Dans cet extrait de "La lettre du Consulat du Burkina Faso de Nice", le Consul Marc Aicardi de Saint-Paul lève le voile sur les circonstances de sa nomination et sa dizaine d’années de mission au service du "pays des Hommes intègres".
Lorsqu’en 1990, je débarquais d’un vol UTA à Ouagadougou, j’étais loin de m’imaginer que treize ans plus tard, le Président Blaise Compaoré me nommerait Consul du Burkina Faso à Nice. Je me souviens de ce jour-là comme si c’était hier. Le soir de mon arrivée, dîner chez le Président, dont je savais peu de chose si ce n’est qu’il était en train de remettre le « pays des Hommes intègres » sur le chemin de la démocratie et de l’Etat de droit après une période quelque peu agitée.
Ce qui m’avait frappé à l’époque, c’était la simplicité, l’humilité et l’ouverture d’esprit de ce militaire de formation, désireux de s’informer des affaires du monde afin que le Burkina Faso y occupe une place privilégiée. En effet, la division du monde en deux camps venait juste de prendre fin après la chute du mur de Berlin et la « normalisation » de l’Afrique du Sud allait suivre. Le Président Compaoré avait bien intégré la fin du XXe siècle et que le Burkina Faso devait entrer de plain-pied dans un monde nouveau, celui du XXIe siècle.
Après avoir publié une série d’articles sur le Burkina, j’envisageais d’écrire un ouvrage que j’intitulais « De la Haute-Volta au Burkina Faso : Tradition et Modernité au Pays des Hommes Intègres ». Pierre Messmer me fit l’honneur de le préfacer. Pendant toutes ces années passées en allers et venues au Burkina Faso, je me pris d’affection pour ses habitants et pour un pays que j’arpentais depuis tant d’années.
C’est donc tout naturellement et avec enthousiasme que j’acceptais la proposition du Président du Faso, de succéder à M. William Caruchet comme Consul du Burkina pour la Côte d’Azur et la Corse. Plutôt habitué à la fréquentation de chancelleries, de ministères, de Présidences ou d’Universités de par le monde, j’allais enfin commencer mes « travaux pratiques », loin des abstractions auxquelles ma formation et ma carrière de chercheur et de journaliste m’avaient habitué.
Lors de ma prise de fonction, en décembre 2003, je m’étais fixé une ligne de conduite : ne jamais céder à la facilité qui consiste trop souvent à s’apitoyer sur la pauvreté des peuples pour attirer les aides et les bonnes volontés. C’est tout simplement une question de dignité qui se révèle contre-productive sur le long terme. ,ertes, dans sa globalité, le continent africain n’a pas encore atteint un niveau de développement comparable à celui des quatre autres. Le taux de croissance de son PIB et la richesse en matières premières de nombre de ces Etats peuvent laisser envisager un avenir meilleur. Mais la seule rente du pétrole, des diamants ou de l’or ne suffiront pas à faire progresser de façon notable le niveau de vie des Africains dont le nombre devrait doubler d’ici à 2050. Pour profiter à plein de ces atouts, plusieurs conditions doivent être remplies : la bonne gouvernance doit devenir la règle ; l’éducation et la formation, combinées à un planning familial ambitieux devront faciliter l’emploi des jeunes dans un monde de plus en plus concurrentiel ; l’intégration régionale devra contribuer à la stabilité du continent, car sans sécurité, les investissements étrangers ne décolleront pas vraiment. Ce n’est qu’une fois ces conditions remplies que les pays africains ne constitueront plus seulement un réservoir de matières premières mais un continent susceptible de produire et d’exporter des produits finis.
Quel rapport entre ces considérations sur l’avenir de l’Afrique et le Consulat du Burkina Faso de Nice me direz-vous ? Un Consulat en Région joue quasiment le même rôle qu’une Ambassade dans la capitale. Il ne s’occupe pas uniquement de questions d’Etat civil, de visas, de passeports ou d’aide à ses ressortissants. Il représente le pays d’envoi auprès des autorités locales, favorise les échanges économiques et culturels bilatéraux.
C’est ce que je me suis modestement assigné comme mission depuis maintenant dix ans. Ma tâche a été facilitée par un préjugé favorable, s’agissant du Burkina Faso, tant auprès des officiels que des milieux culturels et des 200 associations de la circonscription qui y œuvrent. Celles-ci génèrent un flux de 3.5 à 4 millions d’Euros vers le Burkina Faso grâce à des programmes non seulement humanitaires, mais de coopération impliquant les Burkinabè. Tous les trois jours, une manifestation se déroule autour du Burkina Faso sur la Côte d’Azur, ce qui confirme bien cet engouement pour le Pays des Hommes Intègres.
La Côte d’Azur étant une région plutôt riche et ouverte sur le monde, cosmopolite, où de nombreux Africains de cœur, résident, le Consulat a favorisé les échanges entre Azuréens et Burkinabè. Il a répertorié les associations et a créé un lieu de rencontre grâce à l’« Association des Amis du Consulat du Burkina Faso de Nice », présidée par Madame Annelise Chalamon, également webmestre du site internet du Consulat depuis 7 ans. Le nombre de visites annuelles sur le site, dépasse 250 000 (1.3 million de pages visitées), et un contenu de 700 pages est disponible. Le Consulat publie également une lettre périodique qui est envoyée à plus de 10 000 personnes et organisations en France et à l’étranger. Nice, Cannes, Monaco sont des destinations privilégiées pour les conférences internationales, colloques et autres festivals : sommets France-Afrique de Cannes en 2007, puis de Nice en 2010, Jeux de la Francophonie en septembre 2013, Festival du Film de Cannes, MIP TV.
Toutes ces manifestations ont été l’occasion pour le Consulat de Nice de recevoir à plusieurs reprises les plus hautes autorités du Burkina Faso et de contribuer à organiser tout ou partie de leurs visites. On mentionnera bien entendu le Président du Faso, S.E Blaise Compaoré, le Premier Ministre actuel S.E Beyon Luc Adolphe Tiao qui fut également mon Ambassadeur à Paris, un grand nombre de Ministres, de délégués généraux du FESPACO, de représentants des Burkinabè de l’étranger, de députés, de Maires du Burkina Faso, de cinéastes et de sportifs. A chaque occasion, le Consulat de Nice a donné des réceptions en l’honneur de ces personnalités. Le jumelage de Vence avec Ouahigouya, de Grasse avec Legmoin, les nombreux jumelages de paroisses attestent, s’il en était besoin du développement de ces relations privilégiées. Toujours soucieux de faire connaître le Burkina Faso, sa culture, son histoire, son artisanat, le Consulat a lancé en 2009 le premier BURKINA FASO FESTIVAL, à l’hippodrome de Cagnes Sur Mer, avec de nombreuses animations et une soixantaine de stands. La seconde édition s’est déroulée en 2011 et la troisième, en septembre 2013 à Grasse. J’ai également donné des conférences sur le pays, tant localement, auprès du Rotary, du Lions, d’organismes économiques, qu’à l’étranger lors de conférences internationales auxquelles je suis régulièrement convié tant à titre de spécialiste de géopolitique que ès qualité. Je ne peux conclure mon propos sans dire un mot de la communauté burkinabè résidant dans la région à titre permanent, occasionnel ou venue y étudier. Les Burkinabè sont un peuple travailleur, fidèle, respectueux d’autrui, serviable et je tiens à leur rendre ici l’hommage qui leur est dû. Au bout de dix ans, je les connais pratiquement tous et ne peux que me féliciter des relations qu’ils entretiennent avec le Consul et son équipe. J’ai suivi les études supérieures de nombre d’entre eux, qui ont obtenu un Doctorat de l’Université de Nice Sophia Antipolis. iors d’une interview parue dans un magazine local, le journaliste auquel je répondais m’avait lancé : « Alors vous êtes un Consul heureux ! ». Cela résume bien l’état d’esprit qui est le mien dans l’accomplissement de ma mission.
Marc Aicardi de Saint-Paul
Docteur d’Etat en Droit - Docteures Lettres
Chevalier de l’Ordre National