S’il y a un animal dont la viande est très prisée actuellement dans la ville de Ouagadougou, au Burkina, c’est bien le porc. Reportage.
Par Nicolas Bazié
Le porc au four ! Certains amateurs préfèrent l’appeler «Gabriel» ou «P.F». C’est un mets très prisé à Ouagadougou, la capitale du Burkina. Sa cuisson au four est l’un des modes de préparation le plus populaire. Il en existe des lieux de vente un peu partout dans la ville.
Ce mercredi 14 février 2024, les fidèles catholiques entament 40 jours de carême. Consequence de cette obligation religieuse, plusieurs points de vente de porc au four sont fermés. Difficile d’en trouver un ouvert.
A 12h 06, au quartier Sin yiri, Séverin Bonkoungou, est présent à son poste. Il propose à ses clients du porc au four qu’il prépare lui-même. Une bonne nouvelle pour des amateurs qui ont sillonné de nombreux quartiers pour en acheter.
Chacun s’impatiente. Séverin tente de rassurer les clients en leur déclarant : «C’est presque prêt. » 30 minutes après, les premiers morceaux de viande cuits à point sortent du four.
Les files d’attente se forment peu à peu aux abords de son lieu de vente, non loin de la route. Chaque client espère se faire servir les meilleurs parts. A l’aide d’une fourchette, les clients choisissent les morceaux de viande, environ 1000 F. CFA l’unité, et les mettent dans une assiette.
Séverin Bonkoungou, machette à la main, découpe ensuite la viande en de petits morceaux. «Tu devrais abattre près de six porcs parce qu’il y a une pénurie de viande aujourd’hui à Ouagadougou », lance un client, la tête baissée, le regard perdu dans le grand plat contenant toute la viande de ce jour.
Dans la capitale burkinabè, les spécialités de préparation de mets à base de porc sont nombreuses avec des appellations variées : «porc au rabilé» (à la levure), « porc au soumbala », «porc au vin », «porc grillé».
Ces noms de mets poussent les clients avides de saveurs nouvelles, à parcourir parfois de grandes distances pour en déguster.
Chez le jeune Séverin Bonkoungou, c’est le «porc au rabilé», sa spécialité, qui est recherché. Le porc au four et Ismaël Kafando, un client de Séverin Bonkoungou, venu du quartier dit Zone 1, c’est une longue histoire.
Kafando raconte lui-même son parcours du jour pour se procurer sa viande préférée : « Aujourd’hui, je suis passé voir le “Roukoukou” (un autre nom du porc au four). Je mange cette viande depuis tout petit. J’ai fait le tour de la ville et c’est ici que j’ai finalement trouvé la viande de porc qui est l’une des meilleures. C’est propre ! »
Bertrand Siguiré, lui, est un habitué de chez Séverin Bonkoungou. Il y passe souvent manger. Il dit apprécier beaucoup le porc au four du jeune Séverin. « Ce qu’il prépare est très bon», fait-il savoir, le sourire en coin.
Les assaisonnements valent leur pesant d’or chez Séverin Bonkoungou qui travaille avec deux autres jeunes. Oignons, tomates, concombres, piment frais ou sec et vinaigre servent d’assaisonnements à la viande.
Le marché est en forte croissance selon Séverin Bonkoungou. Et cela fait maintenant 10 ans qu’il affirme vendre du porc au four. «J’abas 4 à 5 porcs par jour» déclare-t-il, ajoutant avoir toujours des clients.
Généralement, la viande est prête à partir de 10h chaque matinée et ce jusqu’à 18h. En plus de Sin Yiri, la famille Bonkoungou dit posséder d’autres lieux de vente de ce mets à Saaba et à Zogona, toujours dans les environs du centre ville de Ouagadougou
Trouver du porc, la croix et la bannière
Pour trouver les animaux pour sa cuisine, Séverin Bonkoungou doit quitter Ouagadougou et se rendre dans des villages éloignés de la capitale. C’est précisément dans les provinces du Boulkiemdé, du Ganzourgou et du Kouritenga qu’il va s’approvisionner en porcs.
Une fois dans ces localités, il dit que trouver les animaux n’est pas aussi une mince affaire. «Il est difficile aujourd’hui de trouver du porc. Ceux qu’on nous présentent ont des prix élevés. Un cochon peut coûter 50 000 F CFA, 60 000 voire 100 000 F.CFA. Les montants proposés dépendent de la forme de l’animal » raconte notre interlocuteur.
Séverin Bonkoungou reconnaît néanmoins faire du bénéfice de son activité. Environ 100 000 F. CFA, par exemple dit-il.
Après écoulement de la viande, la graisse de porc est mise dans des bidons de 20 litres et vendue à des femmes. «Elles viennent à chaque fois acheter de la graisse. Je ne sais pas ce qu’elles font avec. Le bidon est vendu à 11 000 F. CFA», conclut-il.