Dans une déclaration publiée ce 29 avril 2023, l’Intersyndical des magistrats a condamné la soustraction d’une citoyenne d’une procédure judiciaire, relativement à l’affaire dite de «la guérisseuse traditionnelle de Komsilga».
L’encerclement de la cour du Tribunal de grande instance Ouaga II par des militaires pour soustraire une certaine «guérisseuse traditionnelle de Komsilga» n’a pas été du goût de l’Intersyndicale des magistrats qui l’a fait savoir dans un communiqué publié ce 29 juillet 2023. En effet, cette dame a été interpellée par la justice qui l’accuse de la torture d’un homme dans la commune de Komsilga, région du Centre du Burkina Faso.
De l’attitude des militaires à s’immiscer dans une affaire judiciaire, les magistrats trouvent que cela est d’une «extrême gravité». « La bravoure de ce groupuscule de militaires doit se mesurer en ces circonstances sur le champ de bataille plutôt que dans un déploiement insouciant, irresponsable et contre-productif contre des enceintes judiciaires», lâchent les magistrats dans un communiqué.
L’Intersyndical des magistrats dit «condamner avec la dernière énergie cette réaction consistant à soustraire une citoyenne d’une procédure judiciaire, portant ainsi atteinte à l’indépendance et à l’autorité de la justice».
Dans la foulée, il a invité « les auteurs de cet enlèvement à procéder à la remise sans délai et sans condition de la mise en cause en vue de sa réintégration à la maison d’arrêt pour la suite de la procédure».
Les magistrats appellent aussi « le Tribunal Militaire et toutes les autorités de poursuite compétentes à engager des poursuites contre les auteurs, instigateurs et complices de ces faits graves ; l’ensemble des magistrats du Burkina Faso à la suspension de toutes les activités en juridiction jusqu’à l’intégration de la dame dite guérisseuse traditionnelle à la Maison d’arrêt et de correction de Ouagadougou.»
L’affaire a éclaté lorsqu’une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux a montré une scène de torture d’un quinquagénaire battu par des individus dans une localité identifiée plus tard comme étant le village de Rakissé dans la Commune de Komsilga, explique le communiqué de l’Intersyndical des magistrats. Lesquels individus auraient agi sous l’égide d’une guérisseuse traditionnelle qui serait leur patronne.
C’est ainsi que le Parquet près le Tribunal de Grande Instance Ouaga Il a instruit les éléments de la police judiciaire à l’effet de diligenter une enquête circonstanciée et, le cas échéant, d’interpeller les personnes impliquées dans les actes de sévices incriminés.
L’enquête policière close, explique le communiqué, le Parquet a décidé d’engager des poursuites judiciaires pour des faits de torture, de coups et blessures volontaires et de séquestration contre neuf (09) personnes mises en cause ce 28 juillet 2023.
Alors que des mandats de dépôt venaient à peine d’être décernés contre les mis en cause pour les besoins de la procédure, l’on a constaté un encerclement du Palais de justice du Tribunal de Grande Instance Ouaga Il par un groupuscule de militaires encagoulés et armés, à bord notamment de deux (02) pickups et d’un blindé pour, disent-ils, « libérer la guérisseuse » des mains des agents de la Garde de Sécurité Pénitentiaire (GSP).
La dame a cependant, contre toute attente, été remise à des personnes se disant relever de l’Agence Nationale de Renseignement (ANR) à l’insu du Procureur du Faso près le TGI Ouaga Il et ce, sur instructions du Directeur général (DG) de l’administration pénitentiaire, déclarant lui-même plus tard avoir agi sur instructions du Ministre en charge de la justice, des droits humains, chargé des Relations avec les institutions. Un acte qui porte atteinte à l’indépendance et à l’autorité de la justice, conclut le communiqué.