenue, il y a des problèmes clés. Nous l’avons toujours affirmé, nous, nous voyons plus loin que notre nez, nous avons une vision.
Tout le monde sait qu’il n’y aura pas d’élection en 2015. Alors comme il y a beaucoup de problèmes à aborder avant d’aller aux élections, qu’est-ce qu’il faut faire ? Au niveau du rassemblement patriotique du Faso, nous sommes convaincus que l’article 37 ne sera pas modifié et que le Sénat ne sera pas mis en place. Ces gens sont venus jouer un rôle que vous allez voir les jours qui viennent. Ces gens sont venus faire du cinéma. Le parti au pouvoir veut ramener les élections en 2017.
Il ressort des proposition, une transition après l’échéance du mandat présidentiel en 2015 qui devra être conduite par un comité. Qui peut être le président d’un tel comité ?
Il n’y aura pas de comité de transition. En fait, le parti au pouvoir veut amener l’adoption d’une nouvelle Constitution qui serait acceptée par tous les Burkinabé. C’est leur plan comme ca et vous le verrez. Mais je dis que les mandats présidentiels, législatifs et municipaux doivent prendre fin au même moment.
Si moi je suis élu président qu’est ce que je vais faire avec un maire CDP auquel je n’ai pas confiance ou les députés CDP qui sont a l’Assemblée nationale ? Je vais faire quoi avec des gens comme ca ? C’est pourquoi j’avais préconisé en 2005 de ne pas organiser les élections couplées et de faire de telle sorte que la fin du mandat présidentiel coïncide avec celui des mandats législatifs et municipaux. Je pense que Blaise Compaoré doit partir avec tous ses hommes, sinon le nouveau président aura tous les problèmes.
Mais, ces élus dont vous parlez ont été élus sous la bannière du CDP et non au nom du seul président Blaise Compaoré ?
Mais le CDP, c’est Blaise Compaoré. Et ces gens sont élus sous la bannière du CDP. Je dis qu’aucun parti politique ne peut battre campagne avec moi. Ce parti n’existe pas encore. Mais par modestie, nous sommes restés dans l’ombre. C’est le seul parti au Burkina qui a les mains propres. En 2005, j’ai été le premier à affirmer que le pays est malade et qu’il faut qu’on trouve un remède.
Dans un des communiqués de la médiation, il ressort que le chef de l’Etat prône le retour à la stipulation de l’article 37 en sa formule de 1992, c’est-à-dire 2 mandats de 7 ans et l’impossibilité de se pourvoir successivement après les deux mandats. Est-ce que vous approuvez une telle proposition ?
C’est pourquoi je vous ai dit que c’est une médiation fabriquée par le régime en place. Ces gens- la sont des missionnaires de Blaise Compaoré. Nous nous n’attendons rien de cette médiation, c’est de la poudre aux yeux. Nous demandons au peuple burkinabé de rester toujours serein. Aujourd’hui, le Burkina Faso a besoin d’une nouvelle Constitution. La Constitution actuelle du Burkina est un testament de Blaise Compaoré. Il l’a rangée dans une valise et la sort quand il veut pour la modifier. On appelle ca, testament.
Cette constitution ne peut pas amener l’alternance, ce n’est pas possible. C’est une constitution qui te permet d’aller de l’avant et si ca ne t’arrange pas, tu reviens en arrière. Aujourd’hui il s’agit de se demander si nous voulons le changement. Si oui, l’a veut-t-on dans l’insécurité ? Si nous voulons l’alternance pacifique, il faut composer avec celui qui est le poison du Burkina. Je le dis et le répète, le régime Compaoré est un poison pour la nation burkinabé.
La Côte d’Ivoire entend faire bon office dans la recherche de solution, comment vous appréciez le fait que c’est au niveau de la lagune ébriée que les acteurs partent chercher la solution ?
Tous ceux qui vont la- bas c’est pour manger de l’attiéké et de l’aloco avant de venir. Si vous ne me voyez pas parmi un groupe c’est que ce groupe ne cherche pas l’intérêt du peuple. Le jour que vous allez me voir avec un groupe politique, c’est que c’est du sérieux. Si vous me voyez un jour parmi ce groupe en Cote d’Ivoire, c’est que c’est bon.
Si vous ne me voyez pas la -bas comprenez que c’est du tourisme qu’ils sont allés faire. Le problème est simple et nous pouvons trouver la solution ici. Ce n’est pas la peine de gaspiller de l’énergie pour se rendre en Cote d’Ivoire. On va aller chercher une médiation par rapport à quoi ? Blaise ne va pas modifier la Constitution ni mettre en place le Sénat, il est juste en train de perdre le temps. Il laisse les gens se gripper sur des problèmes qui n’existent pas, pendant qu’il prépare une surprise.
Avec les démissions au sein du parti au pouvoir et l’avènement du MPP, ne craignez- vous pas que tous vos militants soient phagocytés et que vous n’ayez plus droit de cité sur l’arène politique burkinabé ?
Pour un vrai parti politique, il s’agit de mieux se faire connaitre par ceux qui vont te porter au pouvoir et non pas par tout le peuple. Nous nous construisons dans l’ombre un parti politique depuis 10 ans. Même si le président actuel que je suis, ne devient pas président, un de la génération future peut s’appuyer sur ce qui a été déjà fait pour devenir président. Nous ne faisons pas la course au pouvoir. Pour le moment, nous sommes le seul parti politique à ne pas bénéficier de la subvention de l’Etat et à ne pas légitimer le pouvoir de Blaise Compaoré.
Est-ce que vous avez pris part à la marche de l’opposition politique contre la révision de l’article 37 de la Constitution et la mise en place du Sénat ?
Nous avons participé à la marche mais, moi, je n’y étais pas personnellement. Je pense que les gens vont trop vite en besogne. Tant que les actions ne seront pas sincères, moi, je n’irai pas là-bas. Je me rappelle que Blaise Compaoré a rencontré l’opposition et le Chef de file de l’opposition. Mais avant de partir à cette rencontre avec le chef de l’Etat, le Chef de file de l’opposition devait organiser un meeting pour demander le consentement du peuple par rapport a une telle rencontre. Tout ce qui se passe, c’est du cinéma.
On a l’impression que vous menez la bataille seule, ne craignez-vous pas d’être éclipsé à l’heure où on vit la guerre des taureaux ?
Je n’ai jamais été affilié au Chef de file de l’opposition, puisque c’est une institution fabriquée par le régime et qu’il veut le découper, il est en train même de le découper. Je vais m’affilier au Chef de file de l’opposition pour faire quoi ? C’est Roch Marc Christian Kaboré qui a fabriqué ca, même si ca existait depuis longtemps.
Et les fonds mis à la disposition du Chef de file de l’opposition, ca sert à quoi? Tous ces partis qui ont bénéficié de ses fonds rendront compte au peuple un jour. Ce sont des corrompus. On a tantôt accusé Laurent Bado d’être corrompu parce qu’il a reçu de l’argent. Et ces partis politiques qui prennent des subventions participent à une corruption légitimée. Pourquoi les gens n’en parlent pas. Je ne ferai pas partie d’un groupe de n’importe quoi ?
La configuration du MPP ne semble pas vous inquiétez, alors même que vous en connaissez les ténors.
Je n’attends rien de ces gens- la, parce que ce ne sont pas des gens sérieux. Ce sont des faux maçons que nous avons vu au pied du mur auparavant. Je ne m’oppose pas à ce que quelqu’un quitte mon parti pour aller créer un autre parti. Mais il ne faut pas cautionner ce qui n’est pas normal. Je n’aime pas la trahison ni l’hypocrisie, ce sont des égoïstes. S’ils étaient conséquents, ils auraient rallié un autre parti déjà existant. Ils ne sont pas rassasiés, ils veulent toujours profiter. Ils n’ont pas de service nouveau à proposer au peuple.
Les jours à venir si nous devrons les rencontrer nous les rencontrerons comme des adversaires. Je n’attends rien de ces trois personnes. La démocratie et l’alternance ne viendront pas de ces trois personnes. Le groupe qui est arrivé avec Blaise en 87 a failli à son devoir vis-à-vis du peuple. Ce sont des gens corrompus qui ne connaissent pas la réalité du peuple.
Il ne s’agit pas de pleuvoir simplement de critiques, il faut aussi proposer. Qu’est-ce que le RPF propose ?
Il faut d’abord travailler à adopter une nouvelle Constitution acceptée par tout le monde. Ensuite, il faut repousser les élections présidentielles en 2017, en maintenant exceptionnellement le président actuel au pouvoir pendant cette période de transition. Pourquoi ? Il faut terminer ensemble les mandats présidentiel, législatif et municipal. C’est la seule manière d’éviter une grave crise au Burkina. Puisque Blaise est devenu un poison, si nous voulons forcer, on va tomber dans une crise. Donc, il faut le consentement de nos ennemis pour permettre une alternance apaisée.
Au terme de cette interview, c’est l’occasion pour vous d’aborder d’éventuels aspects que nous n’avons pas pu évoquer ?
Je remercie le Journal Le quotidien qui est lu par des milliers de Burkinabé. Continuer votre travail, nous vous soutenons. En faisant votre travail, vous rendez service aussi a la nation et a l’opinion nationale. Je souhaite au journal une bonne année. Que cette année soit une bonne année pour le journal et son personnel.
