Sa délectation devant une bouteille de bière, de la torture de Samuel Doe le 9 septembre 1990 et de l’exécution de ce dernier le 10 septembre, sa férocité dans les massacres d’adversaires réels ou fantasmés resteront à jamais au Libéria comme le sommet d’une cruauté inouïe en ce 20e siècle.
Prince Johnson a excellé comme seigneur de guerre des années 80 au Libéria aux côtés d’un autre tueur, Charles Taylor (lequel purge une peine de 50 ans dans une prison britannique), Prince Johnson eut mille et une vie, qui le conduiront de guérillero à sénateur de l’Etat de Nimba en passant par la case pasteur. Ses crimes odieux au Libéria et ailleurs, il les avoua puisqu’il confessa faisant partie des sicaires qui ont commis le régicide du 15 octobre 1987 qui emporta le capitaine Thomas Sankara au Burkina Faso.
La terreur qu’inspirait Johnson n’avait d’égale que sa capacité à faire le mal à un être humain. Mais souvent, ce genre de personnage arrive à survivre et même à se refaire une vie après l’innommable qu’il a perpétré. Après son passage devant la Commission vérité et justice, après la chute de Taylor, Prince Johnson menait une vie tranquille entre Monrovia et Nimba, prêchant au culte en tant que pasteur et s’était piqué même à vouloir être président en 2011 puisqu’il faut un candidat et occupa la 3e place, après la présidentielle.
La justice humaine n’a pas pu solder les comptes avec prince Johnson, car dans ces contrées que sont le Libéria et la Sierra-Léone, il est des noms qui font frémir car synonyme de tortionnaire et de tueurs, Foday Sankoh en Sierra-Léone (homme des «manches courtes et des manches longues» du nom des amputations du bras ou de la jambe des victimes) ou prince Johnson au Liberia sont de cette race. Le destin faisant souvent les choses incompréhensibles, ces gens qui donnaient la mort facilement meurent sur leur lit de mort, et souvent après une vie tranquille.
Ainsi en est-il de prince Johnson qui a poussé son dernier souffle, hier 28 novembre 2024 dans un hôpital du Libéria à 72 ans après se l’avoir coulé douce près de 40 ans, après les douloureux évènements des années 80. Qui l’eut cru ?
La justice temporelle a été impuissante à châtier prince Johnson après qu’il s’était drapé dans les oripeaux de pasteur puis de sénateur. Mais la justice divine tranchera sans doute, toutes ces vies ôtées de par ses mains ou sous ses ordres, ces tortures, ce mal commis pour le pouvoir, même l’habit de pasteur, encore moins du sénateur ne peuvent les effacer, surtout dans les cœurs des parents des victimes.
Crimes ne riment pas toujours avec châtiments sur terre. Les bourreaux échappent quelquefois aux sanctions, Johnson emporte ses crimes dans l’au-delà. La rédemption que Prince Johnson disait avoir obtenue en devenant berger (pasteur), seul Dieu pourra en juger. Mais entre la justice des hommes et celle intemporelle, nul ne sait ce qu’il y a exactement, mais toutes les religions professent que la vie est sacrée et qu’il faut la justice que la justice règne parmi les hommes . UNE