Amadou Ba, qui, il y a moins de 10 ans était en disgrâce après un passage au ministère des Finances, a été appelé de façon impromptue en septembre 2022 par le chef de l’Etat Macky Sall pour être bombardé premier ministre au nez et à la barbe de caciques de l’APR, et de Benno Bokk Yakaar, qui s’attendaient à occuper ce poste. A l’époque déjà, d’aucuns subodoraient que Macky Sall le préparait comme probable dauphin, au cas où lui-même ne serait pas candidat à un 3e mandat. Ils ont eu le nez creux, surtout qu’Amadou Ba retrouvait un poste de premier ministre que le chef de l’Etat avait biffé, et qu’il ramène dans l’organigramme du paysage institutionnel.
Le voilà à présent comme le cornac de l’emblème de la coalition présidentielle Benno Bokk Yakaar. A 62 ans, il coiffe au poteau, des potentiels dauphins comme Abdoulaye Daouda Diallo du Conseil économique et social, Mohammed Dionne ex-chef de gouvernement, ou Aly Ngouille Ndiagne, titulaire du département de l’Agriculture.
Est-ce un choix consensuel ? Difficile de répondre de façon tranchée, ce qui est sûr c’est que Macky Sall a dû convaincre ou forcer un peu pour imposer ce poulain Amadou Ba, avec lequel il partage un long compagnonnage dans l’APR, le parti originel. Il est évident que les «recalés» grincent des dents ou font des félicitations feintes. Déjà, il se susurre qu’un «front anti-Ba» est en gestation, laquelle pourrait accoucher de candidatures scissipares, forcément dissidentes !
Alors, Amadou Ba, le bon cheval de l’écurie de Benno Bokk Yakaar ? On peut en douter : technocrate chevronné sans doute, mais jugé plus commis de l’Etat et militant de la 25e heure au parti. Politiquement, il serait infirme d’une réelle représentativité sur le terrain. A Benno Book Yakaar, certains estiment que l’option Amadou Ba comme porte-étendard de la mouvance présidentielle relève plus de considérations personnelles, ce serait l’épouse de Macky Sall, qui l’aurait imposé, que de l’existant politique. A y observer, Amadou Ba n’est ni un animal politique, ni un baron dans une région influente, pour espérer fédérer toute la machine Benno Bokk Yakaar à son nom.
Quand on connaît les conditions dans lesquelles Macky Sall a étrenné le mandat suprême en 2012, celles de sa renonciation à un 3e bail, et les appétits voraces au sein de son camp politique, l’idéal et la realpolitik auraient recommandé de jeter son dévolu sur un candidat très politique en lieu et place d’un apparatchik certes, mais politiquement faible. Avec les nouvelles lois permettant à Khalifa Sall et Karim Wade de compétir, et au regard de l’atmosphère politique actuelle, Amadou Ba pourrait constituer un double handicap plutôt qu’un avantage : implosion de Benno Bokk Yakaar et perte de la présidentielle en 2024 ! Assurément, c’est une promotion à haut risque que vient de faire Macky Sall à Amadou Ba !