Les conflits armés et la cohésion sociale étaient, mardi, au centre des échanges entre des communautés ivoiriennes et burkinabè à Laléraba, un village dans l’extrême nord ivoirien, à la frontière avec le Burkina Faso, pays voisin éprouvé par le terrorisme.
Cette rencontre des populations transfrontalières a regroupé d’un côté des jeunes et de l’autre, des femmes des deux pays, dans une même salle, autour de leur contribution face aux défis de la violence de la part des groupes armés non étatiques et du renforcement de la cohésion sociale.
Les commissions nationales des frontières de la Côte d’Ivoire et du Burkina Faso ont mobilisé les communautés transfrontalières pour cet événement, financé par le système des Nations Unies et visant à renforcer la gouvernance des zones frontalières pour consolider la cohésion sociale et prévenir les conflits.
Un match amical de football entre les jeunes des villages frontaliers s’est tenu à Laléraba. Il a été interrompu par une forte pluie, alors que l’équipe burkinabè menait (1-0). Cette rencontre sportive et les échanges entre les populations ont meublé la première journée de cet événement qui s’étend sur deux jours.
M. Marc Vincent, le représentant de Unicef Côte d’Ivoire, a indiqué que la rencontre de ce jour intervient en prélude au lancement officiel du Projet transfrontalier dénommé "Renforcer la gouvernance des zones frontalières pour consolider la cohésion sociale et prévenir les conflits". La représentante de l’Unicef Burkina Faso, Sandra Latouf, était aussi présente.
Ce projet d’un coût global de 4 millions de dollars US, soit plus de 2,6 milliards FCFA, s’étend sur la période de janvier 2022 à décembre 2023. Il est financé par le Fonds des Nations Unies pour la Consolidation de la paix (PBF) et vise à réduire la vulnérabilité des populations des zones frontalières face aux dynamiques évolutives de conflits en lien avec la crise au Sahel.
Le projet vise également à renforcer la cohésion sociale, la sécurité et la résilience des populations. La Côte d’Ivoire et le Burkina Faso partagent 620 Km de frontières et des liens culturels, ethniques et économiques, avec des défis identiques en termes de déficit de gouvernance des zones frontalières, une gestion complexe des conflits fonciers.
Ces défis exposent ces régions frontalières à l’influence et à l’impact de la crise sécuritaire au Sahel avec la menace des groupes armés non étatiques (GANE), dont le mode opératoire vise à fragiliser davantage les représentations de l’État dans des zones reculées (attaques contre les postes de police, gendarmeries, forces de défenses).
M. Oyewole Nuridine, coordinateur technique en charge des contentieux, des affaires juridiques et de la coopération transfrontalière, au nom du secrétariat exécutif de la Commission nationale des frontières de la Côte d’Ivoire (CNFCI), s’est félicité de ce projet qui vient favoriser davantage le brassage entre ces peuples et consolider la fraternité et les liens séculaires.
"C’est vrai que nos pays sont délimités par une frontière, Mais ce sont les mêmes peuples qui vivent de part et d’autre, et donc notre rôle est de faire en sorte qu’à travers la coopération transfrontalière, nous puissions consolider la paix, créer une cohésion sociale, mais surtout permettre à ce que nos zones frontalières soient des espaces de paix et de développement", a-t-il dit.
Au cours des échanges, les jeunes ont soulevé la question de manque d’emplois qui favorise la poussée terroriste dans la région. Quant aux femmes, notamment celles du Burkina Faso, elles ont relevé la problématique de l’entrepreneuriat et la peur de représailles de personnes en connivence avec des groupes armés.
Mme Mariam Kam, la secrétaire générale de la coordination départementale des femmes Gnangologo, au Burkina Faso, a noté qu’au niveau de "l’ambiance et l’amour, il n’y a pas de différence entre ces deux pays, tout va bien entre le Burkina et la Côte d’Ivoire".
Le terrorisme, "on a peur de prononcer ce mot, vraiment, au Burkina, ça ne va pas du tout; chaque fois, nous avons la peur au ventre. Ca tire partout et chaque jour, nous avons des déplacés internes, qui peuvent venir par milliers par jour ne sachant où aller et dormir", a-t-elle poursuivi. Les déplacés sont encadrés par les services d’assistance sociale.
Pour matérialiser la volonté des Nations Unies d’accompagner la Côte d’Ivoire et le Burkina Faso dans leurs efforts de lutte contre les groupes armés du Sahel à leurs frontières, les autorités ivoiriennes et le coordonnateur résident des activités opérationnelles du système des Nations Unies en Côte d’Ivoire ont signé le 2 décembre 2021 à Abidjan ce projet transfrontalier pour renforcer la sécurité et la cohésion sociale, dont le lancement est prévu ce mercredi 27 juillet 2022.