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L’Observateur Paalga N° 8467 du 27/9/2013

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Robert Sangaré, DG de l’hôpital Yalgado : «Certains agents sont complices de l’enlèvement clandestins des cadavres»
Publié le samedi 28 septembre 2013   |  L’Observateur Paalga




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«Des corbillards indésirables à Yalgado». Ainsi dénoncions-nous l’enlèvement clandestin des corps au sein du centre hospitalier universitaire dans notre édition n°8452 du 6 septembre 2013. Sur la question, le premier responsable de la structure a tenu à donner plus de détails. Pour Robert Sangaré, des agents de l’hôpital sont complices de telles pratiques, mais dans l’intérêt de tous, les parents des personnes décédées et ces agents gagneraient à suivre la règle en la matière.

Dans notre rubrique «Une lettre pour Laye» du 6 septembre dernier, nous avons évoqué le non-respect du processus relatif à l’enlèvement des corps dans les services par certains usagers de l’hôpital. Qu’en est-il exactement ?

• En principe lorsqu’une personne meurt à l’hôpital Yalgado, quel que soit le service, le corps est transporté immédiatement à la morgue pour être au moins enregistré et il y a des horaires pour les enlèvements. Le fait de transiter par la morgue n’est pas synonyme de dépense, seule la conservation des corps dans les chambres froides est payante, à raison de 5 000 F CFA par jour. Par exemple, si le décès a lieu dans la matinée, on sait que pour certaines religions l’enterrement ne traîne pas ou même de manière naturelle, si la famille veut enterrer son mort dans la journée, il n'y a pas de problème. Pour des besoins statistiques, mais aussi pour des raisons juridiques, on ne peut pas venir enlever un corps sans formalité. C’est une obligation que le corps transite par la morgue, si une personne décède dans nos services. Et nous avons deux grandes salles pour entreposer les corps. Au-delà de ces horaires, et à la demande de la famille, la conservation dans la chambre froide est facturée. Normalement les corbillards, tout comme les véhicules particuliers, ne sont pas habilités à enlever de corps à l’intérieur de l’hôpital. Mais je dois reconnaître que certains ont bénéficié de la complicité de certains de nos agents et il ne faut pas se voiler la face. C’est pourquoi lorsque nous avons l’occasion d’en parler, nous ne cessons d’alerter, à travers des notes de service, le personnel et suite à votre article effectivement, nous avons tenu à rappeler fermement les règles en la matière. Dorénavant, si nous prenons un agent en train de se livrer à l’enlèvement d'un corps ou d’en être complice il va répondre de ses actes.

Ce qui est malheureux, c’est qu'au Burkina les gens ne cherchent pas toujours à comprendre. Lorsque les gens sont dans la douleur, il est difficile d’engager des débats chauds avec eux, parce que cela va apparaître comme un manque d’humanisme à leur égard. Face à l’insistance des parents, les agents se laissent souvent aller au sentimentalisme pour éviter les tiraillements sur la question. Nous demandons à l’opinion de comprendre que la règle veut que tout décès constaté au sein de l’hôpital transite d’abord par la morgue avant que les parents puissent faire sortir le corps. Et cela est valable dans tout hôpital. Les chiffres que nous avons ici sont des éléments statistiques. Même 10 ou 20 ans après, si on nous demande des certificats de décès nous devrons être en mesure de les délivrer. Nous recevons aujourd’hui même des demandes de documents sur des décès qui datent de 1999 pour des raisons judiciaires, de dédommagement ou d’héritage. Ce n’est donc pas dans l’intérêt des parents de se livrer aux enlèvements clandestins. Des consignes ont été données et il y a une note de service claire les interdisant dorénavant. Les vigiles, les agents ont reçu des consignes fermes sur cette question-là.

La tâche ne sera pas facile hein !

• Nous prenons des mesures internes. L’administration fait des notes de service, rappelle les règles aux agents. Ceux qui vont s’entêter devront s’attendre à répondre de leurs actes. Les usagers de l’hôpital doivent comprendre que c’est dans leur propre intérêt d’éviter cette pratique. N’oublions pas que sur les cadavres il y a toutes sortes de trafics et qu'il y a surtout des erreurs ou des confusions. Nous devons donc être rigoureux. L’hôpital doit fonctionner selon des normes et toutes les informations doivent y rester disponibles pour divers besoins à tout moment.

Auprès des malades également, certains accompagnateurs ne sont pas toujours faciles. Ils font du bruit et envahissent souvent les salles de soins. Ils perturbent ainsi le travail des agents…

• Il faut que les gens comprennent que la santé va de leurs propres comportements. Les urgences, par exemple, ont été conçues au moment où Ouagadougou avait 200 000 habitants, aujourd’hui la ville en compte dix fois plus. L’orientation des malades dans les services spécialisés d’hospitalisation peut prendre du temps. Un jour, j'ai pris un couloir et j’y ai vu un malade couché avec 5 ou 6 personnes autour de lui. Il faisait chaud, ces gens-là asphyxiaient le malade et occupaient tout l’espace. Nous invitons les accompagnateurs à comprendre que ce n’est pas en entourant et les médecins et les infirmières que leur malade va guérir plus vite. A l’hôpital, il y a des règles de soin et ce n’est pas en criant ou en se plantant devant son parent que les agents vont mieux s’occuper des malades. En matière de santé, c’est l’état du malade qui conduit le processus de traitement.

Ici, les gens travaillent déjà sous pression. Les médecins soignent avec toute la conscience professionnelle requise. Dans une communauté de 1200 travailleurs, il y a des agents qui manquent de sang-froid ou bien qui peuvent avoir des comportements regrettables. Mais il faut que les parents adoptent une attitude responsable et laissent le personnel travailler convenablement. Certains même vont jusqu’à payer des choses contre-indiquées ou des repas sans même un avis médical. En matière de santé, on ne peut pas faire n’importe quoi.

D’une manière générale, le CHU-YO connaît des problèmes d’insécurité. Quelles dispositions avez-vous prises pour y mettre fin ?

• Entre 3 000 et 5 000 personnes rentrent à Yalgado par jour. Du fait de son statut d’hôpital public, il est plus accessible à toutes les couches sociales. L’institution est située dans une zone où, malheureusement, on n’a pas prévu de parking à l’extérieur. Nous sensibilisons les usagers de nos services à avoir un minimum de décence, car il faudrait vraiment avoir une pierre à la place du cœur pour venir voler les gens hospitalisés. Nous surveillons aussi sérieusement. Nous avons une société de gardiennage dont les vigiles sont placés dans les différents services aux différentes entrées. Effectivement, il nous arrive de prendre des délinquants que nous remettons ensuite aux forces de l’ordre pour la suite judiciaire.

Il est fréquent de voir au sein de Yalgado des escrocs qui jouent aux faux malades pour soutirer de l’argent à des gens. Qu’est-ce qui est prévu pour mettre ces individus hors d’état de nuire ?

• C’est dommage. Il y a des gens qui se sont spécialisées dans ça. Tout dernièrement, nous avons pris un et de concert avec le service de la communication et de la sécurité, nous avons conçu des affiches avec sa photo pour avertir les usagers de l’hôpital. Il y a de nombreux cas sociaux que nous gérons avec notre service social à travers notre fonds de solidarité. Mais des délinquants jouent aux faux malades et inventent toutes sortes d’histoires pour émouvoir. S’ils ne sont pas venus des profondeurs du Burkina, c’est de la Côte d’Ivoire et ils ne connaissent personne à Ouaga. Jouant ainsi sur la sensibilité africaine ils arrivent à escroquer quelques bonnes volontés. Mais si nous les identifions, nous prenons des dispositions pour y remédier.

Des accrochages entre véhicules à l’entrée de votre établissement sont fréquents. Avez-vous un message à l’endroit des automobilistes ?

• Franchement, je suis au regret de le dire, mais les Burkinabè sont vraiment atteints d’un niveau d’incivisme incroyable. Il y a des gens qui se garent à l’entrée pour téléphoner. Certains bloquent le passage pour changer leur pneu crevé et d’autres prennent du plaisir à bavarder à la porte. Toutes ces personnes ne mesurent pas que dans le cadre d’un hôpital une minute ou deux peuvent suffire à sauver ou à perdre une vie. La devanture d’un hôpital n’est donc pas un lieu où on peut venir garer ou traîner avec son véhicule.

Interview réalisée par
Moumouni Simporé

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