La ville de Kidal continue de concentrer en elle les deux plaies du Mali contre lesquelles l’Afrique s’est mobilisée ces derniers mois : le séparatisme touareg et le terrorisme islamiste. Se relayant pour mener la vie dure aux forces de la paix, les délégitimer et retarder le plus possible la restauration de l’autorité de l’Etat, Touareg et djihadistes alternent leurs actions de déstabilisation.
Le 14 décembre dernier, ce sont les barbus qui, dans un attentat, ont semé le chaos et la mort. Bilan : deux casques bleus sénégalais tués. C’est un coup dur pour le Sénégal et l’ONU. Mais les djihadistes veulent surtout, à travers cette action, prouver qu’ils existent toujours et qu’il faudra compter sur eux pour pourrir la vie des forces de paix. Ils ne peuvent plus reconquérir leur « islamoland » perdu, mais ils détiennent toujours un pouvoir de nuisance dont ils useront jusqu’au dernier souffle. Ils ont pour cela un allié de taille : le Mouvement national de libération de l’Azawad. En rendant en effet Kidal ingouvernable, le MNLA facilite les actions terroristes des islamo-gangsters d’AQMI (Al-qaida au Maghreb islamique). On peut même parler d’associés du mal, en ce qui concerne le MNLA et AQMI, tant les deux mouvements rivalisent d’actes de malveillance.
Il faudra dès lors commencer sérieusement à se poser des questions sur le traitement approprié à apporter au cas MNLA. La stratégie du dialogue avec ce mouvement, privilégiée jusque-là sous l’injonction de la France, a montré ses limites.
Elle a remis le MNLA dans le jeu politique et même militaire, alors qu’il avait été pulvérisé d’abord par les djihadistes, puis par l’opération de reconquête du Nord. La France a décidé pour des raisons dont elle seule a le secret, de chouchouter, de dorloter et couver le MNLA. Du coup, le mouvement s’est ragaillardi et s’est cru incontournable dans le retour à la normale à Kidal sous l’autorité de Bamako. Il a de ce fait multiplié les actes de défiance, dont le principal est le refus de cantonner ses troupes. Ce désordre ainsi créé fait le lit –et l’ONU vient de le constater de la façon la plus amère- de toutes les dérives : enlèvements et assassinats, attentats, accrochages, etc.
En fait, le MNLA, à défaut de pouvoir imposer son imperium sur Kidal et d’en faire sa capitale, a choisi la politique du pire. Et à l’allure où vont les choses, l’enjeu de Kidal ne sera plus seulement celui de rétablir l’Etat malien dans ses droits. Il sera aussi hautement sécuritaire. En effet, Kidal est en passe de devenir le nouveau point d’appui des terroristes pour leurs basses œuvres tant dans l’extrême nord malien, que vers d’autres régions. Au lieu de constituer un verrou contre les extrémistes, cette ville deviendrait au contraire un sanctuaire et un tremplin pour les djihadistes. Voilà le danger qui menace Kidal.
Peut-on lier l’attentat de Kidal au second tour des élections législatives ? Pas forcément. Car les quatre députés de la ville et de sa région ont été élus dès le premier tour du 24 novembre. L’objectif des djihadistes n’est donc pas de saboter une quelconque élection.
Par contre, ils peuvent avoir voulu réagir à la vaste opération anti-terroriste lancée il y a quelques jours par l’armée française qui a permis d’éliminer 19 djihadistes. Au-delà, l’attentat de Kidal s’inscrit dans une vaste entreprise de déstabilisation du Mali. La menace planera donc toujours sur les forces de paix tant que le Mali n’aura pas été, totalement, désinfecté de la peste islamiste. Elections ou pas, les djihadistes ne baisseront donc jamais les bras.
C’est pourquoi la vigilance ne doit guère baisser. Mieux, le cas de Kidal devrait être traité avec la plus grande rigueur pour éviter que tout le travail de pacification abattu tombe à l’eau. Kidal est de plus en plus gangrené par le cancer islamo-séparatiste et seul un traitement de choc peut l’en débarrasser .