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L’Invité de la Rédaction : Adama Bidiga, PDS communale de Bobo-Dioulasso « Les lotissements passés n’ont pas suivi les procédures

Publié le jeudi 31 aout 2023  |  Sidwaya
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© Autre presse par DR
L’Invité de la Rédaction : Adama Bidiga, PDS communale de Bobo-Dioulasso « Les lotissements passés n’ont pas suivi les procédures
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Haut-commissaire de la province du Houet depuis juillet 2022 et Président de la délégation spéciale (PDS) communale de Bobo-Dioulasso, Adama Bidiga a accordé une interview à la rédaction de Sidwaya Bobo, le mercredi 9 août 2023. De la gestion de la délégation spéciale à la question foncière en passant par l’aménagement de la voirie, les lotissements et la situation sécuritaire, celui-là qui a été le secrétaire général du syndicat des administrateurs civils du Burkina Faso a abordé, sans tabou, la vie de sa commune, durant près de deux heures.

Sidwaya (S) : Au lendemain de votre prise de fonction comme PDS de la commune de Bobo-Dioulasso, vous avez lancé un vaste chantier de reprofilage de la voirie urbaine. Ce chantier était-il si prioritaire ?

Adama Bidiga (A.B.) : Lorsque nous avons pris fonction, le 28 juillet 2022, nous avons rencontré l’ensemble des couches sociales. La plupart des préoccupations des populations tournaient autour des questions de voirie et d’assainissement. Pour nous, c’est plus qu’une priorité parce que sans voies d’accès aux quartiers et aux secteurs, ce n’est pas évident qu’on puisse mener des activités. Et pour ne pas trop attendre, nous avons estimé nécessaire de s’attaquer à cette question de la voirie. L’opération nous a permis de soulager énormément la population des différents quartiers de Bobo-Dioulasso.

S : On a constaté que juste après l’aménagement des voies, des ralentisseurs spontanés ont été érigés çà et là. Qu’est-ce qui est fait pour que ces ralentisseurs soient beaucoup plus adaptés ?

A.B. : Je dirais que c’est un phénomène très dérangeant. A titre d’exemple, dans l’arrondissent 5, nous avions rechargé une voie sur près de 7 km. Le lendemain, les riverains ont érigé sur la même voie près de 40 ralentisseurs. C’est-à-dire qu’à chaque 50 m environ, on avait un ralentisseur. Et lorsque nous les avons approchés pour comprendre, certains nous ont dit simplement que des usagers font la vitesse. Conséquences, la poussière les empêche de mener convenablement leurs activités et les expose à certaines maladies. Vous voyez qu’en voulant soulager la population, nous avons créé d’autres situations. Cela nous a amenés à négocier de la mélasse (ndlr, résidu liquide de la canne à sucre) avec la SN-SOSSUCO, afin de la verser sur les voies reprofilées sur une période relativement réduite pour diminuer la poussière, parce que l’efficacité du produit, est de deux à trois mois. On avait voulu négocier 200 tonnes de mélasse avec la SN SOSSUCO pour répandre sur l’ensemble des routes de la ville et comme nous sommes limités sur le plan budgétaire, nous n’avions pas pu avoir les ressources nécessaires pour le faire. Nous l’avons fait sur certaines distances et les échos que nous avions eus nous réconfortent. Nous allons donc voir, pour 2024, comment travailler à améliorer cela. S : Au regard de l’étendue du travail, combien cela a-t-il coûté et comment a-t-il été financé ? A.B. : Il serait difficile d’évaluer financièrement l’ensemble des travaux, parce que la commune avait prévu des travaux de reprofilage sur un budget de 80 millions F CFA. Au regard des kilomètres de routes aménagées (367 km reprofilés), vous comprendrez aisément que 80 millions ne pouvaient même pas suffire. Donc en dehors de ce qui avait été prévu par le budget communal, nous avons bénéficié énormément de l’appui des populations, avec parfois des cotisations ponctuelles venant des jeunes dans certains quartiers.

S : C’est la saison des pluies. « Le contrôleur naturel » a fait sentir le besoin de caniveaux à certains endroits. Qu’est ce qui est prévu pour que les voies aménagées ne soient dégradées aussitôt finies ?

A.B. : En termes d’infrastructures routières, Bobo-Dioulasso n’est pas un exemple. Nous n’avons pas hérité d’un bon réseau. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle nous avons été fortement sollicités par les populations. Et lorsque nous avons lancé le marché d’un montant de 800 millions F CFA, le niveau central ne nous a pas facilité la tâche. Il avait souhaité que l’on justifie la capacité financière de la commune avant de l’engager. Sinon, il y a des travaux qui sont prévus, qui, s’ils sont exécutés, devraient consolider ce qui est déjà fait sur le terrain. Nous avons prévu par exemple, la réalisation d’ouvrages de franchissement, de dalots, de caniveaux et même des travaux de surfaçage. Tous ces travaux ne peuvent pas s’effectuer si nous n’arrivons pas à prouver la capacité financière de la commune à le faire. C’est pour vous dire qu’il y a la volonté, mais parfois certaines mesures prises au niveau national ne nous facilitent pas la tâche en tant qu’acteurs locaux.

S : Quelle est la situation de la voirie d’une manière générale à Bobo-Dioulasso ?

A.B. : De façon générale, nous avons des routes qui ont été réalisées depuis des décennies et qui n’ont pas été entretenues. Il y a des quartiers difficilement accessibles. C’est tout cela qui nous a amenés à accentuer nos actions au niveau de la voirie. S : Certains ont vu dans ces différentes actions, comme du populisme de votre part. Qu’en dites-vous ? A.B. : Quand on parle de populisme, c’est comme si derrière ces actions il y avait quelque chose de rechercher. Je n’ai pas des ambitions autres que celles de satisfaire les populations. Ceux qui parlent de populisme peuvent avoir leur raison, mais je suis animé par le désir de satisfaire les populations.

S : Le bitumage de la route de Léguéma menant au CMA de Dafra tout comme certaines voies ont toujours été annoncées pendant des années sans concrétisation. A quoi peut-on s’attendre avec vous ?

A.B. : Je lie le fait qu’on n’arrive pas à réaliser ce projet au contexte sécuritaire qui fait qu’on a du mal à mobiliser les partenaires techniques et financiers qui se font rares au regard de la position du Burkina Faso. A notre prise de fonction, nous avons approché le ministère des Infrastructures qui nous a clairement dit que pour la route de Léguéma, il y a un gap financier à combler. Sinon, le projet avait été lancé en son temps, sauf qu’il y a toujours un manque à gagner.

S : Depuis quelques temps, de nouveaux feux tricolores sont fonctionnels à plusieurs carrefours de la ville. Est-ce l’œuvre de la mairie ou de la SONABEL ?

A.B. : Avec un certain nombre de partenaires, nous avons réussi à installer sur le boulevard, des feux de signalisation. On est en collaboration avec l’ONASER (ndlr, l’Office national de sécurité routière) qui a même fait un rapport sur nos besoins en panneaux et feux tricolores. J’ai reçu ce rapport, cela va beaucoup nous servir pour aller rapidement sur le terrain. C’est parfois des partenaires, plus précisément des opérateurs économiques, parce qu’ils veulent réguler un tant soit peu le trafic au niveau de leurs usines, nous sollicitent pour implanter des feux tricolores. La SONABEL travaille également à implanter quelques feux au profit de la commune.

S : On constate à plusieurs endroits de la ville des tas d’ordures. Que font les services d’hygiène et de l’assainissement de la commune pour éviter ces genres de situations ?

A.B. : La direction en charge de l’environnement et de l’assainissement fait un travail formidable. En décembre 2022, nous avons organisé les 72 heures de travaux d’assainissement. Cela a permis le curage de nombreux caniveaux sur fonds propres de la commune à hauteur de 50 millions F CFA. Au-delà, la structure est quotidiennement sollicitée pour l’enlèvement des ordures partout dans la ville. Il y a également les femmes de la brigade verte que nous sollicitons à chaque fois pour rendre certaines artères de la ville plus propres. La tâche est immense pour la structure qui, malheureusement, manque de moyens pour couvrir pratiquement tous les sites. Pour nous, il faut aller vers la mise en œuvre du plan climat que nous avons adopté à Ouagadougou en décembre 2022 et qui a prévu un certain nombre d’actions. Si elles sont mises en œuvre, elles devraient rendre Bobo-Dioulasso plus propre. Nous sommes conscients qu’il y a du boulot, mais nous sommes très limités par les moyens et nous comptons sur les acteurs privés qui travaillent de concert avec la commune à l’enlèvement de ces ordures et à leur transformation. La commune à elle seule, je préfère être sincère, ne peut pas tout faire.

S : La commune a mis en place la Structure de gestion des équipements et infrastructures marchands (SGEIM) en remplacement de la Structure de gestion des marchés (SGM). Cela a occasionné des crises entre les acteurs du marché. Que faites-vous pour juguler cette crise ?

A.B. : Je ne voudrais pas rentrer dans les détails parce que cela peut nous ramener dans des guéguerres entre acteurs sur le terrain. J’ai hérité d’un problème au niveau du grand marché et au marché des fruits. Je crois que nous sommes à pied d’œuvre pour son règlement. Nous avons rencontré les commerçants et leur avons dit clairement qu’étant une délégation spéciale, il est de notre devoir de faire en sorte que l’ensemble des acteurs puissent se comprendre parce que la situation actuelle profite aux commerçants plutôt qu’à la commune. Vous avez des acteurs qui paient les droits des marchés au niveau des deux structures qui se sont combattues depuis des années, lesquels droits ne sont pas reversés à la commune. Nous avons procédé à un changement à la tête de la structure en nommant un nouveau directeur général.

Il y avait des acteurs qu’il fallait changer au niveau du conseil d’administration, ce qui a été fait. Nous avons prévu de rencontrer l’ensemble des acteurs en mi-août (ndlr, l’entretien a eu lieu 9 août) avec la Chambre de commerce pour partager notre vision de la gestion de la structure. Nous avons en vue le changement même de dénomination de la structure parce que nous ne voulons pas paraitre comme des acteurs qui ont pris position pour un camp donné. Nous avons pris la mesure de la situation et avons invité les acteurs à désigner par eux-mêmes des délégués et cela a été fait. Ils nous ont transmis la liste des représentants des différents marchés. Nous comptons organiser une rencontre avec l’ensemble des commerçants de Bobo-Dioulasso pour voir comment nous allons discuter pour le paiement des droits de marché. Nous avons eu des concertations tant avec la SGEIM qu’avec la SGM. C’est à l’issue de ces concertations que nous allons voir comment opérer des réformes. Le conseil d’administration de la SGEIM et la SGM elle-même se sont réunis et ont proposé des textes que la délégation spéciale va examiner.

S : Qu’en est-il de la réhabilitation des marchés de Colma et d’Accart-ville qui semblent trainer le pas ?

A.B. : Les dossiers des marchés de Colma et Accartville ont créé des mouvements des commerçants sur les différents sites. Les commerçants ont manifesté pour demander l’arrêt des travaux par les différentes entreprises. Toute chose que j’ai trouvée suspecte parce que la réalisation des infrastructures est faite au profit des commerçants. J’ai alors cherché à comprendre et je me suis rendu compte qu’il y a une divergence dans l’attribution des emplacements des marchés. Les commerçants ont estimé qu’avant même que les infrastructures ne soient réalisées, les entreprises étaient dans une dynamique d’attribution à des personnes qui ne sont pas des commerçants ou qui n’étaient pas installées sur les lieux. Nous avons essayé de régler en réunissant l’ensemble des acteurs. Il y a une mission d’inspection qui a fait des recommandations à l’entité qui devrait attribuer des emplacements. Au niveau de la collectivité, nous avons estimé que le rôle de l’entreprise n’est pas de faire des attributions, mais de réaliser l’infrastructure et de rentrer dans ses fonds.

S : Où en est-on avec le marché « Léguéma Lôgô » ?

A.B. : Léguéma lôgô est ouvert et actuellement, les femmes y exercent leurs commerces sans difficulté majeure. Ce marché a été réalisé, il y a plus de quatre ans et les dames peinaient à l’intégrer parce qu’elles n’arrivaient pas à s’accorder sur les emplacements qui devaient être attribués. Nous avons été instruits par le chef de l’Etat qui, lors de son passage à Bobo-Dioulasso avait été interpellé par les dames. Dès que le chef de l’Etat nous a instruits, il fallait dès lors aller vers l’ouverture du marché. Nous avons réuni l’ensemble des dames et fait des propositions. Et à la date d’aujourd’hui, toutes celles qui étaient établies à côté de la mairie de Colma ont toutes rejoint le site de Léguéma Lôgô.

S : L’autre caillou dans les chaussettes de la commune est l’occupation de l’espace public, notamment l’obstruction des voies. Le phénomène est tel qu’on se demande si la police municipale est impuissante ?

A.B. : Ce n’est pas de l’impuissance, c’est juste une question de temps. Vous savez très bien que quand on a pris la tête de la collectivité, on a été confronté à des questions de lotissements, d’assainissement, de voirie, des sollicitations tous azimuts, qui ne permettent pas par exemple à l’autorité d’être sur tous les fronts en même temps. Pour nous, il fallait aller de priorité en priorité. Les installations anarchiques, nous avons en vue de les régler. Il faut mettre à contribution certaines personnes-ressources, même les coutumiers. Ce n’est pas par la force qu’il faut chercher à tout régler. On peut prendre le cas des propriétaires de camions qui refusaient de payer la taxe sur l’enlèvement des agrégats, mais avec qui on a pu se comprendre par la voie du dialogue. Il est vrai qu’avec ces installations anarchiques, nous serons obligés d’utiliser la force s’il faut, mais nous allons donner toute la chance au dialogue et à la sensibilisation. Déjà, avec l’ensemble des PDS d’arrondissements, nous avons eu une rencontre. Il a été question de la mise en place d’une commission de déguerpissement, qu’on n’a pas pu adopter en session. Il y a eu des observations sur la commission. Cela nous a ramenés à intégrer ces observations pour l’adoption de la délibération au mois de septembre. Une fois que ce sera fait, c’est sûr que nous irons vers la résolution des cas d’installations anarchiques sur le long de certaines voies.

S : De nombreux taxis à gaz circulent dans la ville avec les risques que cela comporte. Que fait la commune ?

A.B. : Ce n’est pas seulement à la commune de prendre ses responsabilités sur cette question. Le ministère en charge des transports avait mené des actions, de concert avec les collectivités. Moi-même en tant que PDS, lors d’une activité, je suis revenu sur la question et j’ai demandé le concours du ministère pour nous faciliter la tâche. Vous savez, ce sont des acteurs qui ont de nombreuses difficultés qu’ils égrènent chaque fois qu’on les approche. Si on n’y prend garde, nous irons vers la fin des taxis. Certains risquent de déposer leurs taxis et nous créer d’autres situations comme le chômage si on y va par la manière forte. Il y a un projet qui les concerne, il s’agit du projet de mobilité, financé par la Banque mondiale, qui prévoit le renouvellement du parc des taxis. Si ce projet voit le jour, vous allez vous-même constater la disparition des taxis à gaz. Sa mise en œuvre est prévue en 2024. C’est seulement le coût du taxi qui est pour l’instant discuté. Les acteurs ont estimé que c’était un peu cher et on est toujours en pourparlers avec la Banque mondiale à ce sujet.

S : Contrairement à Ouagadougou, Bobo-Dioulasso a cette particularité que les tricycles transportent des personnes en lieu et place des marchandises. Cela pose des tensions entre les taximen et les tenanciers de tricycles. Que compte faire la commune ?

A.B. : Il existe un texte qui interdit le transport des personnes par les tricycles. Malheureusement, dans la ville de Bobo-Dioulasso, le phénomène a la peau dure. Avec la police municipale, nous avons par moment mené des actions de sensibilisation. Avec le concours du ministère des Transports, nous avons tenu des rencontres avec les acteurs. Récemment, nous avons organisé une rencontre qui a associé ces acteurs, mais comme vous le savez, ce sont les mêmes arguments des taximen qui sont utilisés par ceux de tricycles. L’ONASER est dans une dynamique de nous faciliter la tâche, à travers des actions dans les mois à venir. Son directeur général et moi nous avons échangé sur la question, nous allons certainement nous retrouver pour voir comment, au-delà de la sensibilisation, passer à la phase de répression. Cela nécessite que nous y allions avec beaucoup de prudence.

S : La suppression de la police routière est annoncée. Est-ce que la police municipale pourra assurer le relai ?

A.B. : en termes d’effectif, ce n’est pas évident pour la police municipale de prendre le relai de la police routière. C’est sûr qu’en annonçant la suppression de la police routière, il y a forcément des mesures que nos premiers responsables vont devoir prendre. Vous savez qu’il y a des Volontaires adjoints de sécurité (VADS) qui travaillent aux côtés des polices nationale et municipale. Ces acteurs pourraient être mis à contribution pour faciliter la tâche de l’Etat. Sauf si on revoit à la hausse l’effectif actuel de la police municipale. S : On entend souvent dire que pour acheter une parcelle à Bobo-Dioulasso, il faut réfléchir 1 000 fois avant de s’engager, tant il y a du faux. Comment en est-on arrivé à là ? A.B. : Je ne pense pas que le problème foncier soit l’apanage de la ville de Bobo-Dioulasso. Si vous avez suivi l’évolution des choses au niveau du ministère en charge de l’habitat, il y a eu l’adoption d’une loi sur la promotion immobilière qui, désormais, va régir la question. Cela nous enlève une épine du pied, tout simplement parce que la promotion foncière revient aux collectivités et à l’Etat. Les difficultés que nous connaissons actuellement sont dues au fait que la loi sur la promotion foncière comportait des insuffisances si bien que des promoteurs immobiliers ont profité pour créer des désagréments aux populations. Il s’agit entre autres de l’occupation des terres qui ne répond pas à un certain nombre de besoin, ou qui n’est pas conforme au plan d’occupation des sols des villes. Il y aussi des documents d’urbanisation qui, malheureusement, n’ont pas été respectés dans l’acquisition de certaines terres tout comme des espaces agro-pastoraux qui font l’objet de morcellement, pour en faire des zones d’habitation. La nouvelle loi va nous permettre de règlementer la situation.

S: La situation a tout de même pris des proportions exagérées à Bobo-Dioulasso.

A.B. : Ce que vous dites est juste parce que les lotissements passés n’ont pas suivi certaines procédures ici à Bobo-Dioulasso. Si bien que nous faisons face à des difficultés au niveau de presque tous les arrondissements, excepté l’arrondissement 1 qui n’a pas fait de lotissement. Vous avez des cas de doubles attributions, de triples attributions, des lieux sacrés qui sont occupés ainsi que des zones inondables qui sont malheureusement loties. Ces problèmes ont été accentués par la suspension des lotissements dans les villes de Bobo-Dioulasso et de Ouagadougou. Vous avez des habitats spontanés qui s’érigent un peu partout dans les arrondissements. C’est cet ensemble de problèmes que le ministère de l’Urbanisme tente de régler à travers la loi sur la promotion immobilière. Mais, il ne suffit pas d’adopter la loi parce qu’il y a des textes d’application qui devraient venir. Si ces textes d’application ne sont pas pris à temps, c’est-à-dire dans un délai raisonnable, pour permettre aux collectivités d’aller vite sur le terrain, nous serons encore rattrapés par le phénomène de promotion immobilière parce que les acteurs ont mille façons de contourner les textes pour continuer à créer des soucis à l’Etat.

S : Quand on jette un regard général sur l’occupation foncière au niveau de la commune on est tenté de se demander s’il y a un Schéma directeur d’aménagement urbain (SDAU) ?

A.B. : Il y a bien un schéma d’aménagement directeur. Mais les promoteurs immobiliers ont occupé anarchiquement les espaces en violation des documents de planification, si bien qu’on se demande aujourd’hui comment faire pour amener ces acteurs ou ces occupations dans le schéma. Comment est-ce qu’on travaille à rattraper la situation ? Faut-il réviser le Schéma directeur d’aménagement urbain pour se confronter à la réalité du terrain, ou bien simplement balayer ce qui a été réalisé pour se conformer au Schéma directeur ? C’est une question qui est sur la table du ministère de l’Urbanisme qui va certainement, dans les jours à venir, nous proposer un schéma.

S : Des commissions ad hoc mises en place dans les arrondissements avaient en son temps fait des propositions, qu’elles ont remises au haut-commissaire. Quelle est la suite à donner à ses différentes propositions ?

A.B. : Le processus n’est pas encore arrivé à son terme. Ces rapports produits n’ont pas été validés par l’ensemble des acteurs. On a travaillé à recenser les préoccupations des populations et les difficultés sur le terrain. Aujourd’hui, nous avons pris la résolution de régler localement le problème. Vous avez certainement eu l’information du rapport que le gouverneur de la région des Hauts-Bassins a commandité. Celui-ci a été validé et transmis à la délégation spéciale. Nous avons ensuite mis en place une commission ad hoc d’apurement du passif qui est en train de faire le travail sur le terrain actuellement. Mais les problèmes qui avaient été enregistrés par les commissions antérieures sont les mêmes qui ont été soumis à celle actuelle et l’avantage de cette commission est la prise en compte de presque toutes les couches y compris les structures de veille comme le REN-LAC et la justice. Si la commission dépose son rapport, nous allons sur la base de celui-ci aller vers les premiers responsables. Elle a six mois pour déposer son rapport et dès sa lecture, le gouverneur et le haut-commissaire que je suis, allons entreprendre des démarches pour passer à la phase de l’opérationnalisation en mettant en œuvre les recommandations. Des directives ont été données à la commission à savoir qu’il ne s’agirait pas de recenser les problèmes liés au foncier, mais aller au-delà en proposant des solutions. Par exemple on ne doit pas suggérer qu’il faut gérer un problème foncier à Kobawé par la restructuration simplement. Il faut dire comment mobiliser les terres pour ceux qui seront touchés par la restructuration et comment mobiliser les financements ?

S : Qu’est ce qui freine les travaux de construction de la régie de Bobo-Dioulasso ?

A.B. : Les travaux de la régie ont débuté depuis plus d’une décennie. Quand j’ai pris fonction, j’ai cherché à en savoir plus sur ce bâtiment derrière l’hôtel de ville qui peine à s’achever. Après les informations recueillies, nous nous sommes résolus à la résiliation du contrat avec l’entreprise. Les jours à venir, nous allons échanger avec elle pour voir si c’est la commune qui lui doit ou si c’est elle qui doit à la commune avant de mettre fin au contrat. Nos prédécesseurs auraient pu régler le problème autrement, mais je ne sais pas pourquoi cela a trainé jusqu’à cette date. Nous sommes dans un contexte de transition et nous avons jugé bon d’aller vers la résiliation et engager un autre entrepreneur.

S : Le vendredi 3 décembre 2021, la Commission communale de l’urbanisme et de la construction (CCUC) de la ville a examiné et validé un projet d’étude de faisabilité pour l’aménagement d’une zone d’activités économiques. Où en est-on avec ce grand projet ?

A.B. : Ce sont des projets qu’on a mis en berne au regard de la situation sécuritaire que traverse le pays parce que qui parle d’aménagement parle de mobilisation de fonds. Pour mobiliser les bailleurs actuellement autour de ces fonds, ce n’est pas chose aisée. Donc, nous avons pour l’instant accordé la priorité à d’autres domaines et dès que le contexte sécuritaire sera amélioré, nous allons y revenir. C’est un projet qui mérite que l’ensemble des acteurs soient mobilisés, autrement, ce sera un fiasco.

S : Le centre d’enfouissement technique connait des difficultés de fonctionnement depuis son aménagement. Qu’est-ce qui ne va pas concrètement ?

A.B. : Ce centre a été financé par la Banque mondiale. Un projet qui n’a pas fonctionné comme il se doit de sorte qu’aujourd’hui nous sommes au stade d’un audit demandé par la Banque mondiale pour comprendre les choses. Vous avez également des acteurs, surtout les riverains, qui estiment que le site les expose à des maladies. Nous allons certainement attendre que les audits fassent ressortir des suggestions ou des recommandations. Et sur la base de celles-ci, nous allons voir ce qui pourrait être fait. Mais déjà, le PDS de l’arrondissement concerné et moi avons échangé et il a été jugé nécessaire de sa délocalisation pour répondre à la préoccupation des riverains.

S : Selon certaines sources, il est possible que le site soit morcelé et attribué aux populations à titre de parcelles.

A.B. : Si le site ne répond plus aux attentes de la collectivité, on peut l’utiliser autrement. Mais le projet dont vous parlez n’a pas encore été porté à la connaissance de la délégation spéciale par le PDS de l’arrondissement concerné.

S : L’Autorité supérieure de contrôle d’Etat et de Lutte contre la corruption (ASCE-LC) a fait des audits dans la gestion de l’exécutif qui vous a précédé. L’ancien maire est même dans les mains de la justice. Quels ont été les manquements qui ont été relevés ?

A.B. : C’est une procédure qui est toujours en cours et il n’y a pas pour l’instant eu de jugement. De plus, L’ASCE-LC ne nous a pas remis un rapport. Donc, nous n’avons pas une idée de ce qui a été relevé comme manquements. Par contre, ce que je peux dire, c’est qu’il y a eu des missions d’inspection du niveau central qui ont permis de relever un certain nombre de difficultés dans la gestion que nous sommes en train de régler. Ces recommandations ont trait à la prise d’un certain nombre d’actes qui n’étaient pas conformes à certains textes en matière de finances. Elles sont en train d’être intégrées suivant un plan de prise en compte dans la gestion. Mais pour ce qui est de l’ASCE-LC, nous n’avons pas reçu de rapport d’audit.

S : Votre équipe sera-t-elle à l’abri de ces problèmes ?

A.B. : Nul n’est à l’abri des problèmes surtout quand on est à la tête d’une commune comme Bobo-Dioulasso et Ouagadougou. Mais comme je l’ai dit, en tant que juriste de formation, nous essayons de prendre des précautions et parfois d’attirer l’attention des collègues sur un certain nombre de manquements relevés par la mission d’inspection. La mission nous a envoyé des rapports et nous avons immédiatement instruit les PDS d’arrondissements tout comme les chefs de service, les directeurs pour qu’ils aillent dans le sens de leur mise en œuvre.

S : Quelles sont les réformes que vous envisagez pour éviter ces malversations à l’avenir ?

A.B. : Nous nous sommes penchés sur l’organigramme de la commune proposé par l’exécutif passé qui était à la phase de projet. Cet organigramme, dans sa mise en œuvre, voudrait que l’on puisse créer de nouvelles structures. Cela va certainement engendrer la mobilisation de ressources parce que qui dit direction, dit certainement bâtiments, agents et moyens de transport. Il y a également le traitement des salaires et des indemnités. Après évaluation, il ne sera pas simple pour la commune pour l’instant d’aller à son opérationnalisation. Ce que nous pouvons faire, c’est d’aller pas à pas avec nos partenaires sociaux, surtout côté financier.

S : Les communes de Bobo-Dioulasso et de Bama ont récemment signé une convention de communauté de commune. A quoi cela renvoie-t-il ?

A.B. : La convention de communauté de commune est prévue par la loi 55. Il est ainsi permis à deux collectivités qui ont en vue de réaliser des projets communs et qui, par le fait de leur rapprochement, ont pu s’accompagner à travers une convention. Généralement, c’est dans des domaines bien précis que les collectivités se mettent ensemble pour la mise en œuvre de certains projets. Pour le cas de Bama, c’est beaucoup plus dans le domaine de la voirie. Bama, en termes d’engins n’est pas bien loti et le PDS a voulu que nous mutualisions nos forces pour faciliter la tâche à nos populations. Vous avez dû voir qu’après la signature, la ville de Bama a été accompagnée et nous avons pu reprofiler des voies à l’intérieur de la commune. A cela il faut ajouter le volet culturel.

S : Bama ne risque-t-il pas ainsi de se faire ‘’annexer’’ par Bobo-Dioulasso ?

A.B. : Non. Nous avons des problèmes fonciers entre des villages relevant de Bama et la commune de Bobo-Dioulasso. Le fait d’avoir créé cette communauté nous facilite la tâche en termes de règlement de ces conflits. Il y aura une cellule ou un comité de gestion et ce comité sera mis à contribution par exemple lorsque nous serons amenés à régler un conflit foncier qui oppose deux villages de Bama et de Bobo-Dioulasso. Je crois qu’il y a des conflits qui datent et le comité pourrait être mis à profit pour les gérer. Mais de là à annexer Bama, je ne pense pas. Les limites territoriales sont assez définies entre les deux communes. L’objectif ici, c’est de faire en sorte que les populations, au lieu de se voir en chien de faïence, apprennent à vivre ensemble.

S : Sikasso au Mali et votre commune ont signé une convention. Pourquoi une telle convention et quelles sont les domaines d’interventions ?

A.B. : Sikasso et Bobo-Dioulasso vivent pratiquement les mêmes réalités. C’est la frontière qui nous sépare. Autrement, si vous faites un tour à Sikasso, vous avez l’impression d’être à Bobo-Dioulasso. Donc Sikasso et Bobo-Dioulasso sont deux villes sœurs. Invité à l’inauguration de l’hôtel de ville de Bobo-Dioulasso en 2020, le maire de Sikasso avait souhaité qu’on aille vers la formalisation de nos relations à travers une convention. Dès que nous sommes arrivés, nous avons instruit nos chargés de coopération d’aller dans ce sens. La convention prend en compte deux points comme par exemple le partage d’expériences entre nos personnels. Il est donc désormais possible pour le personnel de la commune de Bobo-Dioulasso de bénéficier d’un appui de la commune de Sikasso en termes de formation. Sikasso est également dans l’exploitation des mangues. Déjà, un compatriote bien établi à Sikasso et bien connu dans ce domaine nous accompagne et l’exportation des mangues a accéléré l’ouverture de l’aéroport de Bobo-Dioulasso au H24 (ndlr, 24h/24).

S : Justement, comment appréciez-vous le H24 de l’aéroport de Bobo-Dioulasso, en termes de retombées pour votre ville ?

A.B. : J’en suis satisfait, mais avec des inquiétudes parce que cela est tributaire aussi à la relance économique de Bobo-Dioulasso. Si on ouvre l’aéroport 24h/24h et qu’il n’y a pas d’intérêt ici à Bobo, les compagnies vont finir par déposer les clés. Pour moi, il faut forcement relancer l’économie à Bobo-Dioulasso.

S : Quel est l’état actuel de la situation sécuritaire de la commune de Bobo-Dioulasso ?

A.B. : Je dirais que la situation est stable comparativement à d’autres villes. Nous concernant, la préoccupation centrale, c’est le flux de Personnes déplaces internes (PDI) vers la ville, précisément dans les zones périphériques. On a plus de 72 000 PDI déjà enregistrées dans la ville. C’est vrai qu’on n’a pas un site dédié à ces personnes déplacées internes, mais il y a des familles d’accueil comme il y a également des PDI qui font l’option d’aller dans les habitats spontanés dans les zones non loties.

S : Avez-vous foi que le Burkina retrouvera sa quiétude ?

A.B. : Bien sûr que J’ai foi et je me dis que ça sera pour bientôt grâce à Dieu. Avec la dynamique enclenchée par nos autorités, et si on a une coopération franche dans la zone des trois frontières (ndlr, Burkina Faso, Mali et Niger) la situation va s’améliorer. J’ai espoir que le Niger, le Mali et le Burkina vont converger leurs forces pour y arriver.

S : La France a décidé de suspendre ses aides budgétaires et au développement au Burkina Faso. Quel peut-être l’impact de cette décision au niveau de la commune quand on sait que la commune a des partenariats avec la France ?

A.B. : La commune est alignée sur la même dynamique que le gouvernement qui décide sur le plan diplomatique de ce qui doit être fait et de la collaboration qu’on doit avoir avec l’ensemble des partenaires. Il est vrai qu’avec cette décision, ce sont des partenaires que nous perdons, mais cela n’empêche pas la commune de continuer à rechercher d’autres partenaires. A titre d’exemple, l’Agence française de développement (AFD) devait financer au niveau de la commune des projets à hauteur de 11 milliards 860 millions F CFA. La mise en œuvre a été un peu retardée. Lorsque nous avons été installés, nous avons instruit nos techniciens d’aller rapidement vers la concrétisation du projet, ce qui a été fait. Nous avons, de concert avec le ministère des Finances et celui de l’Administration territoriale, pris un certain nombre d’arrêtés pour opérationnaliser les choses. La France vient d’annoncer la suspension de ses aides et certainement que l’AFD va aller dans le sens de la décision de leurs premiers responsables. Nous allons continuer dans la même dynamique que le niveau national et espérer que d’autres partenaires puissent reprendre les choses.
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