Ouagadougou - Le Procureur général près la Cour des comptes Emile Badou Toé a sérié lundi, ses collègues magistrats en « rats laveurs, voleurs et palmistes » en présence du président du Faso Blaise Compaoré, a-t-on constaté.
« L’indépendance de la magistrature est un piège à rats d’une extrême variété », a déclaré Emile Badou Toé à la rentrée judiciaire 2013-2014 dont la préparation cette année a été dévolue à la Cour des comptes.
Comparant entre temps les magistrats à « des rats laveurs, voleurs et palmistes », M. Toé a dans un discours fleuve, passé en revue les dysfonctionnements du système judiciaire burkinabè.
« Le raton laveur » correspond selon M. Toé, au « magistrat loyal qui a les mains propres », tandis que « le rat voleur est l’animal totémique du magistrat corrompu, partial, sans personnalité », a-t-il poursuivi.
Pour le Procureur général, « Le rat palmiste symbolise le magistrat équilibriste, trapéziste qui, en fonction de ses intérêts et au regard des risques encourus ou de l’absence de risque, va faire montre de loyauté et d’intégrité ou à l’inverse de bassesse d’esprit et d’âme ».
Poursuivant son réquisitoire, M. Toé a soutenu que « la Cour des comptes est laissé pour compte, faute d’officiers, de sous officiers et d’hommes du rang sous ses ordres ».
En cette rentrée judiciaire placée sous le thème « le juge au sens de l’article 124 de la Constitution », Emile Badou Toé a classé les magistrats en « juges professionnels » et en « juges non professionnels ».
Les magistrats du parquet et ceux du siège constituent selon lui, des « juges professionnels ».
Les juges-citoyens (assesseurs, jurés), les juges-représentants (personnes représentant des groupes socioprofessionnels, socioculturels) et les juges-experts (recrutés ou nommés), a-t-il avancé, sont des « juges non professionnels ».
Pour M. Toé, « le recours aux fonctionnaires non magistrats pour composer la Cour des comptes et le Conseil d’Etat engendre un problème de plan de carrière, de sécurité et de promotion ».
Emile Badou Toé, précédemment président de la Cour d’appel de Ouagadougou puis de Bobo-Dioulasso (Ouest), a été installée Procureur général près la Cour des comptes le 15 juillet 2010.
M. Toé avait alors placé, sa mission sous le signe de « la rigueur et de l’indépendance ».
Le président du Faso Blaise Compaoré qui a assisté à la rentrée judiciaire a qualifié de « séance éducative », les différentes interventions qui se sont succédées.
M. Compaoré, par ailleurs président du Conseil supérieur de la magistrature, fonde l’espoir que les résultats de telles rencontres permettront d’assurer à la fois, l’efficacité et l’indépendance de la justice pour une meilleure accessibilité et une compréhension du justiciable.
Cette rentrée judiciaire ambitionne « de donner une bonne image du juge afin que le justiciable se sente vraiment défendu et protégé par nous qui sommes chargé de dire le droit », a affirmé le ministre de la Justice Dramane Yaméogo.
Au Burkina Faso, de nombreux actes d’auto-justice telles que les vindictes populaires lors des accidents de circulation, les conflits autour de la chefferie traditionnelle et les affrontements éleveurs-agriculteurs, sont de plus en plus légion.
En juin dernier, les trois syndicats de magistrats ont demandé la démission de M. Yaméogo pour avoir soutenu son collègue en charge des Mines dans une affaire judiciaire portant sur 23 kg d’or frauduleux.