Plus de 6 000 agents fictifs dans les listes de la Fonction publique burkinabè ! C’est le constat amer qui est ressorti de l’opération d’enrôlement biométrique des agents de la Fonction publique. C’est à se demander à quoi ont servi les opérations de billetage opérées, il y a de cela quelques années. C’est en tout cas une preuve s’il en fallait, que l’Etat burkinabè supporte des charges salariales qui ne sont pas dues. Mais, mieux vaut tard que jamais, serait-on tenté de dire. Bien entendu, la facture de la prise en charge de ces agents est fort salée pour l’Etat. Plus de deux milliards de francs CFA, rien que quand on considère ce qui a été servi pendant quelques mois. C’est déplorable pour un pays de perdre ainsi des ressources qui auraient pu servir à autre chose. Ce caractère dramatique se retrouve renforcé par la situation du pays dont les ressources financières sont faibles à souhait. Que cela soit contraire aux principes de bonne gestion des deniers publics relève de l’évidence. Certes, ces chiffres sont encore bruts et il convient de mieux les affiner pour en tirer toute la substance. Il importe par exemple d’établir avec exactitude la liste définitive de ces agents vraiment fictifs, de déterminer leurs profils et de déceler les raisons pour lesquelles ils se sont retrouvés ou sont restés sur les listes alors qu’ils ne devraient pas ou plus y être. En d’autres termes, il importe de situer les responsabilités des uns et des autres dans ce qui peut être considéré comme une fraude au détriment du Trésor public, donc de l’Etat burkinabè. Il n’est un secret pour personne que les administrations publiques sous nos cieux, sont poreuses. C’est le moins que l’on puisse dire au regard des recrutements qui n’ont pas toujours été faits selon les règles de l’art, des mouvements des agents qui ne sont pas toujours bien suivis, du laxisme de bien des responsables administratifs en matière de gestion du personnel affecté à leurs structures. En effet, de telles pratiques frauduleuses nécessitent, pour s’établir, une chaîne de complicité ou à tout le moins de laxisme tant dans la gestion des ressources humaines que dans celle des ressources financières, notamment des rémunérations. Il faudra à tout prix éviter d’enfermer ce dossier dans un tiroir pour quelque raison que ce soit. Bien au contraire, il convient de tirer toutes les leçons qui s’imposent suite à cette opération d’enrôlement. C’est à ce prix que l’administration burkinabè pourra se donner les moyens de faire progressivement mais sûrement une mue qualitative en termes de maitrise de ses dépenses. Pour ce faire, il faudra situer clairement les responsabilités, sanctionner conformément aux lois en vigueur et trouver les voies et moyens de ramener dans les caisses de l’Etat toutes ces sommes indûment perçues par des individus de mauvaise foi. Sous réserve donc de ce contrôle approfondi et des conséquences qui peuvent en être tirées, on peut dire que le recours au recensement biométrique des agents de la Fonction publique aura été salutaire. Et cela est à mettre à l’actif du ministère de la Fonction publique, du Travail et de la Sécurité sociale qui ne cesse de déployer des efforts considérables pour la modernisation effective de la fonction publique burkinabè. Les autres composantes de l’administration publique dont la Fonction publique parlementaire et la fonction publique des collectivités territoriales, seraient bien inspirées d’en prendre de la graine. On ne dira jamais assez ce que la non-maîtrise de ses effectifs induit comme gaspillage de ressources, pour l’administration publique. Il urge donc de rationaliser davantage la gestion des ressources et cela passe par une sensibilisation accrue des agents au respect des valeurs déontologiques. Car, les manquements de ce genre ne sont ni plus ni moins qu’une expression d’un manque ou du moins d’une insuffisance de civisme des acteurs. C’est le sens de l’Etat, de la patrie qui manque le plus chez ses commis. Ils sont légion, les agents publics qui considèrent l’Etat comme une vache à lait et qui n’ont, de ce fait, aucun sens du bien public ou de l’intérêt général. Ce faisant, ils rivalisent d’ingéniosité pour, entre autres, se remplir les poches ou les comptes bancaires sur le dos de l’Etat. Ainsi, tout en encourageant les agents consciencieux qui font leur travail avec dévouement par la mise en place de conditions de travail et un traitement salarial à la hauteur de leur abnégation, l’Etat se doit de décourager la délinquance par la sensibilisation certes, mais aussi par une traque systématique des pratiques fautives et des coupables. L’Etat doit poursuivre sur cette lancée, démanteler les procédures et réseaux opaques, faire le nettoyage en profondeur et ce, institution par institution. Il convient d’exiger des agents publics et surtout des premiers responsables de l’administration publique, davantage de responsabilité, de donner aux directions et services en charge de la gestion des ressources humaines de l’Etat toute leur place et les moyens nécessaires à la réalisation de leurs missions dont la maîtrise des effectifs est une des composantes essentielles.