Afin de faciliter l’accès aux financements des projets des jeunes, l’Etat burkinabè a mis en place plusieurs structures d’appui dont le Fonds d’appui à la promotion de l’emploi (FAPE). Cependant, force est de constater que pour bénéficier d’un financement, c’est la croix et la bannière pour une bonne partie des jeunes porteurs de projets. Dans cette interview, la Directrice générale du FAPE, Mme Karidiatou Dao, présente les conditions d’octroi de crédit et évoque la problématique du recouvrement des fonds placés chez certains promoteurs.
Libreinfo.net : Présentez-nous le Fonds d’appui à la promotion de l’emploi (FAPE).
Mme Karidiatou Dao : Le FAPE est une structure de l’Etat rattachée à la tutelle technique du Ministère des Sports, de la Jeunesse et de l’Emploi.
Le FAPE a pour mission principale le financement des projets des jeunes et des moins jeunes dont l’âge est compris entre 18 ans et 64 ans. En plus du financement, le FAPE assure également le suivi et l’accompagnement des promoteurs et procède également au recouvrement des fonds qu’il a placés auprès des promoteurs. Il existe deux types de financement : Le financement direct et le préfinancement de marchés.
Lorsqu’un promoteur bénéficie d’un financement, nous l’accompagnons sur le plan technique à travers des formations en gestion de micro-entreprise, en éducation financière pour que ce promoteur puisse réussir dans son entreprise. Nous avons aussi des périodes où nous effectuons des sensibilisations sur les créneaux porteurs.
Le FAPE a également pour mission d’approcher des partenaires techniques et financiers dans le cadre de la mobilisation des ressources pour renforcer nos actions de financement. Cette mission est réalisée avec l’appui du gouvernement à travers le ministère en charge des Finances.
Libreinfo.net : Quelles sont les conditions pour bénéficier du financement du FAPE ?
Mme Karidiatou Dao : Les conditions d’accès aux crédits sont quasiment les mêmes pour le demandeur. En plus du projet que l’intéressé présente, il faut également les éléments de garanties. Ces garanties sont, soit un permis urbain d’habiter (PUH) ou un permis d’exploiter, un titre foncier, un bulletin de salaire ou une carte grise de véhicule. Pour les associations, il faut un récépissé de reconnaissance du groupement ou de l’association et une caution solidaire signée des membres.
Libreinfo.net : Quels sont les domaines d’intervention du FAPE ?
Mme Karidiatou Dao : Nous intervenons dans plusieurs domaines. Il s’agit, notamment, de l’agriculture, de l’élevage, la transformation, l’Artisanat, du commerce, du transport, des bâtiments et travaux publics et des services.
Les taux d’intérêts diffèrent d’un domaine à un autre. Lorsqu’il s’agit des domaines du commerce et des services, le taux d’intérêt est de 12%. Pour la transformation et l’artisanat, le taux est de 10% et de 8% pour l’agriculture et l’élevage. Cette différence se justifie par le fait que nous faisons la promotion du secteur agro-silvo-pastoral. Toutefois, les personnes vivant avec un handicap bénéficient d’un taux d’intérêt bonifié de 4%, quel que soit le secteur d’activité retenu.
Les 8% au niveau de l’agriculture et de l’élevage se justifie par le fait qu’il de domaines porteurs mais qui sont quasiment vierge. C’est pourquoi le gouvernement a certainement tenu à ce que leurs conditions, soient plus attractives.
Libreinfo.net : Quel est le délai de remboursement des crédits ?
Mme Karidiatou Dao : Il convient de préciser que les montants que nous octroyons vont d’un million cinq cent mille de F CFA à 10 millions de F CFA. Aussi, le délai de remboursement, qui va de 02 à 05 ans, est fonction du montant accordé. Nous accordons également un différé dans le remboursement qui va de 1 mois à 6 mois, en fonction du secteur d’activité.
Libreinfo.net : Quelles sont les difficultés que les demandeurs de financement rencontrent le plus souvent ?
Mme Karidiatou Dao : Merci de nous donner l’occasion de mieux préciser les choses. Vous savez, nous sommes conscients que certains promoteurs rencontrent des difficultés tant dans la durée de traitement de leur dossier que dans le montant qui leur est octroyé. Néanmoins, lorsque ces situations arrivent, c’est généralement parce que la demande est très forte à notre niveau. Toute chose qui joue bien évidemment sur la disponibilité des ressources financières.
Face à des dossiers porteurs, nous préférons patienter jusqu’à ce que nous ayons la possibilité de financer le projet soumis.
En plus du délai de traitement, qui constitue une difficulté pour les bénéficiaires, il y a également la problématique des montants sollicités et accordés. A ce sujet, lorsque le comité estime qu’il est possible d’accompagner un promoteur avec un montant inférieur à ce qui a été demandé, le FAPE l’accompagne. Il faut préciser que cette décision est faite après analyse approfondie du dossier présenté. Lorsqu’un montant est accordé, c’est avec la certitude de la possibilité de réaliser le projet soumis avec ce montant.
Une autre difficulté à laquelle nous faisons face en tant qu’institution cette fois-ci, c’est les cas de détournement d’objet qui fait que les fonds octroyés peuvent être utilisés aux fins d’autres projets, qu’à celui initialement présenté. Cette situation fausse souvent nos statistiques et joue d’ailleurs sur le recouvrement.
Libreinfo.net : Qu’est-ce qui est fait lorsqu’un bénéficiaire n’arrive pas à rembourser son crédit ?
Mme Karidiatou Dao : En cas de défaut de remboursement, plusieurs mesures sont prévues : la phase d’interpellation, la phase de mise en demeure, et enfin, le contentieux qui aboutit à la réalisation des garanties. Mais, compte tenu de notre rôle social, nous n’aimons pas aller jusqu’à la réalisation de la garantie. Qu’à cela ne tienne, le FAPE peut utiliser les voies amiables et le recours au recouvrement forcé.
Libreinfo.net : Est-ce qu’il y a, finalement, une différence entre le FAPE et les banques, quand on sait que le FAPE exige une garantie et applique un taux d’intérêt au même titre que les banques ?
Mme Karidiatou Dao : C’est une question qui nous revient régulièrement. En tant que fonds national, qui est une structure étatique, nous ne sommes pas en concurrence avec les banques. Nous venons en complément des banques en permettant à ceux qui n’ont pas accès aux banques de pouvoir bénéficier d’un crédit pour créer ou renforcer leur activité.
Libreinfo.net : Combien de projets avez-vous financés durant les dix dernières années ?
Mme Karidiatou Dao : Sur les dix dernières années, nous avons financé 6618 projets. Pour l’année 2022, à ce jour, nous avons déjà réceptionné près de 500 dossiers pour une demande de l’ordre de 3 milliards de F CFA environ.
Permettez-moi avant de terminer de profiter de l’occasion pour inviter et interpeller les promoteurs à rembourser les fonds mis à leur disposition. Comme nous l’avons souligné plus haut, il n’est souhaitable pour aucun que le recours au recouvrement forcé soit utilisé.