oseph Tûwêndyam NIKIEMA estime, dans l’opinion qui suit, qu’il ne faut pas exclure que les démissionnaires du CDP l’aient fait réellement par conviction. Il partage la conviction du journaliste Norbert Zongo que la vraie opposition viendra du parti au pouvoir lui-même et émet la possibilité que ces démissions peuvent ne pas être une manoeuvre du « boss », c’est-à-dire Blaise Compaoré.
Certains Burkinabè désirent le changement de toutes leurs tripes, mais n’arrivent pas à croire que cela est possible. Une fois de plus cela montre à quel point ce régime a réussi à ôter de nos esprits le minuscule espoir de voir un jour une autre tête à la magistrature suprême.
On entend ça et là, « mon frère, attention, c’est une manœuvre du « boss », « le gars va descendre mais il va gouverner dans l’ombre ».
Blaise COMPAORE aura réussi inéluctablement à imposer une forte et intense présence de sa personne. L’homme est quasiment considéré comme le dieu sur terre par un grand nombre de nos concitoyens.
Il fait peur et surtout donne l’impression de toujours maîtriser la situation.
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On ne peut lui enlever cependant l’énorme prouesse d’avoir conservé le pouvoir et surtout d’avoir réussi, tant bien que mal, à gérer des égos pendant 27 ans et peu importe les voies et les moyens qu’il a utilisés.
Notons que même la gestion aussi prolongée d’une toute petite association relève parfois de l’exploit. Pourtant chers concitoyens, Blaise COMPAORE n’est qu’un homme ; eh oui il ne maîtrise pas toujours tout; mieux encore, au Burkina il existe des fils et filles capables de le défier et de claquer la porte à son régime, sans que cela ne soit une orchestration du grand et « suprême » guide Blaise COMPAORE.
« Chacun de ces hommes, au moins une fois chaque matin en se rasant, a pensé à son envie d’être président du Burkina Faso un jour »
Il est important de rappeler que les trois têtes démissionnaires et leurs amis sont pour la plupart ceux qui ont été mis sur le bas côté de la route à un moment donné de leur carrière politique. Quoi de plus révolté qu’un homme déchu, un homme qui était au sommet et qui n’y est plus ? Qu’est ce qui naît dans ces cas-là ? De l’amertume puis l’envie de revenir aux affaires par tous les moyens.
Rock Marc Christian KABORE, Salif DIALLO et Simon COMPAORE, entre autres, sont des hommes politiques puissants, ayant une base électorale solide et très importante.
Ces hommes, bien qu’étant issus du régime combattu par l’opposition, ont incontestablement une grande expérience des affaires politiques. Peut-on enlever à ces hommes des ambitions politiques ? Peut-on leur enlever ce sentiment égoïste d’accomplissement personnel ?
Même si un jour l’un de ces démissionnaires, Simon COMPAORE, a répondu « qui est fou ? » aux demandes de supporters lui disant de créer son parti lors de sa mise à l’écart, je suis persuadé que depuis des années déjà, chacun de ces hommes, au moins une fois chaque matin en se rasant, a pensé à son envie d’être président du Burkina Faso un jour.
Nous allons tenter encore une fois de plus de balayer l’idée selon laquelle ces démissions seraient une manœuvre du grand et super cerveau Blaise COMPAORE. Faut-il rappeler aux sceptiques que déjà depuis l’Autriche, Salif DIALLO défiait la majorité en proposant, dans une interview accordée à l’Observateur Paalga, dans son édition du mercredi 8 juillet 2009, une dissolution de l’Assemblée Nationale et une mise en place d’un régime parlementaire au BURKINA ?
Il fut d’ailleurs suspendu des instances suprêmes du parti le 17 juillet 2009, pour avoir osé dire ce qu’il pensait.
Qu’on le veuille ou non c’est un grand acteur de la scène politique burkinabè. Pour les sceptiques, cela faisait-il partie déjà des prémices de cette superbe manœuvre que l’on voit prendre forme aujourd’hui en 2014 ?
« Ne posséderaient-ils pas eux aussi des dossiers hautement plus compromettants pour le « BOSS » et la IVe République ? »
On entend aussi ça et là que ces ténors démissionnaires ne peuvent pas le faire sans la bénédiction du « BOSS », car ce dernier tiendrait des dossiers compromettants les concernant ; Ces derniers donc ne posséderaient pas eux aussi des dossiers hautement plus compromettants pour le « BOSS » et la IVe République ? Je pense qu’ils se tiennent comme on dirait vulgairement par « les couilles ».
Quel est l’intérêt pour Blaise COMPAORE de désorganiser son parti de la sorte ? Renforcer l’opposition ? Serait-il devenu fou ?
Les sceptiques disent que cette superbe et ingénieuse manœuvre désorganiserait l’opposition baignant déjà dans des difficultés d’organisation.
Donc le BOSS qui a en face de lui une opposition désorganisée ou en cours d’organisation a décidé de prendre le risque de « désorganiser » son parti pour « désorganiser » une opposition déjà « désorganisée ». Une manœuvre incroyablement « intelligente » de sa part.
Il faut être optimiste et mettre de côté les grandes théories de complots. Oui, je souhaite être naïf et optimiste et croire que c’est possible aussi dans mon très cher pays le Burkina Faso qu’un parti majoritaire aux commandes depuis plus d’un quart de siècle s’écroule et laisse la place à un autre parti, à d’autres hommes.
« La roue tourne et il faut l’accepter »
Et que l’alternance tant voulue s’accomplisse. Que des prémices démocratiques commencent à s’installer, qu’un processus de réel changement s’amorce.
Si de grands empires comme celui des Ottomans se sont écroulés, des grandes civilisations comme celles des Incas ont disparu, le puissant et gigantesque ancien Empire Egyptien n’est plus, des monarchies qui ont régné durant des siècles ont chuté, personne ne peut m’empêcher, malgré les théories les plus tordues et farfelues, de croire que le CDP aussi peut disparaître.
Ça ne sera ni la première fois et ni la dernière dans ce monde que cela arriverait. La roue tourne et il faut l’accepter.
Oui au Burkina Faso aussi il est possible de voir des ténors du CDP quitter le navire, pour des raisons tout simplement d’ambition politique ou encore personnelle.
Blaise COMPAORE et sa famille ne sont pas les seuls à en avoir ; l’opposition en a, des « cédépistes ou ex-cédépistes » en ont aussi.
« Ces hommes savent qu’ils sont puissants, influents, écoutés, qu’ils ont des réseaux internationaux ; il serait idiot de ne pas se prendre en main pour la conquête du pouvoir »
L’ambition politique est un élément hautement important pouvant déterminer l’action d’un homme que les sceptiques négligent. Je n’ai pas besoin de vous rappeler que cette fameuse ambition politique a transformé plus d’un en traître, et pire encore, en assassin.
Ces hommes savent qu’ils sont puissants, influents, écoutés, qu’ils ont des réseaux internationaux ; il serait idiot de ne pas se prendre en main pour la conquête du pouvoir.
On a ici juste une toute petite dose de désaccord entre des hommes forts additionnée à une énorme dose d’ambition politique. Cette addition donne pour résultat un divorce politique.
Un divorce comme il y’en a eu dans d’autres pays. Norbert ZONGO a dit de son vivant que la vraie opposition viendrait du CDP lui-même.
Maintenant, ces démissionnaires sont-ils différents de ceux qui sont aux affaires, ayant été eux-mêmes aux affaires ? Ces démissionnaires seront-ils des opposants dans tous les sens du terme ? Observons et attendons de voir. Wait and see !