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Le Pays N° 5508 du 20/12/2013

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Modification du statut de l’opposition politique : là où le pouvoir conduit le Burkina
Publié le vendredi 20 decembre 2013   |  Le Pays


Assemblée
© aOuaga.com par A. Ouedraogo
Assemblée Nationale du Burkina : Entré parlementaire 2013
Mercredi 06 mars 2013. Ouagadougou.Ouverture de la première session de la 5ème législature


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Depuis le 17 décembre, de nouveau, la scène politique nationale est devenue grouillante.Le Parlement burkinabè, dominé par le parti majoritaire, le CDP, et son allié l’ADF/RDA, vient de voter, à une écrasante majorité, la modification de « la loi portant statut de l’opposition politique » au Burkina Faso.Pour quelles raisons ?Selon les promoteurs et les défenseurs de cette initiative politique, il s’agit de « renforcer le processus démocratique », de « consolider la stabilité politique et la paix sociale », de clarifier, en quelque sorte, « le statut d’opposant ».A première vue, le peuple burkinabè, qui a consenti tant de sacrifices pour l’avènement de l’ordre démocratique, ne peut que s’en réjouir.En vérité, la démarche du pouvoir vise à « cannibaliser » toute opposition véritable, forte, dynamique et crédible au Burkina Faso

Pourtant, derrière les raisons avancées par les tenants du régime en place, une seule explication vient à l’esprit des Burkinabè : la modification programmée de l’article 37 de la Constitution. Mais oui, disent les Burkinabè, en modifiant le statut de l’opposition, il n’y a plus aucun doute, le pouvoir en place entend d’abord s’assurer une durée permanente. Politiquement, il y a quelque chose d’effrayant dans cette démarche du pouvoir, puisqu’il cherche à faire le bonheur de l’opposition à sa propre place. Désormais, c’est le pouvoir en place qui déterminera qui est opposant politique au Burkina. Sinon, que viendrait chercher dans un gouvernement, quelqu’un qui s’oppose à sa politique et qui vise à provoquer « l’alternance » démocratique ? En vérité, la démarche du pouvoir vise à « cannibaliser » toute opposition véritable, forte, dynamique et crédible au Burkina Faso. Or, une opposition forte et crédible constitue un élément essentiel d’une démocratie vivante, réelle et viable. Si on lui refuse le droit de remplir sa mission, le Burkina retombera à coup sûr dans « le parti unique ». D’ailleurs, certains esprits cherchent à faire de ce pays, un « Etat partisan », en cultivant, avec cynisme, la confusion de l’Etat et d’un parti. Comme l’a si bien relevé Raymond Aron, « la technique démocratique tend à la pluralité aussi naturellement que la technique totalitaire à l’uniformité ». La modification de la loi portant modification du statut de l’opposition constitue, qu’on le veuille ou non, une aberration politique s’expliquant par l’influence de méthodes crypto-totalitaires au sein du parti majoritaire. Soulignons qu’au sein de cet appareil politique, le moindre signe d’indépendance morale, intellectuelle, suffit à vous rendre suspect, à vous étiqueter comme traître. C’est pourquoi, contraints de mentir pour justifier cette modification, certains ténors du CDP se sentent même obligés de mentir pour protéger leurs propres mensonges. Quelle absurdité ! En règle générale, c’est la marque de gens qui manquent totalement de courage politique, et surtout de confiance en eux-mêmes, et qu’ils déguisent dédaigneusement en moqueries et ricanements. Pour de tels individus, la démocratie est une escroquerie politique, et il faut tout entreprendre pour ridiculiser, voire mépriser toute idée d’opposition réelle. Au Burkina Faso, politiquement, quelque chose a changé depuis l’irruption déroutante de l’Union pour le progrès et le changement (UPC) dans le débat politique national. Avec ce leader d’envergure, qui réussit à mobiliser massivement une bonne partie du peuple burkinabè, autour de mots d’ordre pertinents et rassembleurs, on constate qu’une nouvelle opposition réussit à se dresser pour tenir tête au pouvoir en place. Et soudainement, le sol s’est mis à trembler sous les pieds des partisans du pouvoir en place, surtout que certains anciens barons du parti majoritaire demeurent souterrains, cachés.

En démocratie, il n’existe ni homme éternel, ni homme providentiel

Très sérieusement, la modification de cette loi est et reste une démarche politique absolument stupéfiante, voire une régression démocratique inutile pour le Burkina. Tout indique que le pouvoir cherche à transformer politiquement ce pays en un « no man’s land ». Car, il s’agit d’une voie facile qu’emprunte le pouvoir, en modifiant ce statut de l’opposition pour condamner à l’errance, au silence, et à l’impuissance politique, ceux et celles qu’il ne veulent ni écouter ni comprendre. Il convient de déchiffrer l’avenir politique de ce pays à la lumière des expériences politiques récentes de certains pays de la sous-région. Par exemple, le Mali n’arrive toujours pas à se remettre politiquement des dégâts de la « démocratie consensuelle » sous le régime ATT. Si l’unique but de la modification de cette loi vise à modifier l’article 37 de la Constitution comme le pensent de plus en plus la plupart des Burkinabè (à commencer par les partisans du régime en place), n’oublions pas cette loi historique : ce sont toujours « les fautes politiques » qui préparent la décadence des Etats et des nations. Or, malheureusement, la culture politique des élites qui nous gouvernent se réduit de jour en jour à l’art de manier et de manipuler, cyniquement, les mots et les textes. Eveillés à la vie démocratique, les Burkinabè souhaitent l’instauration d’une vraie démocratie parlementaire, reposant sur l’alternance des partis au pouvoir et comme unique moyen de sauvegarde et de préservation de la paix sociale. La démocratie signifie avant tout « le respect de l’opposition », car sans un tel respect, elle devient elle-même inconcevable. Il est encore temps, pour le pouvoir en place, de renoncer à poursuivre ses « guerres politiques » de position et d’épuisement contre l’opposition politique. En démocratie, il n’existe ni homme éternel, ni homme providentiel. A l’heure actuelle, le peuple burkinabè vit dans l’angoisse, l’inquiétude et la tension, bien qu’il nourrisse toujours le rêve de vivre dans un système démocratique efficace et solide, en vue d’assurer son épanouissement et d’atteindre la prospérité économique et matérielle. Avec la modification de cette loi portant modification du statut de l’opposition, les Burkinabè s’interrogent et cherchent désespérément l’horizon vers lequel le pouvoir actuel entend les mener. Sur leurs lèvres, on entend répéter cette question obsidionale : qu’adviendra-t-il de ce pays d’ici à 2015 ?
Décidément, là où le pouvoir conduit le Burkina, ressemble de plus en plus à « une terre inconnue ». Et, il ne sert à rien de se draper dans un voile pseudo-démocratique pour lever cette équivoque. Qu’on le veuille ou non, le pays des Hommes intègres fait la terrible expérience de ce que nous nommerons « la politique du mystère ». Et c’est elle qui sécrète et nourrit la déréliction collective. Comment la conjurer ? Mystère ! C’est atterrant. Pourtant, rien ne condamne ce merveilleux pays à trouver la bonne voie. Et, si le pire survenait (ce que personne ne souhaite), il faudrait savoir que le pouvoir et l’opposition descendraient dans la même fosse politique.

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