Le 26 novembre prochain, Blé Goudé foulera, en homme libre, la terre de ses ancêtres, la Côte d’Ivoire. Et ce, après l’avoir quittée sous la contrainte, 10 ans plus tôt. En effet, après plus de 20 mois de cavale, l’ex-chef des Jeunes patriotes avait été arrêté le 17 janvier 2013 au Ghana pour être transféré, le lendemain, vers son pays où il avait été inculpé de crimes de guerre. En plus de la Justice ivoirienne, le « général de la rue » était aussi dans le viseur de Cour pénale internationale (CPI) où il sera conduit le 22 mars 2014 pour répondre des faits de « crimes contre l’humanité ». Acquitté par la CPI, l’homme se verra condamné, par contumace, par le tribunal criminel d’Abidjan, à 20 ans de prison, 10 ans de privation de ses droits civiques et 200 millions de F CFA d’amende. Peut-on dire aujourd’hui qu’une page se tourne pour l’ancien ministre de la Jeunesse de Laurent Gbagbo ? De toute apparence, oui ! Car, finalement sorti victorieux de son procès à la CPI, l’enfant de Guiberoua dans le Centre-Ouest de la Côte d’Ivoire, semble avoir bénéficié de la clémence du pouvoir d’Alassane Dramane Ouattara. D’où son retour annoncé « sobre » et sans « triomphalisme ». Sauf donc changement de dernière minute, les partisans de Blé Goudé auront l’occasion de le voir, samedi prochain, fouler le tarmac de l’aéroport international Félix Houphouët-Boigny. S’il en est arrivé là, Blé Goudé sait à qui il le doit en particulier. C’est le pouvoir ivoirien qui a rendu possible aujourd’hui, ce qui était encore impossible hier. Car, pour le retour de l’illustre exilé, « les autorités ivoiriennes ont formellement donné leur accord par écrit », le 30 septembre 2022.
Tout dépend de son engagement à faire la paix et de la posture de ses partisans
Mesurant certainement le caractère clivant d’un tel geste, Blé Goudé comprend qu’il doit faire profil bas. Et ses partisans avaient, en ce sens, donné le ton. « Le ministre Charles Blé Goudé estime qu’il y a eu trop de violences au moment où il partait de la Côte d’Ivoire. Il ne voudrait pas que son retour frise le réveil des pleurs, des souffrances. Bien au contraire. Après toutes ces années passées en prison, à La Haye, il voudrait que tous les Ivoiriens se retrouvent dans son retour », selon le Comité panafricain pour la justice et l’égalité des peuples (COJEP), structure chargée de préparer le retour au bercail de l’homme. Cela dit, Blé Goudé entrera-t-il en homme nouveau dans son pays ? S’est-il débarrassé de sa fourrure de loup pour entrer sans réserve dans la peau de l’agneau ? Les Ivoiriens dont beaucoup continuent de pleurer leurs morts pour lesquels ils cherchent, jusqu’à présent, justice et réparation, attendent de voir. Toujours est-il que l’ancien ministre de la Jeunesse, l’un des principaux bénéficiaires de la réconciliation nationale enclenchée du côté de la lagune Ebrié, n’a pas à trahir sa parole ni à violer le pacte qui lui a ouvert les frontières de son pays. Autrement dit, son retour peut contribuer à renforcer la paix et la cohésion entre les Ivoiriens, mais tout dépend de son engagement à faire la paix et de la posture de ses partisans dans ce sens.