Le Mouvement burkinabè des droits de l’homme et des peuples (MBDHP) a organisé, à l’occasion de son 6e congrès, le samedi 16 novembre 2013 à Ouagadougou, un panel sur le thème : « Du collège de sages au CCRP : bilan des réformes politiques au Burkina Faso et perspectives ».
A l’occasion de son 6e congrès statutaire, le Mouvement burkinabè des droits de l’homme et des peuples (MBDHP) a organisé une série d’activités dont un panel-débat. Trois communications ont été données au cours de cette rencontre qui a réuni de nombreux sympathisants du mouvement. Le « Bilan des réformes politiques au Burkina Faso de 1998 à nos jours », a été exposé par le président de l’Organisation démocratique de la jeunesse du Burkina Faso (ODJ), André Tibiri. Dans son introduction, il a indiqué que le drame de Sapouy, marqué par l’assassinat du journaliste Norbert Zongo et de ses trois compagnons d’infortune en 1998, a consacré un tournant important dans l’histoire politique du Burkina Faso. Depuis cette date, a affirmé André Tibiri, le « pays des Hommes intègres » est entré dans une zone de turbulences sociopolitiques. Selon lui, du Collège de sages en 1999 au Conseil consultatif sur les réformes politiques (CCRP) en 2011, de nombreuses réformes politiques ont été opérées dans le pays. « Cependant, ces réformes n’ont pas véritablement changé grand-chose ni dans le fonctionnement des institutions ni dans le quotidien des Burkinabè », a-t-il souligné. Et d’ajouter qu’il y a un recours constant, en période de crise politique, à des structures ad hoc pour formuler des propositions, lesquelles sont ensuite appliquées au gré des situations, avec toujours pour seul objectif, d’apaiser le climat social. « Contourner les institutions républicaines et installer des structures parallèles sans pouvoir de décision, accumulation de recommandations dans les placards en gardant l’initiative, telle est la méthode de résolution des conflits sociaux par le pouvoir de la IVe République... », a indiqué le président de l’ODJ. Dans ces conditions, a-t-il fait savoir, les revendications des populations ne peuvent que rester en souffrance. Il a estimé que le peuple doit poursuivre son organisation et intensifier la lutte pour la prise en compte véritable de ses aspirations profondes. A la suite de André Tibiri, le président du MBDHP, Chrysogone Zougmoré s’est appesanti sur « les réformes politiques et la prise en compte des aspirations populaires ». Il a relevé que dans toute organisation sociale (incluant l’Etat moderne), l’initiation et l’application de réformes sont un exercice qui devrait tirer son fondement d’une volonté politique saine et courageuse d’édifier des normes nouvelles en tenant compte des évolutions et besoins de la société. Ceci, en vue de l’institution ou de la consolidation d’un Etat qui consacre des libertés et le bien-être du peuple. « Chez nous au Faso, le pouvoir politique a toujours usé de la voie des réformes comme stratégie de survie, suite à de graves crises sociopolitiques ayant marqué une rupture profonde de confiance entre gouvernants et gouvernés », a soutenu Chrysogone Zougmoré. Il a poursuivi son propos en précisant qu’instruites par des années de luttes acharnées contre la misère et abreuvées de bien de promesses officielles jamais tenues, les populations ont enfin compris « que nos dirigeants actuels (…) qui nous dirigent et aspirent à nous diriger, n’y pourront rien ».
"Des réformes conçues pour se maintenir au pouvoir"
Il a fait savoir : "le monde capitaliste et son système libéral, dont la philosophie et la logique implacable du profit à tout prix pour les riches et les puissants écrasent sans pitié les faibles, les relègue à la périphérie d’un monde de plus en plus déshumanisé et cruel". Pour M. Zougmoré donc, il apparaît qu’en Afrique et surtout au Burkina Faso, "les réformes sont généralement conçues comme des éléments de stratégie de maintien au pouvoir et de préservation d’un système de domination séculaire". La dernière communication de cette matinée du samedi 16 novembre 2013 a été donnée par le président de la section MBDHP du Houet, André Tioro sur « les réformes politiques et la question du changement au Burkina Faso ». Il a fait remarquer que le changement en faveur du peuple est une question posée et à résoudre. Selon lui, les expériences de lutte enseignent la vigilance vis-à-vis des faux amis du peuple et surtout de se mobiliser pour un vrai changement par le peuple et pour le peuple. « La lutte populaire contre l’impunité a permis l’élargissement des espaces de liberté, d’organisation et de mobilisation citoyenne », a confié André Tioro. Et d’ajouter que c’est une brèche dans laquelle, les différentes composantes du peuple se sont engouffrées pour poser leurs revendications citoyennes légitimes et plus globalement, leurs revendications pour le pain et la liberté. Dans son exposé, il a identifié l’existence au Burkina Faso, de deux offres politiques de changement : en premier lieu, le changement dans la continuité ou replâtrage du système capitaliste néocolonial. Cette offre politique est portée par les partis politiques légaux. « Il y a le tékré, version burkinabè du SOPI de Wade ; il y a aussi le changement de façon, chef de file de l’opposition. Si l’on s’en tient aux déclarations de Zéphirin Diabré, libéral convaincu, c’est encore du SOPI à la sauce burkinabè », a affirmé M. Tioro. Avec cette offre politique, il estime qu’il n’y a rien de nouveau sous le ciel burkinabè, car celle-ci signifie la continuation au plan économique, des politiques néolibérales, la misère et la précarité pour le plus grand nombre. En second lieu, il y a le changement par la rupture avec le système néocolonial. C’est un changement, a-t-il dit, par la révolution où le peuple et la jeunesse sont des acteurs avec une refonte de l’Etat qui protège les droits et les intérêts fondamentaux.