Des étudiants ont été définitivement exclus de l’Université de Koudougou. La sanction est lourde. La mesure gagnerait à être levée.
Les faits. 03 octobre 2012. Université de Koudougou. Après une réunion du conseil de discipline, 06 étudiants sont définitivement exclus des universités publiques et privées du Burkina Faso et huit autres interdits d’inscription pendant 5 ans àl’université de Koudougou. Leur tort ? Avoir « perturbé les cours et violenté un enseignant », Mahamadou Oubda, le mardi 04 septembre 2012.
Ces sanctions jugées « très sévères » sont immédiatement et vivement contestées par les étudiants à Koudougou comme à Ouagadougou. Les universités au sein desquelles règne déjà un calme précaire, renouent avec les grèves et autres mouvements estudiantins.
Aujourd’hui, il ne s’agit pas de jeter de l’huile sur le feu ou de prendre position pour X ou pour Y. Nous nous intéressons plutôt à l’opportunité et surtout à la proportionnalité de la peine par rapport à la faute commise.
L’université a vocation à être un « temple du savoir » où est censée être formée l’élite et non un camp d’entrainement à la pratique d’une certaine intifada.
Du fait de cette fonction originelle, toute violence, d’où qu’elle vienne et quelque soit sa nature, est absolument à proscrire et à condamner de la plus virulente des manières. Dans toute revendication, il faut savoir raison garder et éviter les positions extrémistes et égocentriques.
La lutte syndicale est admise. Mais celle-ci doit respecter une certaine éthique qui bannit l’apologie de la pensée unique et du caporalisme.
Un étudiant est à l’université avant tout pour étudier. Cet objectif ne peut être atteint par la perturbation des cours. La violence (verbale ou physique) envers un professeur n’est pas non plus digne d’un étudiant bien que le professeur doive aussi être au dessus de tout reproche. C’est une dialectique comportementale.
Même si les étudiants s’en défendent, c’est sur ces principaux reproches que l’administration de l’UK s’est basée pour prononcer les sanctions à leur encontre. A considérer la peine, on se demande bien s’il restera encore un seul étudiant dans les universités du Burkina tant les notions de « perturbation de cours » et de « violence » restent absconses et donc sujettes à interprétation subjective.
Des textes existent certes. Mais doit-on systématiquement sanctionner des étudiants qui réclament de meilleures conditions d’études ? A partir de quand des « perturbations de cours » ou des « violences » entrainent une exclusion définitive de toutes les universités du Burkina ? De quel type de « perturbations » et de « violence » s’agit-il ? Qui en décide ? Ces sanctions sont-elles irrévocables ou soumises à des voies de recours ?
Voilà un ensemble de questions pour lesquelles des réponses précises sont nécessaires. Ces réponses sont d’autant plus importantes que l’Université doit demeurer un « espace de liberté » autant pour les étudiants que pour les enseignants. Les attitudes d’embrigadement conduisent toujours à des affrontements.
Dans le cas d’espèce de l’Université de Koudougou, l’administration semble avoir eu la main trop lourde dans la mesure où l’enseignant Mahamoudou Oubda affirme n’avoir pas été agressé. Cette thèse est également soutenue par l’Union Générale des Etudiants Burkinabè (UGEB).
De plus, les étudiants affirment avoir été totalement tenus à l’écart du conseil de discipline alors qu’ils devraient statutairement y siéger. Leur présence aurait sans doute permis de mieux apprécier les faits pour déboucher à des solutions consensuelles.
Au regard de la tournure prise par les évènements, il urge de renouer le fil du dialogue. Le 15 octobre dernier, les ministres Jérôme Bougma et Moussa Ouattara ont été dépêchés à Koudougou par le Premier Ministre Luc Adolphe TIAO pour rechercher une solution à la crise avec l’ensemble des acteurs. Les uns et les autres sont dans un bon état d’esprit et sont prêts au compromis pour la « cohésion et la paix sociale». C’est une dynamique à maintenir.
Ces étudiants ne sont pas des parias. Ils doivent aussi contribuer à la construction du Burkina. Il faut donc lever, ou à tout le moins atténuer ces sanctions inopportunes et excessives et instaurer un dialogue permanent afin que les différents acteurs de l’UK y vivent en bonne intelligence. Tout le monde y gagne.