La nouvelle est tombée, le dimanche 5 janvier dernier, comme une bombe. En effet, 75 des membres les plus influents du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP), dont l’ex-président du parti et ex-président de l’Assemblée nationale, Roch Marc Christian Kaboré, l’ex-ministre de l’Agriculture, Salif Diallo, l’ex-maire de la commune de Ouagadougou, Simon Compaoré, et d’autres anciens ministres et présidents d’institutions, viennent, par le biais d’un communiqué de presse, annoncer leur démission du parti qu’il avaient pourtant contribué à bâtir depuis près de 2 décennies. Des démissions qui ont été suivies, dans les 48 heures, par d’autres, notamment dans les provinces du Yatenga et de la Comoé.
La raison évoquée par les “démissionnaires“ : le manque de démocratie au sein du parti, la mise en place du Sénat et la sempiternelle question de la révision de l’article 37 de la Constitution relatif à la limitation des mandats présidentiels. Le jour suivant, le secrétariat exécutif national du parti de l’épi et de la daba, expliquait, à son tour, les raisons de ces démissions par le fait que les camarades en question ils ne disposaient plus d’“un espace pour faire aboutir coûte que coûte leurs ambitions personnelles“. Cependant, le constat est que le divorce est désormais consommé entre le SEN et les “démissionnaires“. Le dialogue n’aura finalement pas porté fruit, a-t-on été forcé de constater.
Et ces départs, aussi minimes soient-ils –“seulement 75 sur 600 membres du bureau politique national“-, ont porté et porteront, à n’en point douter un coup dur au méga parti, ne serait-ce que dans l’optique des échéances électorales futures. Cela même si, dans la foulée, un certain nombre de partis politiques proches du pouvoir ont réaffirmé leur fidélité au président du Faso et à sa politique.
Ces démissions, qui interviennent, à seulement quelques mois de 2015, année dite de tous les dangers, sonnent comme un avertissement de plus pour le président du Faso. D’autant que ce dernier, dans la bataille qui l’attend dans l’optique de la révision de l’article 37 de la loi fondamentale, aura certainement besoin, auprès de lui, de tous ses fidèles lieutenants.
Il y a péril en la demeure, serait-on tenté de dire ! Surtout qu’il y a de très fortes chances que ceux que l’on désigne désormais par le vocable “démissionnaires“ pourraient, selon toute vraisemblance, rejoindre les rangs de l’opposition. Une opposition qui s’était, depuis plusieurs mois déjà, farouchement opposée à certaines actions, notamment la mise en place du Sénat et la révision de l’article 37. C’est donc peu dire que d’affirmer qu’opposants et “démissionnaires“ ont désormais une cause, une lutte communes.
De ce fait, persister dans ces projets pourrait s’avérer incendiaire pour le parti majoritaire, vu que du côté de l’opposition, l’on n’envisage nullement de laisser faire les choses. L’on s’acheminerait inéluctablement vers une crise, un chaos. Le mieux serait, et cela est valable, pour toutes les parties, privilégier le dialogue et la concertation, dans l’intérêt suprême du peuple et de la Nation.
A ce propos, le monde diplomatique accrédité au Burkina et les représentants des organisations internationales et interafricaines avaient, lors de la traditionnelle cérémonie de présentation de vœux au président du Faso, le 7 janvier dernier, “encouragé le président du Faso à cultiver le dialogue national et à consolider les concertations pour préserver la paix sociale“. Des conseils ou exhortations –c’est selon-, qui sont plus que jamais à prendre au sérieux, aussi bien au regard de la période –un an de la prochaine présidentielle-, de la situation politique actuelle que de la “qualité“ des “conseillers“. En effet, nul n’ignore que, même s’ils feignent le plus souvent de ne rien voir ni entendre, ces derniers sont généralement très bien informés. Ainsi, ces conseils sont à écouter, cette fois, encore plus que d’habitude, dans la mesure où l’échec des précédents rencontres et dialogues avait failli plonger le pays dans une crise qui a, heureusement, été évitée de justesse.
C’est donc dire que le moment est venu pour les uns et les autres, un peu plus au sein du parti au pouvoir et du président du Faso, de mettre chacun un peu d’eau dans son vin et de donner une ultime chance au dialogue, en vue d’aboutir à des concessions. Dialogue au cours duquel ne devrait primer que l’intérêt suprême du peuple et l’avenir du pays des hommes intègres, plus que les intérêts personnels .