«Biométrique, sûre, fiable et infalsifiable», se félicitent les autorités burkinabè et l’opérateur technique.- «Chère payée, de l’escroquerie, nous n’en voulons pas», proteste un groupe de bénéficiaires potentiels.Lancée le samedi 2 novembre 2013 à Abidjan, la nouvelle carte d’identité consulaire burkinabè est autant l'objet d'éloges que de critiques.Peu avant le début de la cérémonie, des jeunes tentent de se faire entendre. Sous le regard indifférent des Abidjanais. Le cordon de sécurité formé par les CRS les maintient à bonne distance du consulat général du Burkina Faso à Abidjan. Le mégaphone que tient le leader du groupe, Moumouni Pograwa, laisse échapper des sons que noient les klaxons des véhicules. Mais sur la carte on peut saisir l’objet de leurs récriminations : «La carte consulaire est une vaste escroquerie gouvernementale, institutionnelle et internationale». (Lire encadré).Cette nouvelle carte consulaire, appelée à remplacer celle actuellement en vigueur dans tous les consulats du Burkina Faso à l’étranger suscite des réactions contrastées. En tout cas sur les bords de la lagune Ebrié, pays choisi pour son lancement officiel.Pour les autorités burkinabè et l’opérateur technique, Snedai, le nouveau document, conçu et produit au moyen d'une technologie de pointe, offre toutes les garanties de sûreté et de fiabilité.«Outil moderne et crédible, elle permettra aux Burkinabè d’être au diapason de la modernité», s’est félicité le ministre ivoirien en charge de la Défense, Paul Koffi Koffi.
Présenté comme une réponse aux «identités mouvantes», le nouveau document apportera à son détenteur un supplément de fierté nationale, selon ses thuriféraires. «La carte sécurisée vient aujourd’hui en remplacement de l’ancienne carte qui, de par sa nature, sa forme, sa couleur et son caractère falsifiable, avait fini par porter un coup à la crédibilité et à l’intégrité dont jouit le Burkinabè et était présentée avec beaucoup de complexe et sans fierté à cette ère des nouvelles technologies de l’information et de la communication », ajoute, pour sa part, l’ambassadeur du Burkina Faso en Côte d’Ivoire, Justin Koutaba.
Son lancement, suivi d’une opération d’enrôlement d’environ trois millions cinquante mille (3 050 000) personnes en Côte d’Ivoire, vise, entre autres, à doter le gouvernement burkinabè d’une base de données fiable et la Commission électorale nationale indépendante (CENI) d’un fichier crédible regroupant les Burkinabè de l’étranger dans la perspective des scrutins présidentiels et référendaires.
Pour le ministre burkinabè des Affaires étrangères et de la Coopération régionale, Djibrill Bassolé, le choix de l’opérateur, Snedai, dont le P-DG est l’ancien ministre ivoirien Adama Bictogo, n’est pas le fruit du hasard : «Il a la confiance de notre gouvernement. Il connaît bien le Burkina Faso et la Côte d’Ivoire et est à l’aise dans les méandres de l’Administration ivoirienne».
D’un coût de 7000 francs CFA pour une durée de validité de 3 ans, la nouvelle carte consulaire burkinabè n’est pas du goût de tous, surtout pas des jeunes et des femmes, qui ont laissé éclater leur colère au cours de la cérémonie de lancement. «C’est de l’escroquerie organisée», «Nous sommes les oubliés des Burkinabè de l’étranger», «Nous avons désormais les cartes consulaires les plus chères en Côte d’Ivoire», ont-ils scandé, déplorant l’absence de toute concertation préalable à la fixation du prix.
«Si la durée de validité était au moins de 5 ans, on pouvait accepter. Mais 3 ans pour un prix de 7000 F CFA, alors que l’ancienne faisait 3500 pour une durée de 5 ans, c’est de la foutaise», éructe Abdouwahab, résidant en terre ivoirienne depuis 45 ans.
«Nous sommes devenus le café cacao du gouvernement burkinabè», renchérit Moumouni Pograwa, dont le groupe a finalement eu accès à l’enceinte du consulat.
Face à cette vague de protestation, Djibrill Bassolé a prôné le dialogue et promis que toutes les critiques seraient examinées. A la fin de la cérémonie, très mouvementée, il a reçu en huis clos une délégation des manifestants.