Ceci est une déclaration de L’Ordre des Avocats du Burkina Faso, sur l’« enlèvement » de Maître Guy Hervé Kam. Lisez plutôt !
Au petit matin de ce 25 janvier 2024, l’Ordre des avocats a été saisi de ce que la veille, dans la nuit du 24 au 25 janvier 2024, Maitre Guy Hervé Rommel Kam, Avocat, en provenance de Bobo-Dioulasso où il séjournait dans le cadre de divers dossiers au Tribunal de Grande instance puis au Tribunal de commerce de ladite ville, a été enlevé par des personnes inconnues à sa descente de l’aéronef lorsqu’il accomplissait les formalités de police, puis emmené vers une destination inconnue, sans autres formes de procès.
Muni de cette information, l’Ordre a pris attache avec les Procureurs qui ont compétence sur la ville de Ouagadougou, lesquels ont déclaré ne pas être à l’origine de ces agissements ni n’en être autrement informés. C’est finalement en faisant le tour des services étatiques que l’Ordre s’est rendu à la Direction de la Sûreté d’État de la Police nationale où il s’entendra dire que Me Guy Hervé Kam est bien dans les locaux de la dite Süreté. »
Sur ce,
Le Barreau rappelle et souligne que l’article 6 du Règlement n°05 UEMOA portant harmonisation des règles régissant la profession d’avocat dans l’espace UEMOA claironne les avocats ne peuvent être entendus, arrêtés ou détenus sans ordre du procureur général près la cour d’appel ou du président de la Chambre d’Accusation, le bâtonnier préalablement consulté.”
Cette régle est une garantie de la liberté et de l’indépendance de l’Avocat, consubstantielles à son état, et sa finalité est de permettre au Bâtonnier de s’assurer que, sous le prétexte ou le couvert de préventions, l’autorité étatique (administrative ou judiciaire) ne veuille nuire à un avocat du fait de l’exercice de son magistère.
Cette obligation de consultation préalable du Bâtonnier emporte des implications dont la principale est la communication préalable des éléments de faits matériels qui seraient reprochés à l’avocat, seule modalité par laquelle le Bâtonnier peut s’assurer qu’il n’y a aucun lien avec l’exercice professionnel de l’avocat ou sa liberté et son indépendance. Cela se fait régulièrement depuis l’entrée en vigueur du Règlement UEMOA tant par les Officiers de police judiciaire que par les parquets et les juges d’instruction, sans que cela n’entrave la recherche de la vérité. Rien ne saurait justifier que des libertés soient prises avec cette règle.
En l’espèce, il n’a rien été de tout cela. Il s’agit d’une atteinte grossière, grave et délibérée aux règles garantissant la liberté et l’indépendance de l’avocat, essence de notre profession, le tout, sur fond de mépris de notre Ordre. Cela ne saurait être ni admis ni toléré pour quelque motif que ce soit. D’ailleurs, c’est la foi en cette garantie qui fonde aussi le sacrifice consenti par les avocats aux côtés des faibles comme des forts, les uns devenant les autres et inversement dans l’histoire des Nations.
Le Barreau souligne avec force l’impératif qu’il y a pour l’autorité, toute autorité, à demeurer dans les références et les commandements de la loi. Du reste, l’histoire récente de notre pays a montré que l’autorité qui a peu de respect pour la règle ne rend service à rien ni à personne, pas même à elle-même.
En conclusion, de tout ce qui précède, le Barreau :
Proteste avec vigueur et condamne avec fermeté le mépris délibéré et inconsidéré des dispositions garantissant la liberté et l’indépendance de l’avocat et du Barreau;
Appelle les avocats à se mobiliser et rester dans l’attente des résolutions à venir afin que cessent les violations relatives à la liberté et à l’indépendance des avocats et du barreau ;
Exige la relâche immédiate et sans condition de Guy Hervé Kam et, des raisons d’une quelconque interpellation existaient, que soient suivies les règles de procédure ;
Reste attentif sur les suites à donner aux présentes.
Ouagadougou, le 25 janvier 2024