Dori a eu son 11-Décembre. Mais comme dans les chefs-lieux de région précédents qui ont eu le privilège d’accueillir la commémoration de la fête de l’indépendance, il restera un arrière-goût amer d’inachevé. Il y a eu bien sûr des réalisations au profit de la ville (quelques kilomètres de routes bitumées, construction d’une salle polyvalente, adduction en eau potable). Au total, le bilan provisoire fait état de 15 milliards de FCFA injectés dans la ville, y compris l’organisation des festivités. Beaucoup d’argent a donc été dépensé pour le 11- Décembre à Dori, capitale de la région du Sahel. La question est de savoir si les populations dans leur ensemble vont réellement profiter de cette manne. D’abord, l’éternel problème demeure la nature des projets réalisés. Les populations sont-elles impliquées dans l’élaboration des besoins de la ville hôte des festivités du 11-Décembre ? Car on voit bien que des projets structurants appelés à créer des emplois durables et à booster l’économie locale, font défaut. Les infrastructures sociales ne semblent pas non plus faire partie des priorités de la commémoration tournante de la fête de l’indépendance. Le gouvernement donne l’impression de surtout mettre l’accent sur les villas. Ces résidences de haut standing donneront certes une certaine allure à la ville, mais leur utilité immédiate demeure incertaine. Ce dont nos populations ont le plus besoin, à l’occasion de moments aussi forts et inoubliables, ce sont des projets à même de les sortir de leur situation de pauvreté. Et selon les potentialités de chaque région, quelque chose devait être fait dans ce sens. Ce n’est malheureusement pas le cas. De plus, les projets réalisés le sont dans l’urgence, ce qui pose le problème de leur pérennité.
L’autre risque qui menace la crédibilité du 11-Décembre, belle occasion de retrouvailles par excellence s’il en est, c’est le gaspillage. Pour certains, cette manifestation est une nouvelle caverne d’Ali Baba, un nouveau moyen d’enrichissement. Alors que le bénévolat et le sens du bien public devaient être la boussole de tous les intervenants, beaucoup au contraire voient en cette commémoration l’heure pour eux de faire pousser leur ventre et leur mur. Il y a donc maldonne dans la conception que nombre de Burkinabè, surtout ceux impliqués dans son organisation, ont du 11-Décembre. Le civisme auquel les dirigeants appellent de tous leurs voeux, et qui est même le thème de la célébration 2013, devrait commencer par là. C’est au cours de manifestations comme celle du 11-Décembre, que la fibre patriotique doit être exaltée. Et, au lieu de cela, on y transporte les pratiques mafieuses qui ont cours ailleurs. Exalter la fibre patriotique, c’est aussi amener l’ensemble des Burkinabè à adopter cette date du 11-Décembre et à lui donner tout le symbolisme requis. Car beaucoup de Burkinabé, en dehors de ceux de la ville d’accueil, se sentent peu concernés. Or c’est le rare moment où la patrie doit être à l’unisson et où la fierté d’appartenir à une même Nation est de mise. Le 11-Décembre est une formidable opportunité de reconquête d’une dignité perdue. Mais à une seule condition : que la manifestation réponde aux attentes des populations et surtout qu’elle soit organisée et gérée avec la plus extrême rigueur. A l’heure où le pays est gangrené par la course à l’enrichissement facile et illicite, il est temps de faire de la fête de l’indépendance un barrage contre la corruption ambiante et de façon générale contre la mal gouvernance.
Si la gestion et le suivi de l’organisation du 11-Décembre est encore plus rigoureux, on peut réaliser des miracles. Avec le budget de la commémoration, on peut changer le destin de la ville hôte. Mais force est de constater que la plupart de ceux qui s’y trouvent courent derrière leurs propres intérêts. Ceci étant, il ne faut pas attendre seulement la fête de l’indépendance pour entreprendre des actions de grande envergure en matière de développement. L’œuvre de construction nationale est permanente. Le gouvernement en a sans doute conscience .