L’opposition politique a tenu le 17 juillet dernier, une assemblée générale autour du chef de file pour voir clair dans la gestion d’un reliquat d’argent public dont certains n’ont pas hésité à demander la répartition pure et simple entre eux.Des extraits du rapport issu de cette rencontre.« En guise d’introduction, le CFOP (NDLR : chef de file de l’opposition politique) a indiqué qu’il a entrepris un certain nombre de démarches afin que la question du reliquat ayant servi à la prise en charge des délégués des bureaux de vote lors des élections couplées du 2 décembre 2012 et celles complémentaires du 17 février 2013 soit réglée ». Ce qui montre qu’il y avait problème. Effectivement, puisque dans la même introduction, Zéphirin Diabré a invité les responsables de partis à intervenir avec un esprit de courtoisie et de faire en sorte que la question des finances ne compromette pas la cohésion au sein de l’opposition politique ». Aussi, maître Sankara devrait « expliquer comment ces ressources ont été gérées ; préciser là où se trouve le reliquat et échanger sur sa destination (NDLR : le reliquat) si le temps le permet ».
Maître Sankara à qui la parole a été donnée en premier, celui-ci, a indiqué qu’après les élections, une réunion des chefs de partis s’est tenue le 14 décembre et un procès-verbal a été établi et qu’un rapport sur la gestion de ces ressources aurait été remis individuellement aux partis de l’opposition. Mais qu’après « la réunion du 14 décembre, il a été saisi par Monsieur Philippe Ouédraogo et Monsieur Djésouma Sanon au nom de certains partis qui insistent pour que le reliquat soit reparti entre les partis » alors qu’à la rencontre du 14, il n’y a eu de consensus sur la question. « De ce fait, relève le rapport, il a rendu compte à l’Etat qui est l’allocataire de ces fonds. Le MATS (ndlr : ministère de l’Administration territoriale et de la Sécurité) aurait « recommandé que le CFOP puisse en faire usage ». Pour conclure son propos, Maître Sankara a « réaffirmé qu’il ne souhaitait plus être interpellé sur sa gestion si le bilan venait à être adopté ».
Après Maître Sankara, le président de la commission chargée de la mobilisation des délégués pour la surveillance des bureaux de vote a pris la parole pour indiquer « que la commission a prévu de mobiliser 379 000 délégués et qu’elle n’a pu mobiliser que 16 145. Sur la base de cet effectif 32 290 000 F ont été payés d’où un reliquat de 28 068 000 F CFA.
« Ensuite, ce fut le tour du CSAF (ndlr : chef du service administratif et financier) qui a pris la parole afin d’expliquer l’état de la gestion des ressources financières allouées pour le suivi des élections, résumé dans un tableau remis aux chefs de partis. Ce tableau regroupait deux points essentiels à savoir les ressources et les dépenses », lit-on dans le rapport qui indique que « les dépenses tournaient autour de l’opération électorale et l’appui institutionnel dont le total s’élevait à 43 465 309 d’où un reliquat de 16 892 691 ». Selon le CSAF, Boureima Thiombiano, « le fait de l’enrôlement biométrique, le CFOP-BF a connu des problèmes financiers et une partie du reliquat a été utilisé pour faire face aux charges de l’institution ». A ces déclarations, « le président de séance » « a invité Monsieur Boureima Thiombiano « à donner l’information sur la position de l’argent ».
En réponse, « le CSFA a fait cas du fait que ce reliquat se trouve dans les comptes de l’UNIR/PS (ndlr : Union pour la renaissance/Parti Sankariste). Parce que selon lui, « Me Sankara lui avait demandé de fermer les comptes du CFOP-BF du fait de la fin de son mandat » et que c’est en « accord avec le trésorier de l’UNIR/PS (que) le reliquat a été logé dans le compte du parti ».
Prenant la parole, Philipe Ouédraogo ne comprend pas, puisqu’à une rencontre qu’il a eu, lui et Djesouma Sanon, tous mandatés par des responsables de partis politiques, « le CFOP sortant a dit que l’argent avait déjà été restitué au MATS et qu’il avait déjà fait son bilan ». En outre, au regard des documents qui ont été fournis, « Monsieur Philippe Ouédraogo a indiqué qu’il y a une différence entre le reliquat réel et ce qui est disponible. Il y a eu un ensemble d’opérations complémentaires qui ont été financées et qui relève de la commission et qui est normal. Mais pour le volet institutionnel, il trouve qu’il y a problème car c’est le budget du CFOP-BF qui devait supporter cette rubrique et qu’on pouvait donc se demander s’il ne peut pas avoir remboursement de cette somme ». « Monsieur Philipe Ouédraogo a aussi fait la remarque selon laquelle il n’est pas normal que le reliquat soit logé dans les comptes de l’UNIR/PS. Un compte spécial, aurait pu être créé à cet effet ». Pour Philipe Ouédraogo du PDS/Metba, il faut repartir le reliquat sur la base des listes non-prises en compte.
Mamadou Kabré du PRIT/Lanaya s’est interrogé sur la différence entre le montant donné par le président de la commission et celui du CSAF. En outre, Mamadou Kabré qui venait de savoir que l’argent se trouve dans les comptes de l’UNIR/PS a voulu savoir « qui est le bénéficiaire des intérêts qui seront produits, et s’il y a des charges inhérentes, qui les assume ». Pour lui, il « faut régler la question de la clé de répartition et que l’argent utilisé pour l’appui institutionnel soit remboursé ».
Djésouma Sanou estime que si « Maître Sankara avait convoqué une réunion dans la période intermédiaire pour faire le point de la situation on aurait évité les suspicions et les désagréments actuels ». Toutefois, il a souhaité « que les uns et les autres tiennent compte de l’invitation du CFOP actuel qui veut privilégier la cohésion de l’opposition afin d’éviter que le CDP ne fasse de la récupération ».
Hubert Bazié de la Convergence de l’Espoir « a voulu savoir la base et la manière par laquelle le CSAF a été recruté, les critères de gestion ». Maître Sankara lui répond « que la loi sur le statut de l’opposition permet au CFOP d’organiser son cabinet. En l’absence de règlement intérieur, son recrutement a été fait sur une base politique ; le CFOP étant libre de s’organiser ». « Le CSAf a lui-même dit qu’il a une expérience dans la gestion et qu’il disposait aussi des diplômes requis… ». Hubert Bazié n’a pas apprécié les propos des deux et « a dit de ne parler d’expérience car Thomas Sankara disait sous la révolution à ceux qui parlaient d’expérience qu’il peut s’agir d’expérience dans le vol ». Après ce préalable, il indique « qu’il y a des fonds pour l’administration du CFOP-BF et des fonds alloués aux partis pour les activités et le CFOP en son temps ne pouvait pas user de ces fonds comme il veut. L’appui institutionnel est inacceptable, autrement, on cautionne un détournement ».
Reprenant la parole, « le nouveau CFOP a fait observer que s’il savait que l’argent n’était pas retourné, il n’aurait pas envoyé le directeur de cabinet au niveau du MATS car le pouvoir peut soupçonner qu’il y a des problèmes autour de ce reliquat ». Ce qui est tout à fait réel car il y a des problèmes autour de ce reliquat. Cependant, « le CFOP, président de séance a rappelé que Maître Sankara a souhaité avoir le quitus de gestion, qu’il souhaitait que les partis se prononcent afin que la question puisse être tranchée. Le CSAF a pris l’engament de rendre le reliquat ». Mais Maître Sankara « assure que l’UNIR/PS est pour le retour de l’argent au MATS… »
Les responsables des partis présents à la rencontre ont néanmoins donné leur quitus, « mais à conditions que les gens reconnaissent leur tort ». « Qu’on évite des choses pareilles à l’avenir », « pour ne donner raison au CDP ». « Que les journalistes ne prennent pas connaissance de cette affaire », parce que «le CFOP est une jeune institution et même s’il y a eu problème de gestion, on ne devrait pas tenir rigueur ». Mamadou Kabré indique « que la rue est déjà au courant de tout et qu’il est gêné de donner son quitus. Selon lui, Me Sankara devrait demander ce quitus au MATS ».
Accommodant, « le président de séance a noté quelques réticences et a demandé à Me Sankara de trouver les mots convenables pour permettre de débloquer la situation ». Me Sankara s’est expliqué sans convaincre puisque Hubert Bazié retorque que « quand quelqu’un ne peut pas manger des saucissons, il prépare de la soupe de boyaux ».
Me Sankara aura son quitus. Zéphirin Diabré, lui, a mis en place un comité pour rédiger une résolution à cet effet. Djésouma Sanon, en guise de conclusion au rapport, « a insisté sur le principe que tout le monde est d’accord que c’est un sujet interne et qu’il fallait éviter de présenter une faille au profit des adversaires ». Voilà comment l’opposition politique a géré de l’argent public à elle allouée par le gouvernement pour des élections qu’elles voulaient transparentes et crédibles.