Accueil    MonKiosk.com    Sports    Business    News    Annonces    Femmes    Nécrologie    Publicité
NEWS
Comment

Accueil
News
Société
Article
Société

Burkina Faso: Insécurité à l’Est, « j’ai réuni tout le Gulmu pour lancer un appel à déposer les armes » Django

Publié le lundi 23 janvier 2023  |  Libre Info
Simon
© Ministère par D.R
Simon Compaoré rencontre les premiers responsables des Koglwéogo
Le Ministre d’Etat, Ministre de l’Administration Territoriale de la Décentralisation et de la Sécurité Intérieure, Simon Compaoré, a rencontré le vendredi 28 octobre 2016 à Ouagadougou les représentants des Koglwéogo du Burkina Faso. Photo : Moussa Thiombiano dit « Django », responsable des Koglwéogo de la région de l’Est
Comment


La région de l’Est fait partie des régions du Burkina Faso qui sont frappées de plein fouet par l’insécurité. En plus des Forces de défense et de sécurité qui luttent contre ces terroristes, il y a les groupes d’autodéfense appelés Kolgwéogo» qui combattent le grand banditisme et le terrorisme dans cette zone. Parmi eux, «Django» à l’état civil Moussa Thiombiano. C’est un combattant incontesté dans cette région. Dans cet entretien accordé à Libreinfo.net, il jette un regard sur la situation sécuritaire qui prévaut à l’Est.

Propos recueillis par Soanguipali Coulidiati, Correspondant dans le Gourma

Li: Comment se porte Django?

Django : Je me porte très bien.

Li: Comment vous appréciez l’évolution de la situation sécuritaire dans la région de l’Est?

Django : Nous sommes victime du terrorisme depuis plusieurs années même s’il faut reconnaitre que les forces de sécurité et de défense font ce qu’elles peuvent. Cependant, comme nous aimons le dire, c’est bien ce qui est fait comme travail, mais il reste encore à faire.

Li: Qu’est ce qui fait qu’on assiste à des regains de violence terroristes toujours dans certaines localités?

Django : Il y a un point de départ de la crise que les autorités administratives refusent de prendre en considération et qui explique les regains de violence terroriste dans certaines localités.

Il y a des abus que certaines ethnies commettent sur d’autres. Quand tu te retrouves dans une localité où tu ne parles pas la langue de cette localité tu es un étranger de cette partie sans être étranger au Burkina.

Il y a des ethnies qui se considèrent plus autochtones et œuvrent à satisfaire leurs seuls intérêts au détriment de ceux des autres, même si cela frustre les gens.

Li: À votre avis comment peut-on réussir véritablement à éradiquer l’insécurité dans la région?

Django : Il y a eu un moment où j’ai dit qu’il est bien que nous ayons des armes. Mais je pense que nous aurions pu retrouver la paix sans les armes. Parce que j’ai vu que même dans le temps colonial où ils y avaient des chars, enfin de compte les conflits se terminaient par des négociations. Je me suis dit que jusqu’à preuve du contraire on peut toujours négocier.

Li : Le gouvernement a fait un recrutement massif des VDP? Comment trouvez-vous la mesure? Est-ce une solution contre le terrorisme?

Django : Le recrutement des VDP est une bonne chose. Mais le mode de leur recrutement pose problème. En effet, la condition principale du recrutement pour être VDP est qu’il faut être un autochtone de la localité pour laquelle le volontaire veut s’engager.

Cela permettrait que la majeure partie de ces VDP soient de cette localité. Avant le terrorisme il y avait déjà des règlements de compte entre certaines ethnies.

Mais cette manière de recruter peut exacerber les règlements de compte. C’est pourquoi je pense que ce sont les autochtones des différentes localités qui devraient être plus engagés.

Li: Etes -vous toujours actif sur les théâtres?

Django : Je ne participe pas activement sur les théâtres d’opérations . Je le fais à ma manière. Parce que je sais que nos parents au-delà des armes à feu qu’ils avaient pour se tirer dessus usent d’autres moyens pour résoudre des crises de cette nature.

On ne peut pas se prononcer sur une question tant qu’on n’est pas responsabilisé dans la résolution d’une crise. Parce que cela compte beaucoup.

J’ai pris l’initiative d’installer les kolgweogo et l’ai fait en trente-huit jours sur toute l’étendue de la région de l’Est, mais je n’ai tué personne.

Les bandits non plus n’ont tué aucun de mes éléments. C’est à la population de me juger sur cette question.

Li : Comment dois-t-on organiser les VDP aujourd’hui pour qu’ils soient plus efficaces?

Django : Comme je l’ai dit, il fallait des VDP en nombre important. Mais selon moi leur recrutement devait être fait de telle sorte que sur une centaine, qu’au moins soixante-dix personnes soient de la localité pour être au-devant de tous ces VDP.

Tel que cela est fait, beaucoup sont venus de partout et leur efficacité va toujours poser problème. Si je vais entrer dans les détails c’est frustrant.

Je vous ai déjà dit qu’il y a des règlements de compte entre certaines ethnies dans certaines localités. Je sais qu’il y a des gens qui sont devenus des VDP parce que les propriétaires terriens dont ils exploitent les terres leur ont refusé de les exploiter pour des fins agricoles pendant la saison pluvieuse.

Li: Les VDP sont accusés d’exactions, d’exécutions extrajudiciaires, comment expliquez-vous ces comportements?

Django : Rire. J’ai déjà dit qu’il faut consulter les hommes des localités pour recruter les VDP.

Dans une localité, les populations savent qui est voleur et qui ne l’est pas. Des voleurs qui sont devenus des VDP continuent de voler.

La preuve, on va au marché à bétail prendre des gens qui ont vendu leur bétail à deux à trois millions pour ensuite les abattre.

Les sommes d’argent trouvées sur eux disparaissent. Ces éléments-là qui sont là tu penses qu’ils sont là simplement pour nous défendre ? Ce sont des intérêts.

Li : Certains burkinabè craignent une guerre communautaire, avez-vous ces craintes aussi?

Django : Vraiment j’ai les mêmes craintes. C’est pourquoi j’ai toujours dit qu’il faut qu’il y ait un dialogue. Je sais que ce n’est pas même s’il y a des ethnies qui sont impliquées dans le terrorisme, il est possible que nous réconcilions.

Ces terroristes qui sont brousse ne fabriquent pas des armes ni des munitions. S’ils ont des armes qui les auraient convaincus de prendre les armes pour tuer leurs propres frères? Ils oublient que quand ils auraient fini de nous tuer, ils seront tués à leur tour.

Qu’est-ce que cela aurait servi ? Je pense que nous aurions pu faire de la sensibilisation au début pour les ramener à la raison.

Si cela échoue nous ferons comme le dit un proverbe « Si l’eau va te noyer, donne-lui au moins le maximum de coups de poing ».

Li : Pourquoi les terroristes n’ont pas répondu favorable à votre appel à déposer les armes?

Django : Même ceux qui étaient censés être dans ma logique notamment l’administration pour entendre l’appel à déposer les armes n’ont pas entendu cet appel.

J’ai réuni tout le Gulmu pour lancer l’appel à déposer les armes. À l’issue de cette rencontre un bureau a été mis en place pour opérationnaliser l’appel.

J’ai demandé au gouvernement de nous délivrer un document de reconnaissance dudit bureau pour nous permettre d’agir dans deux à trois mois.

Ce document n’a jamais été validé. De plus, même si les terroristes voulaient déposer les armes sans qu’il n’y ait une structure pour être garante qu’ils ont déposé les armes, ils ne prendraient pas l’initiative de se présenter à la gendarmerie ou à la police pour déposer les armes.

Il fallait créer une structure auprès de laquelle ils doivent enregistrer afin que ladite structure porte garant qu’ils ont été identifiés.

En tant que fils de la localité, je peux aller connaitre leur famille. Ainsi s’ils recommencent, leur famille pourra être prise en otage. Voici comment j’avais conçu la stratégie de désarmement.

Li: Un dialogue est -il possible avec les groupes armés terroristes?

Django : Je répète qu’il est toujours possible de dialoguer avec les groupes armés.

Il y a un proverbe qui dit « Que la flèche qui a servi à abattre le gibier qu’on utilise pour le dépecer ».

Aujourd’hui même si les peulhs sont accusés d’être plus nombreux dans les groupes armés, les parents de ceux qui sont en brousse peuvent servir d’intermédiaire pour ces derniers inviter à accepter déposer les armes.

S’ils exigent que j’aillent les rencontrer, mon âge ne m’empêche pas de le faire. Les émissaires qui seront allés les rencontrer leur demanderont s’ils sont d’accord ou pas de déposer les armes.

Pour moi c’était cela la meilleure solution. Et s’ils refusent cette démarche, tout Burkinabé sera prêt à se donner la mort.

Je pense que si ce n’est une punition divine, il serait difficile qu’ils puissent tuer tout le monde sans la volonté de Dieu.
Commentaires