Albert de Millogo, (président du conseil constitutionnel): « Le devoir d’ingratitude devrait être le propre de toutes les juridictions constitutionnelles »
Docteur en droit, magistrat, ancien ministre et actuellement président du Conseil constitutionnel, Albert De Millogo est une personnalité bien connue de par ses fonctions, mais aussi ses qualités.En outre, très averti des questions de droit, enseignant, du reste, de Droit pénal à l’Université de Ouagadougou, qui mieux que lui pour nous faire visiter le Conseil constitutionnel ?C’est sa maison ; il la connaît et il nous en a parlé durant plus d’une heure d’horloge.Ainsi, le fonctionnement de l’institution, le mode de nomination au sein de l’institution, sa position sur le débat en rapport sur le Sénat, la déclaration des biens des personnalités, voilà autant de questions que le « Gardien de la Constitution » a bien voulu aborder dans cette interview exclusive.
« Le Pays » : Quelle est la mission principale du Conseil constitutionnel ?
Albert De Millogo : Merci pour l’intérêt que vous portez à l’institution que je dirige depuis ma prestation de serment en qualité de président, intervenue le 25 septembre 2007. Avant tout propos, je profite de cette occasion pour adresser aux Editions « Le Pays » mes vives félicitations à l’occasion de son 22e anniversaire et aussi rendre un vibrant hommage à son promoteur. Je vous exprime aussi la profonde gratitude et la reconnaissance du Conseil constitutionnel pour l’accompagnement dont il a toujours bénéficié de votre part. Longue vie à votre quotidien. Pour revenir à votre question, le Conseil constitutionnel a plusieurs missions importantes déterminées par la Constitution de notre pays. Les dispositions y relatives sont mises en œuvre à travers l’adoption de la loi organique n°011-2000/AN du 27 avril 2000 portant composition, organisation, attributions et fonctionnement du Conseil constitutionnel et procédure applicable devant lui et de la loi n°014-2001/AN du 3 juillet 2001 portant Code électoral.
Je ne vous parlerai donc pas d’une mission principale, mais de plusieurs missions.
Ainsi, la Constitution prévoit que le Conseil constitutionnel :
- statue sur la constitutionnalité des lois, des ordonnances ainsi que sur la conformité des traités et accords internationaux avec la Constitution. Tout traité ou tout accord, avant d’être ratifié, passe nécessairement devant le Conseil constitutionnel qui émet un avis pour dire que le texte est conforme à la Constitution ou ne l’est pas. Ensuite, nous rendons une décision et nous notifions aux personnalités chargées de nommer des gens ici, à savoir le président du Faso, le Premier ministre, le président de l’Assemblée nationale et probablement, lorsque le Sénat sera en place, nous serons obligés aussi de notifier au président du Sénat dans la mesure où la prochaine composition du Conseil constitutionnel comprendra trois personnalités nommées par le président du Sénat.
- interprète les dispositions de la Constitution et veille au respect de la procédure de révision de la Constitution ;
- contrôle la régularité, la transparence et la sincérité du référendum, des élections présidentielles, législatives et il est juge du contentieux électoral ;
- proclame les résultats définitifs du référendum, des élections présidentielles et législatives (Article 152). Je me limite à ces élections dans la mesure où les élections municipales relèvent de la compétence des juridictions administratives, à savoir les tribunaux administratifs et le Conseil d’Etat ;
- reçoit le serment du président du Faso et la liste de ses biens (article 44) ;
- constate la vacance de la présidence du Faso (Article 43). Si, par exemple, un jour, le président est dans une certaine incapacité, le gouvernement saisit le Conseil constitutionnel qui analyse la situation pour dire si le pouvoir est vacant ou non. Je peux faire allusion à ce qui s’est passé en 2011. Lorsque les militaires étaient sortis, la presse avait écrit qu’il y avait vacance du pouvoir, parce que le président était allé à Ziniaré. Personne ne nous a saisis. Si l’on nous avait saisis, l’on allait dire si le pouvoir était vacant ou pas ;
- reçoit les listes des biens des membres du gouvernement, des présidents d’institutions et des personnalités déterminées par la loi (Article 77). Mais la difficulté, dans ce sens, c’est que le président dépose la liste de ses biens, le Premier ministre et les membres du gouvernement déposent les listes de leurs biens. Certains maires n’étaient pas au courant, mais il y en a qui ont commencé à déposer cette année. Mais toujours, il y a beaucoup qui ne savent pas qu’ils sont soumis à cette obligation. Vous me direz que nul n’est sensé ignorer la loi, mais, parfois, les gens préfèrent ignorer la loi que la connaitre.
Mais en dehors de cela, il y a un certain nombre de problèmes qui peuvent être soulevés, c’est-à-dire le contrôle a posteriori. Cela veut dire que lorsqu’une loi a déjà été votée par l’Assemblée nationale, promulguée ensuite, il reste à l’appliquer. Mais si, au cours de l’application, un justiciable soulève l’inconstitutionnalité de cette loi au niveau d’une juridiction, cette juridiction doit surseoir à statuer et saisir le Conseil constitutionnel. Cela émane de l’article 25 de notre loi organique d’avril 2000. Autrement dit, il y a aussi l’article 157 de la Constitution qui ajoute une question pré-judiciaire supplémentaire qui dit que lorsqu’un justiciable soulève devant une juridiction qu’une disposition légale porte atteinte à ses droits, la juridiction sursoit à statuer, saisit sa juridiction supérieure qui peut être soit le Conseil d’Etat soit la Cour de cassation qui saisit le Conseil constitutionnel et c’est ce qui s’est passé avec la loi sur le vandalisme qui est passée devant le Tribunal de grande instance. Vous savez que cette loi existe dans tous les pays du monde. La première rédaction de la loi sur le vandalisme, ce que l’on a appelé « la loi anti-casse », date du 30 juin 1881 en France et cette loi a été déclarée applicable dans les colonies de la France à l’époque. Ensuite, une seconde modification est intervenue en 1907 toujours en France et cette modification a été aussi déclarée applicable dans les colonies. Et la dernière modification de cette loi est intervenue par un décret loi du 23 octobre 1935. Et ces lois disent que lorsque vous voulez organiser une manifestation sur la voie publique, vous devez faire une demande, soit 15 jours avant, et c’est le maximum, soit 3 jours avant. Et en déposant votre demande de manifestation, vous devez donner le nom de trois personnes. Pendant ces manifestations, s’il y a des casses, ce sont ces trois personnes qui seront présumées responsables de tout ce qui est arrivé comme destruction et, en ce moment, aucun manifestant ne peut être arrêté. Mais, maintenant, si une manifestation est non autorisée, et s’il y a eu des casses, tous ceux qui y ont participé et qui ont été arrêtés sont présumés responsables de ce qui est arrivé et c’est ce qui s’est passé d’où le sens de notre décision.
Quelles sont les difficultés que rencontre l’institution que vous dirigez dans l’exécution de ses missions ?
Je ne relève aucune difficulté particulière qui puisse être évoquée car je pense que nos missions sont exécutées conformément aux textes. Nous avons exécuté ce qui nous revenait comme tâches au cours des élections. Chaque année, tout ce qui est tâche par exemple lorsque nous sommes saisis, le président peut nous saisir, le Premier ministre et le président de l’Assemblée nationale aussi peuvent nous saisir sur des lois qui ont déjà été votées. Nous avons toujours étudié nos textes et rendu compte.
Etes-vous satisfait des moyens mis à la disposition de votre institution ?
Je suis satisfait des moyens mis à la disposition de notre institution car le Conseil constitutionnel bénéficie chaque année d’une dotation budgétaire de la part de l’Etat. Cette dotation budgétaire qui tient compte de nos besoins essentiels et surtout des possibilités de notre pays, nous permet d’exécuter nos tâches constitutionnelles.
Est-ce que les missions du Conseil constitutionnel sont suffisamment connues du grand public ?
Je répondrai d’abord par oui, car nul n’est sensé ignorer la loi. Et ensuite je dirai non, car combien de personnes savent lire la loi ? Par conséquent, c’est une question d’éducation permanente, de sensibilisation que nous devons faire et c’est ce que nous avons fait en 2008-2009. Nous continuons de le faire dans la mesure où nous nous sommes attaqués à certaines grandes écoles et nous allons poursuivre. Après les élections couplées de décembre 2012, nous avons lu un article dans un journal de la place, qui se demandait pourquoi nous n’avions pas les mêmes positions que le Conseil d’Etat qui avait annulé les élections d’un arrondissement et nous, nous avons laissé passer. Un autre journal parlait de gestion calamiteuse des élections de 2012. Si vous prenez les élections municipales dans notre pays, la circonscription électorale, c’est le village, le secteur. Donc, quand on prend un petit village comme Toma île au large de Di, si le Conseil d’Etat annule, ils seront obligés d’y reprendre les élections. Si le Conseil d’Etat annule les élections du secteur 4 de Ouagadougou, par exemple, ils seront obligés de les reprendre. Par contre, si le Conseil constitutionnel annule les élections de Toma île, ils ne sont pas obligés de les reprendre. Si nous annulons les élections du secteur 4 de Ouagadougou, ils ne sont pas non plus obligés de reprendre. Pour qu’on reprenne, il faut que le Conseil constitutionnel annule les élections de toute la région de la Boucle du Mouhoun ou les élections de tout le Kadiogo ; en ce moment, on reprend. Quand on ne connait pas ce mécanisme, on passe à côté de la plaque. Nous, notre circonscription électorale, c’est la province.
Avant, le président du Conseil constitutionnel était nommé par le chef de l’Etat. Aujourd’hui, il est élu par les membres du Conseil. Qu’est-ce que cela apporte comme changement dans la vie de l’institution ?
Je pense que je ne suis pas encore élu et celui qui va l’être n’est pas encore là. Nous, nous continuons de fonctionner comme auparavant. Si cela va changer dans la façon de fonctionner, d’autant plus qu’en ce moment, moi je ne serai plus là. Dès que le mécanisme va changer, c’est-à-dire que lorsque le Sénat sera mis en place, l’institution va désigner trois personnes qui vont s’ajouter aux trois personnes nommées par le président du Faso, aux trois nommées par le président de l’Assemblée nationale, aux trois nommées par le président sur proposition du ministre de la Justice. En ce moment, cela fera douze plus les anciens chefs d’Etat. Malheureusement, le président Saye Zerbo vient de nous quitter, il ne reste plus que le président Jean Baptiste Ouédraogo qui viendra s’ajouter au douze, donc cela fera treize personnes et ce sont ces personnes qui vont se réunir pour élire leur président. Donc je ne sais pas si les choses vont changer car ce président aura à imprimer sa vision sur le Conseil constitutionnel. Mais, de toute façon, l’organisation des institutions et, notamment, la désignation de leurs premiers responsables, relèvent de leurs textes de base. En l’espèce, c’est la Constitution qui prévoit désormais l’élection du président du Conseil constitutionnel. C’est un choix de notre pays sur lequel je ne peux porter de jugement ; l’essentiel est que l’institution continue à fonctionner de manière harmonieuse et efficace.
La question de l’élection du président du Conseil constitutionnel n’est pas encore une réalité. Mais est-ce que, fondamentalement, quelque chose va changer ? Il sera toujours un homme du président au final, qu’il soit nommé ou qu’il soit voté par des gens nommés par le président ? Tout dépend de la personnalité. Moi, je suis magistrat depuis 31 ans. J’ai fait 7 ans de service et au cours des 7 ans, j’ai occupé 8 postes. Chaque année, je changeais de postes et personne ne m’a déjà dit ce qu’il faut faire. Je me dis que c’est un devoir d’ingratitude envers ceux qui m’ont nommé. Au cours des audiences, les rôles sont partagés. Il y a les magistrats du siège et il y a les magistrats du parquet. Seuls les magistrats du parquet peuvent recevoir des instructions de la part du ministre. Le magistrat du siège qui prend des décisions, en concertation avec d’autres personnes, ne peut pas recevoir d’instruction. Et c’est à ce niveau qu’intervient la personnalité de celui qui préside. Je dois dire que moi, mon souci, c’est l’application de la loi. Quand je sors de mon audience, que j’aie la conscience tranquille. Donc, tout dépend de la personne en réalité. Sinon qu’il soit nommé ou qu’il soit élu, tout dépend de comment il va appliquer la loi. Soit il va pencher d’un côté et prendre des dessous-de-table, soit il va respecter la loi et c’est cela ma position.
Pensez-vous que le nouveau mode de désignation des membres du Conseil constitutionnel donnera plus d’indépendance à l’institution ?
Je pense qu’il y a une petite confusion dans votre question car le mode de désignation des membres du Conseil constitutionnel n’a pas changé. C’est seulement le mode de désignation du président du Conseil qui est nouveau, car désormais, son président, au lieu d’être nommé par le président du Faso sera désormais élu par ses pairs. Sinon, avec la nouvelle configuration prévue par la Constitution révisée, trois membres seront nommés par le président du Faso, trois autres membres nommés par le président du Faso sur proposition du ministre de la Justice, trois par le président de l’Assemblée nationale et trois autres nommés par le président du Sénat dans le cas où le Sénat sera mis en place. C’est ce qui fait 3x4 ; donc 12 personnes ; et ce sont ces 12 personnes plus les anciens présidents qui vont se réunir pour élire leur président. Alors que maintenant, les 9 membres sont nommés suivant le procédé décrit et en plus de ces 9 membres, le président nomme le président du Conseil constitutionnel. Donc, c’est ce dernier aspect qui va changer et non le mode de désignation des membres. La nomination reste la même plus le Sénat mais, à l’intérieur, les membres vont se réunir pour élire leur président. C’est ça seulement le changement.
Le Conseil constitutionnel, dans l’exercice de ses compétences, a toujours pris ses décisions et rendu ses avis sur toute question à lui soumise, en toute indépendance. Je ne pense donc pas que le nouveau mode de désignation puisse donner plus d’indépendance à l’institution.
Pour ma part, je pense que la question de l’indépendance du juge constitutionnel est beaucoup plus une question de personnalité, d’éducation et de mentalité qu’autre chose
Pourquoi est-on passé d’une Cour constitutionnelle à un Conseil constitutionnel ?
L’histoire de la mise en place de notre Conseil constitutionnel est tout autre car la création de notre institution découle de l’éclatement de la Cour suprême. Cet éclatement de la Cour suprême a donné naissance aux quatre hautes juridictions que sont le Conseil constitutionnel, la Cour de cassation, le Conseil d’Etat et la Cour des comptes.
Ce changement est intervenu en 2000 par la volonté du Constituant burkinabè. Je suis donc mal placé pour vous en donner les justifications à sa place. Mais retenez tout de même qu’au Burkina, nous avons un Conseil constitutionnel et non une Cour constitutionnelle.
Mais quelle différence existe-t-il entre une Cour constitutionnel et un Conseil constitutionnel ?
Tout dépend des pays. Dans la sous-région, nous sommes trois pays que sont le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire et le Sénégal à garder l’appellation Conseil constitutionnel. Sinon, les autres pays comme le Bénin, le Togo, le Mali, le Niger, eux, ont appelé l’institution Cour constitutionnelle. Sinon, nous fonctionnons de la même manière et avons les mêmes attributions. Même actuellement, le Conseil constitutionnel français va évoluer vers une Cour constitutionnelle. Mais comme leur Conseil joue un rôle important depuis un certain temps et que les gens sont habitués à la notion de Conseil constitutionnel, je pense que c’est ce qui fait que nous restons à cette appellation. Puisque, quand De Gaulle a créé le Conseil constitutionnel en 1958, c’était dans le sens de conseiller le gouvernement et maintenant l’évolution a fait de telle sorte que ces Conseils sont devenus des juridictions et on parle de juges constitutionnels. Donc, nous travaillons comme les juridictions, mais seulement, il y a un maillon qui manque, à savoir le parquet qui représente la société, c’est-à-dire le procureur qui existe dans toutes les juridictions. Qu’il s’agisse du Tribunal de grande instance, du Tribunal d’instance ou du Tribunal pour enfants, sauf au niveau de certaines juridictions, c’est-à-dire les juridictions civiles telles que le Tribunal du travail. Mais lorsqu’il y a un dossier important, il est toujours communiqué au parquet qui vient assister à l’audience s’il le veut.
Mais une certaine compréhension pense que quand c’est une cour, elle peut juger ?
Par exemple, en cas de contestation, des gens avaient contesté les candidatures comme celle de Badini et autres. Nous avons rendu une décision et cela s’apparente à un jugement. Nous avons fait venir les parties, et c’est un jugement. Mais la différence est que nous ne sommes pas obligés d’organiser des audiences publiques. On appelle cela statuer en chambre du Conseil. Par exemple, des avocats ont soulevé l’inconstitutionnalité de l’article 15 de la loi de 2008 sur le vandalisme. Cela nous est parvenu et nous, nous avons pris leurs documents de base et les avons analysés par rapport à la loi de 1997 et à celle de 2008 et nous avons rejeté leur requête en disant qu’il ne s’agit pas d’une inconstitutionnalité. Sinon, nous avons les deux modes mais nous statuons plus en chambre du Conseil qu’en salle d’audience.
Donc, au final, la Cour constitutionnelle n’est pas plus efficace que le Conseil constitutionnel ?
C’est le même fonctionnement. Nous appliquons les mêmes règles, etc.
De quelle marge de manœuvre disposez-vous face à des décisions de haute portée nationale ?
Le Conseil constitutionnel a des compétences limitées, bien précises, prévues par les textes qui déterminent les autorités qui peuvent le saisir et les procédures applicables pour sa saisine. Il ne peut donc se saisir de questions qui ne relèvent pas de ses compétences au risque d’empiéter sur les compétences d’autres institutions comme l’Assemblée nationale ou le gouvernement. Les gens disent que nous sommes pour le Sénat. Pour nous, je crois que c’est l’article 78 qui dit que le Parlement comprend l’Assemblée nationale et le Sénat. C’est inscrit dans la Constitution et tant que la Constitution n’est pas modifiée pour supprimer le sénat, nous, nous n’avons rien à dire. C’est prévu. Le débat qui se mène aujourd’hui, c’est mon opinion personnelle, ce n’est pas maintenant qu’il faut le mener. Il devait être mené avant la révision de la Constitution pour dire nous sommes contre et on n’aurait pas modifié la Constitution. Donc, nous, à ce niveau, nous ne pouvons plus intervenir dans ce débat, puisque pour nous, le Sénat existe dans la Constitution.
Pourquoi avoir décidé alors seulement maintenant de la mise en place du Sénat alors qu’il a été adopté depuis… ?
Lorsqu’une institution est prévue et adoptée, il faut rédiger ce que l’on appelle la loi organique qui décrit comment la structure va fonctionner, quelles vont être sa composition, ses attributions et je crois que nous sommes à ce stade. Et je crois qu’il faut plutôt déterminer les attributions, dans la mesure où on ne plus remettre en cause le Sénat puisqu’il existe dans la Constitution.
Mais peut-on l’enlever de la Constitution ?
Ça c’est facile. Il suffit de faire une révision de la Constitution et, en ce moment, le problème ne se posera plus. L’on a révisé la Constitution pour mettre le Sénat, et maintenant, il faut la réviser pour l’en extraire.
Mais qui peut décider de cette révision ?
C’est le président du Faso qui peut décider ou les députés. Il y a aussi les pétitions. Sinon, nous nous, n’y avons rien à voir. Il n’y a que les points sur la nature républicaine de l’Etat et le problème de frontières qui sont des dispositions sur lesquelles on ne peut pas revenir, sinon toutes les autres dispositions peuvent être révisées au niveau de la Constitution.
Quel est votre avis sur le débat actuel sur le Sénat ? D’aucuns estiment qu’il est inopportun vu les nombreux défis qui restent à relever. Aussi, l’on lie la mise en place de ce Sénat à la modification de l’article 37 de la Constitution.
Ce sont des questions politiques sur lesquelles je ne peux pas me prononcer. Sinon, l’article 78 de la Constitution dispose que le Parlement comprend deux chambres : l’Assemblée nationale et le Sénat.
Notre serment, prévu à l’article 12 de la loi n°11-2000 du 27 avril 2000, nous interdit de prendre des positions publiques et de ne donner aucune consultation sur des questions qui peuvent faire l’objet d’une saisine du Conseil constitutionnel. Autrement dit, nous risquons de préjuger en émettant aujourd’hui un avis quelconque sur le débat actuel sur le Sénat.
Un magistrat français nommé disait qu’il avait un devoir d’ingratitude envers celui qui l’a nommé. Quel commentaire faites-vous de cette déclaration ?
Je voudrais d’abord préciser que cette déclaration est de Me Robert Badinter, ancien président du Conseil constitutionnel français, nommé à ce poste en 1986 par François Mitterrand, alors président de la République.
Le devoir d’ingratitude envers les autorités de nomination, de mon point de vue, devrait être le propre de toutes les juridictions constitutionnelles. Elles ne doivent pas rendre des décisions pour plaire à qui que ce soit, mais uniquement dans le respect de la Loi fondamentale qu’est la Constitution. Celui qui n’observe pas ce devoir d’ingratitude ne rend pas service à l’autorité de nomination et ne rend pas service à son Etat. Parce que l’on est nommé pour être gardien de la Constitution et je crois que c’est la règle à laquelle moi, j’obéis en étant ici. J’avoue que cela fait quelque temps que je suis là, mais je n’ai jamais reçu d’injonction dans tel ou tel autre sens. Et nos décisions ont toujours été respectées jusqu’à présent. On ne nous a jamais dit, vous avez pris telle décision et nous, nous ne sommes pas d’accord. Ce n’est jamais arrivé. Par conséquent, on a toujours respecté nos décisions.
Juridiquement, le Conseil constitutionnel, dans sa configuration actuelle, est illégal, dit-on. Il faudra la mise en place du Sénat pour lui redonner sa légitimité. Qu’en dites-vous ?
Lorsque l’on crée une institution, l’on prévoit toujours une phase transitoire. J’ai rappelé tout à l’heure que le futur Conseil constitutionnel sera composé de 12 personnalités dont 3 nommées par le président du Sénat. Mais tant que le Sénat n’est pas mis en place, les autres structures continuent de fonctionner jusqu’à ce qu’il y ait une effectivité du Sénat. Par conséquent, nous, nous ne voyons pas en quoi nous ne sommes pas légitimes et nous ne voyons pas en quoi nous sommes illégaux, d’autant plus que nous continuons de fonctionner jusqu’à ce que l’on aboutisse à la mise en place du Sénat.
Si aujourd’hui, le Sénat n’existe pas ou si l’on décide simplement de le supprimer, le même Conseil continuera d’exister certainement avec des modifications qui incluraient les anciens chefs d’Etat.
Sur cette question, je voudrais simplement rappeler que la mise en œuvre des dispositions de la Constitution procède de l’adoption d’autres textes comme les lois organiques, les lois ordinaires, les règlements, les décrets et autres arrêtés, etc.
Le Conseil constitutionnel, dans sa configuration actuelle, est régi par la loi organique n° 011-2000/AN du 27 avril 2000 portant composition, organisation, attributions et fonctionnement du Conseil constitutionnel et procédure applicable devant lui.
En attendant donc l’adoption de la prochaine loi organique prenant en compte les modifications opérées par la Constitution, le Conseil constitutionnel, dans sa configuration actuelle, n’a rien d’illégal.
Donc, existe-t-il une disposition transitoire qui vous permet de fonctionner sans le Sénat ?
C’est l’erreur qui a été commise lors de la révision de la Constitution.
Il y a en ce moment un vide juridique et ce vide juridique doit être réparé. Et rien ne nous interdit de fonctionner. Ce qui n’est pas interdit est autorisé.
On voit des gens déclarer leurs biens à votre institution quand ils prennent fonction. Mais, à moins que l’on se trompe, il n’y a pas en amont des enquêtes pour voir si ces personnalités déclarent tous leurs biens. On ne les voit pas non plus déclarer leurs biens quand ils quittent les affaires. N’assiste-t-on pas finalement à du folklore ?
Il ne s’agit pas de folklore ; loin s’en faut ! Soyez rassuré, les personnalités qui déclarent leurs biens le font sous le sceau de l’honneur.
Les déclarations incomplètes ou mensongères peuvent entraîner des sanctions. Par ailleurs, ces personnalités déposent la déclaration de leurs biens en fin de fonction. Pour les enquêtes, nous ne pouvons vous dévoiler ce qui est fait pour des raisons de confidentialité prévues par les textes en vigueur. Sinon, le problème de la déclaration des biens, est un problème d’information. Le président du Faso déclare ses biens lors de sa présentation de serment, les membres du gouvernement déposent leurs biens, car c’est prévu dans la Constitution. C’est après qu’une loi supplémentaire est venue ajouter d’autres personnalités et j’avoue que toutes ces personnalités ne sont pas informées qu’elles sont soumises à cette obligation de déclarer leurs biens. C’est pour cela qu’en 2008-2009, nous avons fait une sortie dans les 13 régions pour faire des conférences pour dire qui est concerné ou pas. C’est à la suite de cela, et depuis les élections municipales, que des maires ont commencé à déclarer leurs biens. Nous avons organisé tout dernièrement un atelier où nous avons évoqué la question. C’est lors de cet atelier aussi que des gens sont venus déclarer leurs biens. Donc ce n’est pas du tout du folklore. Ça commence à devenir une réalité.
Ces déclarations de biens se font sous le sceau de la confidentialité. Les enveloppes contenant la liste de biens sont scellées. Peut-on, dans ces conditions, parler encore de transparence qui est une vertu chère à la gouvernance démocratique ?
Comme je le disais tantôt, les textes actuels n’autorisent pas la publication des listes des biens des personnalités assujetties à cette obligation
Nous ne pouvons pas enfreindre ces textes au risque de violer l’article 6 de la Constitution qui prévoit que « la demeure, le domicile, la vie privée et familiale, le secret de la correspondance de toute personne sont inviolables. Il ne peut y être porté atteinte que selon les formes et dans les cas prévus par la loi ». La transparence, oui ! Mais dans le respect des lois en vigueur. Vous savez, la question de la propriété privée qui est une question fondamentale, et est, par conséquent, une question délicate qu’il faut traiter avec une certaine prudence. Nous, au sein du Conseil constitutionnel, nous avons créé ce que nous appelons des « commissions de vérification » et nous avons commencé à former les gens. Nous venons d’horizons divers et nous n’avons pas la même formation. Pour évaluer un bâtiment, il faut recourir à d’autres personnes pour chercher à savoir qui en est le vrai propriétaire, il faut aller aux services des impôts, du Domaine… Donc, c’est un travail fastidieux et nous allons nous y atteler pour que l’on puisse dire que le Conseil constitutionnel fait effectivement son travail.
Mais le personnel qui fait ce travail, n’a-t-il pas souvent peur ?
La peur de quoi ? Si on dit de contrôler les biens, on va trouver un immeuble appartenant à un tiers. Vous l’avez acquis en quelle année, bâti ou non bâti ? Si vous l’avez acquis non bâti, combien ça vous a coûté ? Si vous avez investi, je suppose que vous avez les factures qui peuvent attester que vous avez acheté tant de tonnes de ciment à tel endroit. Maintenant, si pendant la construction, un oncle vous a donné une tonne de ciment, vous allez comptabiliser. Et c’est ça le problème. Nous n’allons pas dire que ce bâtiment que vous voyez là appartient à tel ministre ou à tel président d’institution. Ce n’est pas notre travail. Et si la commission travaille, nous faisons la vérification et dressons un rapport de vérification. Si nous estimons qu’il y a une suspicion ou une fausse déclaration, nous saisissons les autorités supérieures, c’est-a-dire, soit le Premier ministre pour ce qui concerne les membres du gouvernement, ou le président pour ce qui concerne d’autres personnes et en ce moment, ces autorités sont chargées de saisir le procureur en vue d’engager des poursuites judiciaires.
Mais est-ce que cela est déjà arrivé ?
Ce n’est pas encore arrivé, parce que l’affaire de la déclaration des biens date de 1995. Moi je suis arrivé ici en septembre 2007 et quand j’ai commencé à regarder ce dossier, j’ai vu que l’on disait que la déclaration doit d’abord être faite sur un formulaire type élaboré par la Cour suprême. Or, la Cour suprême n’existe plus. Donc j’ai dit que comme c’est une question constitutionnelle, c’est le Conseil constitutionnel qui doit s’en occuper. Nous avons initié des missions dans des pays comme le Rwanda, très avancé dans la déclaration des biens. Ils sont partis et nous ont ramené de la documentation et aujourd’hui, nous avons élaboré un formulaire et c’est ce que les gens utilisent pour faire leur déclaration de biens. Il fallait constituer des commissions de vérification et c’est fait. Il ne reste plus qu’à passer à la phase d’études des dossiers. Il est prévu effectivement des sorties de contrôle.
Mais est-ce que vous pensez qu’il y a un problème, que ce soit le président ou le Premier ministre qui doive saisir le procureur, en cas de fausse déclaration constatée, parce que les ministres sont tout de même les ministres du président ?
J’ai précisé que les textes datent de 1995. Notre pays a évolué. Certainement que ces textes méritent d’être relus et rien ne dit qu’en cas de relecture de ces textes, l’on puisse donner au Conseil constitutionnel comme à l’Autorité supérieure de contrôle de l’Etat, la possibilité de saisir directement le procureur.
Est-ce un souhait ?
Pour plus de clarté, en tout cas, ce serait une possibilité. Puisque, eux, ils peuvent nous saisir, je ne vois pas pourquoi, nous, nous ne pouvons pas les saisir.
Nous avons lu quelque part que le président du Faso n’est pas obligé de déclarer ses biens à la fin de sa fonction. Est-ce juste ?
Non, le texte insiste là-dessus, à l’entrée de la fonction et à la sortie de la fonction. Il l’a toujours fait. Il y a eu une continuité, mais il a toujours déposé la liste de ses biens au début de chaque mandat, qu’il remet au cours de l’audience de prestation de serment.
Oui, on a souvent vu, mais et à la fin des mandats… ?
Mais il est toujours en fonction !
Mais pourquoi pas d’un mandat à l’autre ?
Ça, c’est le système américain effectivement. Par exemple, un ambassadeur nommé, même s’il n’a pas eu le temps de prendre fonction, dépose la liste de ses biens et le fait encore pour la nouvelle fonction où il est nommé. Finalement, on peut dire quel est l’intérêt ? En tout cas, le président a toujours déposé la liste de ses biens, mais comme il est toujours en fonction, nous nous ne sommes pas posé la question de savoir si à la fin de chaque mandat il doit déposer la liste de ses biens.
Il y a, sans doute, des gens qui rusent avec la loi. Ils attribuent certains de leurs biens à leurs cousins, enfants, frères, tantes, etc. Le Conseil constitutionnel a-t-il les moyens de démasquer et de punir ces gens qui trichent avec la loi ?
Effectivement, c’est un problème. Nous tenons toujours compte de la capacité de chaque propriétaire. Si, par exemple, moi, j’ai une parcelle bâtie que j’ai mise au nom de mon fils, nous allons nous demander si c’est une donation ou si c’est sa propriété. Si on voit que c’est quelqu’un qui n’a pas de travail, donc qui est sans revenu mais qui a un immeuble d’une certaine valeur, vous savez quand même que nous ne sommes pas dupes. Tout dépend de l’analyse que l’on fait. Je vous ai déjà indiqué que les personnalités qui font des déclarations incomplètes ou mensongères sont susceptibles d’être sanctionnées.
Quelle est la procédure en la matière ?
La procédure de dépôt et de vérification des listes des biens des personnalités, déterminées par la loi, a été instituée par la loi
n°22/95/ADP du 18 mai 1995. Cette loi prévoit que la Commission de vérification, créée au sein du Conseil constitutionnel, procède à la vérification des informations contenues dans la liste des biens soumise au Conseil constitutionnel et dresse un rapport de vérification. Ce rapport de vérification est transmis sous pli fermé confidentiel, soit au président du Faso, soit au chef du gouvernement, selon le cas.
Et en cas de suspicion sur les acquisitions ou sur l’origine des nouvelles acquisitions d’une personnalité concernée, le président du Faso ou le chef du gouvernement transmet sans délai le dossier au Procureur général près la Cour de cassation.
De même, en cas de fausse déclaration, de déclaration inexacte ou incomplète ou de dissimilation dûment établies par la Commission de vérification, il appartient au chef du gouvernement d’en tenir rapport au président du Faso, sans préjudice des poursuites judiciaires.
Pour l’exécution de cette procédure de vérification, le Conseil constitutionnel, en collaboration avec d’autres services étatiques, dispose des moyens pour démasquer les éventuels cas de fraude.
Je crois savoir qu’il existe un avant-projet de loi sur le délit d’apparence
Il y a effectivement un texte sur le délit d’apparence. L’infraction est un fait prévu et réprimé par la loi. Par exemple, si je prends votre portable, je commets un vol, acte interdit par la loi. Mais je vois que vous portez une chemise, un pantalon et des lunettes, c’est une apparence ; mais est-ce que pour cela, je peux vous envoyez en prison ? C’est à ce niveau que la question se pose. A partir de quels éléments l’apparence devient-elle une infraction ? Le problème c’est comment déterminer l’infraction ? Je crois que le texte a circulé pendant un certain temps et actuellement, je ne sais pas où il se trouve. Il y a d’autres textes encore.
Même quand on voit quelqu’un avec un bien que visiblement ses revenus ne lui permettent d’acquérir ?
Cela est une forme d’enrichissement illicite et c’est prévu par la loi, le Code pénal, depuis le temps de la Révolution ou même bien avant. C’est le même cas avec le trafic d’influence et la corruption.
Cet avant-projet sur le délit d’apparence est mort-né alors ?
Moi, je suis président du Conseil constitutionnel. Ma tâche, c’est de protéger la Constitution. La gestion de l’Etat c’est ailleurs, même si c’est avec ma contribution. Mais si on envoie la loi ici, nous, nous dirons ce que l’on en pense. Nous ne pouvons pas préjuger.
Mais Les Editions « Le Pays » ont envoyé la loi, dites ce que vous en pensez ?
Quand on va recevoir, on dira ce qu’on en pense. Parce qu’il faut que ce soit voté par l’Assemblée nationale avant qu’on nous l’envoie. Le procédé est le suivant. Lorsqu’une loi est adoptée par l’Assemblée, la promulgation doit intervenir dans les 21 jours qui suivent, par le président du Faso, quand il n’y a pas d’urgence. Mais si l’Assemblée déclare l’urgence, la loi doit être promulguée dans les 8 jours. Et si nous, nous sommes saisis, nous avons l’obligation de répondre avant les 8 jours. Sinon, en temps normal, le délai de promulgation est suspendu jusqu’à ce que nous nous prononcions sur la loi en question.
Est-ce qu’il n’y a pas de problème que l’Assemblée nationale fonctionne actuellement, or le Sénat n’est pas encore mis en place. Que dire des décisions que cette Assemblée prendra ?
Tant qu’il n’y a pas l’effectivité du Sénat, les autres institutions continuent de fonctionner comme auparavant. Et seulement dans la révision de la Constitution, ils n’ont pas précisé qu’en attendant la mise en place du Sénat, les autres institutions continuent d’exercer la plénitude de leurs attributions. C’est cette phrase qui a manqué.
N’a-t-on donc pas besoin d’une disposition expresse ?
Cela, c’est aussi une question de gestion d’Etat. Attendez, certainement que d’autres personnes se prononceront. Certainement qu’on trouvera une solution.
Mais du point de vue de la Constitution, il n’y a pas de problème ?
Non, il n’y a pas de problème.
Avez-vous des relations avec les autres Conseils constitutionnels de la sous-région ? Si oui, quels types et qu’en tirez-vous ?
Nous avons des relations avec les juridictions constitutionnelles de la sous-région pour des besoins d’échanges d’expériences et de coopération.
Au plan multilatéral, nous sommes membres d’institutions comme l’Association des Cours constitutionnelles ayant en partage l’usage du français (ACCPUF), la Conférence des juridictions constitutionnelles africaines (CJCA), l’Association africaine des hautes juridictions francophones (AAHJF) et la Conférence mondiale de la justice constitutionnelle (CMJC).
Nous sommes membres fondateurs de la CJCA qui a tenu son récent congrès à Cotonou, au Benin, courant mai 2013, auquel nous avons participé, ainsi que de l’ACCPUF dont notre pays a assuré la présidence pendant trois ans.
En outre, durant les journées portes ouvertes que nous avons organisées en novembre 2010, la Cour constitutionnelle du Bénin était l’invitée d’honneur. Vous voyez donc que nous entretenons des relations suivies avec nos homologues de la sous-région pour des échanges mutuellement avantageux.
Vous avez passé quelques années à la tête du Conseil constitutionnel. Quels en sont vos bons et mauvais souvenirs ?
Vous parlez au passé alors que je suis toujours président du Conseil constitutionnel. Je vous ferai part de mes bons et mauvais souvenirs lorsque j’aurai cessé d’assumer mes fonctions actuelles. Cela dit, encore merci pour l’intérêt que vous portez au Conseil constitutionnel.
Je vous réitère ma disponibilité pour vous éclairer sur tout autre question concernant notre institution.
Propos recueillis par Boureima DEMBELE et Saidou ZOROME et retranscrits par Boureima DEMBELE