Depuis l’arrestation des quarante-neuf militaires ivoiriens à l’aéroport de Bamako, les relations sont tendues entre le Mali et la Côte d’Ivoire. Après ce que l’on peut qualifier d’échec des négociations à Lomé sur leur libération, lesdits militaires ont été présentés au procureur de la République, mis en examen et écroués. Bamako a donc décidé de faire monter la pression d’un cran. C’est dans ce contexte que le président sénégalais, Macky Sall, a entamé un périple qui le conduira à Ndjamena, après une escale de quelques heures à Bamako, le 15 août dernier. A Bamako, les discussions portaient sur les relations bilatérales entre les deux pays. La fermeture des frontières avec le Mali, décidée par la CEDEAO à la suite du deuxième coup d’Etat du colonel Assimi Goïta en mai 2021, a durement affecté chacun des deux pays. La nécessité d’une feuille de route commune sur la reprise économique, est donc plus que d’actualité. Avec son chapeau de président de l’Union africaine (UA), Macky Sall ne manquera sans doute pas d’évoquer le cas des militaires ivoiriens. Les autorités de Bamako lui prêteront-elles une oreille attentive ? On peut bien le penser. Car, Macky Sall ne figure pas parmi les va-t-en-guerre dans la « cabale » contre le Mali à la suite du coup d’Etat. Bien au contraire, il a prêché la modération et prônait même la levée des sanctions qui avaient été imposées au Mali. Cette bienveillance lui a attiré sans doute la sympathie des autorités de la Transition malienne qui, du coup, pourraient être plus sensibles à tout plaidoyer de sa part.
Vivement que la raison triomphe !
Un sujet cependant peut faire l’objet de désaccord. Un délai a été fixé pour la fin de la Transition et l’organisation d’élections pour la transmission du pouvoir à des organes élus. Dans la mouture actuelle de la Charte de la Transition, des membres de la junte militaire pourraient bien être candidats aux élections. Ce que les institutions sous- régionale et africaine ne sont pas prêtes à admettre. A ce niveau, des risques de désaccords existent bel et bien, à moins que les militaires au pouvoir à Bamako acceptent réellement de jouer le jeu démocratique et de se retirer à l’issue de la période de transition. La présence de Macky Sall à Ndjamena s’inscrit dans le cadre du dialogue national inclusif dont l’ouverture est prévue pour le 20 août prochain. Il devrait permettre le retour à l’ordre constitutionnel au Tchad. L’UA est fortement impliquée dans l’organisation du dialogue national, d’où le déplacement de son président, Macky Sall, à Ndjamena. Officiellement, sa visite s’inscrit dans le cadre des relations bilatérales. Mais on sait que le Tchad et le Sénégal ont très peu à discuter sur leurs relations bilatérales, les intérêts réciproques étant insignifiants au regard de la distance et de la structure de leurs économies respectives. Il s’agira donc sans doute de rappeler aux dirigeants tchadiens la nécessité du respect du délai de la Transition qui a été fixé à dix-huit mois. Or, ceux-ci ne semblent pas vouloir aller dans ce sens. Le délai de la Transition étant dit renouvelable, le général Deby fils et ses compagnons d’arme ont là une porte ouverte pour la prolongation de la Transition. Il s’agira donc pour Macky Sall, d’obtenir le respect clair et ferme du délai fixé. Sera-t-il entendu ? C’est là toute la question. Car, à observer la junte militaire tchadienne, le doute est permis. Une éventuelle prolongation de la période de Transition, peut ramener le Tchad dans le giron des vieux démons. Il n’est pas dit que les signataires de l’Accord de Doha, en prélude au dialogue national inclusif, assisteront sans réagir à toute tentative de prolongation de la durée de la Transition. Le pays pourrait alors sombrer de nouveau dans d’incessants conflits internes. Vivement donc que la raison triomphe et que Macky Sall soit entendu !