ARUSHA - Les avocats des proches de Norbert Zongo ont mis en cause vendredi le frère du président burkinabè Blaise Compaoré dans l’assassinat du journaliste en 1998, au dernier jour d’un procès devant la Cour africaine des droits de l’Homme et des peuples.
Depuis jeudi, la Cour, basée à Arusha (Tanzanie), examine une plainte des proches du journaliste et du Mouvement burkinabè des droits de l’Homme et des peuples contre le Burkina Faso, qu’ils accusent d’avoir failli à ses obligations de rechercher et juger les auteurs du meurtre.
"Ce que nous voulons, c’est savoir qui a tué Norbert Zongo", a réaffirmé vendredi l’avocat des plaignants, Me Bénéwendé Sankara, sans cacher que ses clients avaient "des raisons de croire" que le responsable était François Compaoré, frère du président.
"Une expertise balistique a été faite, une enquête internationale a été menée. L’Etat ne pouvait faire mieux", a répondu Me Antoinette Ouedraogo, avocate du Burkina Faso.
Le jugement sera rendu l’année prochaine.
Norbert Zongo, journaliste d’investigation et directeur de la publication de l’hebdomadaire L’Indépendant, avait été retrouvé mort calciné dans sa voiture avec trois compagnons en 1998, à une centaine de kilomètres de Ouagadougou.
Il enquêtait sur la mort de David Ouédraogo, chauffeur du frère cadet du chef de l’Etat, François Compaoré.
L’affaire avait provoqué un scandale et d’importantes manifestations populaires au Burkina Faso, et avait eu un retentissement international.
Six "suspects sérieux" avaient été identifiés par une Commission d’enquête indépendante mise en place par le pouvoir. Seul l’adjudant Marcel Kafando, ex-chef de la garde rapprochée du président burkinabè, avait été inculpé, avant de bénéficier d’un non-lieu.
En 2006, la justice burkinabè avait classé le dossier, officiellement pour manque de preuves.
Interrogée par l’AFP, Geneviève, la veuve de Norbert Zongo, s’est dite prête à poursuivre son combat jusqu’au bout pour obtenir la lumière sur ce qu’elle considère comme "un assassinat politique".
La Fédération internationale des Ligues des droits de l’Homme, qui parle dans cette affaire de "déni de justice", a estimé que la Cour avait "une occasion très importante de montrer qu’elle est aux côtés des victimes et qu’elle a une véritable utilité pour garantir la souveraineté et l’indépendance de la justice en Afrique".
La Cour, créée par l’Union africaine peut ordonner à un Etat de conduire
une enquête ou de verser des dommages et intérêts.
Ses jugements ne sont pas susceptibles d’appel. Si un Etat refuse d’exécuter une décision, la Cour saisit la conférence ministérielle de l’Union africaine, qui en réfère au sommet des chefs d’Etat.