Bonaventure Zabsonré est l’unique menuisier-ébéniste spécialisé dans la confection et la vente de cercueils à Tenkodogo, chef-lieu de la région du Centre-Est du Burkina. Au début de ce mois d’avril 2023, le correspondant de Libreinfo.net dans la région est allé à la rencontre de cet artisan du bois bien singulier.
Bonaventure Zabsonré qui déclare être âgé de 63 ans et être père de 5 enfants, exerce le métier de menuisier-ébéniste. Il confectionne des meubles de tout genre y compris des cercueils.
Il raconte avoir commencé la menuiserie en 1988. Mais c’est seulement en 2007 que M. Zabsonré dit s’être spécialisé dans la confection et la vente des cercueils après un mois de formation à Ouagadougou. Voilà environ 16 ans maintenant que M. Zabsonré est l’unique menuisier fabricant et vendeur de cercueils dans la ville de Tenkodogo.
Son atelier de menuiserie est composé de deux maisonnettes dressées devant son domicile. L’une est remplie de planches et divers matériels de travail. L’autre lui sert de bureau. A l’intérieur d’un des bâtiments, deux jolis cercueils aux prix étiquetés bien visibles sont exposés.
« Beaucoup de gens ont peur du cercueil. Une fois, lors d’une foire d’exposition des œuvres artisanales, le parrain et la délégation des autorités qui l’accompagnait ont refusé de regarder un cercueil que j’avais exposé » me raconte-t-il.
Il explique ainsi ce qui l’a poussé à la confection des cercueils : « Ici à Tenkodogo, j’avais constaté que beaucoup de personnes avaient des difficultés pour avoir un cercueil en cas de décès, la cité n’ayant pas de fabricant de cercueils. Je me suis spécialisé pour secourir la population de Tenkodogo ». Pour lui, fabriquer des cercueils, c’est faire de l’humanitaire.
M. Zabsonré, qui dit avoir abandonné l’école primaire en classe de CE2 pour apprendre le métier de menuisier, reconnaît vivre de cela car « le métier aide et profite à tous ».
Comme dans toute activité, il affirme rencontrer des difficultés dans la vente des cercueils. M. Zabsonré dit subir régulièrement des pertes : « Souvent, je subis des pertes car beaucoup de clients négocient toujours un rabais » soutient-il.
Depuis 2007, il affirme avoir rendu service à de nombreux clients. « Certains viennent commander le cercueil sans donner d’avance. Nous prenons le bois à crédit chez un commerçant, généralement un musulman. Il se trouve que parfois, après l’enterrement, le client devient difficile à joindre.
Certains ne veulent pas régler la facture. Et en la matière, c’est difficile de réclamer son dû. Lorsque tu veux réclamer, le client fautif fait la bagarre. Alors, tu te retrouves dans une situation inconfortable car le commerçant de bois, lui, attend son argent. » ajoute-t-il.
Selon M. Zabsonré, il lui arrive souvent de débourser pour aider ceux chargés de creuser la tombe.
« Certains, qui savent le mystère lié à la mort, ne discutent pas du prix et payent au comptant car ils connaissent la valeur du cercueil mais, régulièrement, beaucoup vont sans régler leurs dettes » regrette-t-il.
Ses clients sont sans distinction d’appartenance religieuse. « Par exemple, la dernière fois, il y a à peine un mois de cela, un chauffeur malien musulman, de retour de Lomé, est décédé à Bittou. Ces parents m’ont acheté un cercueil afin de convoyer le corps jusqu’au Mali pour l’y enterrer » m’explique-t-il.
Les prix des cercueils sont variables, de 75 000 F.CFA à 1 000 000 F.CFA. Il utilise plusieurs qualités de bois selon la qualité du cercueil demandée.
Il utilise des dimensions standards pour les cercueils (2 m de longueur et entre 60 et 80 cm pour la largeur). Différents modèles de cercueils déjà fabriqués sont disponibles et le client peut faire son choix. Une commande spéciale peut se faire lorsque le client ne trouve pas satisfaction dans les modèles disponibles.
Travaillant sans jour de repos, M. Zabsonré dit écouler beaucoup de cercueils. Il déclare ne pas disposer de bilan chiffré. « La majorité des décès se situe en période de forte chaleur et en début de froid » a-t-il constaté.
Il dit avoir formé plusieurs apprentis mais la majorité refusait d’apprendre à confectionner le cercueil. Ils ont limité leur apprentissage à la confection des tables, des chaises, des fauteuils, des buffets et des armoires. Il rêve d’acquérir du matériel de qualité afin d’agrandir son atelier pour satisfaire sa clientèle.
Détenteur de plusieurs attestations de formation, M. Zabsonré collabore directement avec l’administration du centre hospitalier universitaire de Tenkodogo pour la livraison de cercueils.